« La retraite pour les travailleuses, qu’est-ce que c’est ? Un but ? Ou un piège ? Tout dépend du travail, tout dépend de la retraite. » La retraite des femmes est un sujet d'actualité depuis les années 70. Les inégalités dans ce domaine perdurent. Aujourd’hui encore, les femmes touchent 40% de moins que les hommes à la retraite selon le ministère de la Santé. Ce chiffre peut s’expliquer par une succession d’inégalités tout au long de la carrière des femmes. Et cela depuis longtemps.
En 1971, la sociologue du travail, Pierrette Sartin, pointait déjà les écarts de salaire entre hommes et femmes : « Il faut dire que les femmes dans la vie du travail, et du secteur industriel en particulier, ne sont ni très gâtées, ni très favorisées. C’est un monde masculin, le monde de l'industrie. Les femmes y sont tolérées plus qu’elles n’y sont admises à bras ouverts. Les femmes sont généralement sous payées par rapport aux hommes dans des proportions assez considérables. Elles ont très peu d’espoir d’avancement. »
C’était selon elle l’une des explications des inégalités au moment de la retraite. Et en 2002, ce constat n’avait pas changé. « Nous ce qu’on a constaté quand même, c’est qu’à responsabilité équivalente aujourd’hui, les femmes sont moins bien payées que les hommes, expliquait André Cahagne, responsable d’une mutuelle spécialisée dans l’assurance vie. Donc c’est l’une des premières causes de cet écart dans les retraites que l’on retrouve plus tard. »
Carrières hachées et emplois précaires
Autre raison des inégalités au moment de la retraite, les carrières discontinues des femmes. Entre les congés maternité et les congés parentaux, elles connaissent plus de périodes d'inactivité que les hommes. Résultat, aujourd’hui, pour compléter leur durée d’assurance, les femmes partent en moyenne à la retraite 7 mois après les hommes.
En 2010, cette infirmière, Anne-Marie Martin-Périchon, le déplorait déjà : « Je ne trouve pas ça juste parce que c’est vrai que les femmes doivent gérer deux situations. Le fonctionnement familial, le travail, parce que souvent un salaire ne suffit pas pour élever ses enfants donc on complète avec du temps partiel et finalement à la sortie on se retrouve avec des petites retraites. »
Enfin, si les femmes gagnent moins que les hommes à la retraite, c’est aussi parce qu’elles sont plus concernées par des emplois précaires. En 2019, 28% des femmes travaillaient à temps partiel, contre 7% des hommes. Un choix souvent fait pour concilier vie professionnelle et vie familiale, mais qui se paie quand vient l’âge de la retraite.
La sociologue Dominique Méda dressait le même constat en 2010. Elle tirait aussi des conclusions : « Vous voyez le problème, c’est que les femmes comme elles s’interrompent beaucoup et qu’il faut une certaine durée de cotisation pour obtenir la pension de retraite et notamment le taux plein. Les femmes, elles doivent travailler plus longtemps. » Un enjeu majeur en cas de réforme des retraites : « Vous voyez toutes les réformes qui allongent la durée de cotisation, elles sont pénalisantes pour les femmes. »
Aujourd’hui, cette idée est toujours au cœur du débat sur la réforme des retraites. En janvier dernier, Franck Riester, le ministre chargé des relations avec le parlement, le reconnaissait. Selon lui, les femmes seront « un peu pénalisées » par la réforme.
