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Une femme qui aime un homme plus jeune : un sujet tabou qui fascine la télé

Une femme qui aime un homme plus jeune : un sujet tabou qui fascine la télé

Le film de Carine Tardieu « Les jeunes amants » raconte la passion amoureuse entre une femme de 70 ans et un homme de 45 ans. Une femme peut-elle aimer un homme plus jeune qu’elle ? La société a toujours eu du mal à envisager cette possibilité. Dès les années 70-80, certaines femmes osaient en parler à la télé.

Par Florence Dartois - Publié le 03.02.2022
 

Mercredi est sorti le film de Carine Tardieu Les jeunes amants, l'histoire d'une passion amoureuse entre une femme de 70 ans et un homme de 45 ans. Le couple est joué par Fanny Ardant et Melvil Poupaud.

En 2019, une étude de l'Ined avait montré que 16% des femmes vivaient avec un compagnon plus jeune, contre 10% dans les années 1960. Si ce type de relation n'est plus tabou, elle reste marginale.

Dans les années 70-80, dans une société encore très patriarcale, ce type de couple suscitait de nombreuses réactions, entre rejet, incompréhension ou curiosité. Nous avons retrouvé plusieurs archives traitant de ce sujet. Ces couples rares fascinaient les magazines télévisés. Pour débuter cette incursion, l'archive en tête d’article présente l'histoire d’amour d'une femme de 74 ans avec un homme de 46 ans. Une passion imprévue que la septuagénaire était venue raconter avec beaucoup de drôlerie, en juin 1984, sur le plateau du magazine « Aujourd’hui la vie », intitulé ce jour-là : « Elle pourrait être sa mère ».

Comme un nouveau départ

Trois femmes étaient présentes en plateau, mais Madame Piveteau était la plus loquace, assumant sa relation pourtant réprouvée par sa famille. Veuve d’un premier mariage, elle vivait depuis trois années une passion avec un dameur sur neige rencontré dans un parc d’Aix-les-Bains en 1981. La pimpante retraitée racontait des détails sur leur rencontre : « J’avais envie de flirter », « Je l’ai regardé, on s’est souri tous les deux », « Il s’est levé, je l’ai suivie. Ne me demandez pas pourquoi ».

Un coup de foudre, rapidement consommé et toujours aussi intense. Elle assurait que son Roméo ne regardait pas les autres femmes et ne cachait rien des détails de cet amour qu’elle voyait comme un nouveau départ dans la vie. « Il m’a appris beaucoup de choses que je ne savais pas », confie-t-elle.

Des réactions violentes

Ce témoignage joyeux ne doit pas faire oublier que s'exprimer à visage découvert demandait du courage et impliquait des réactions parfois négatives. Dans la même émission, une femme de 35 ans, en couple avec un homme de 20 ans, racontait les injures qu'elle avait reçues après avoir témoigné à la télévision quelques semaines plus tôt  : « On a dit que j’étais sans pudeur. On a dit que j’étais écœurante et on a dit que j’étais exhibitionniste. Parce que j’en parlais. ». S'adressant aux autres invitées, elle résumait ainsi le point de vue de la société : « Il faudrait Mesdames qu’on nous enferme et qu’on nous cache parce que nous ne sommes pas un exemple ». Elle rejetait la notion d'« anormalité », concluant : « Et bien je regrette, on a une vie de couple tout à fait normale. »

« Il y a les élans du cœur ! Qu’est-ce que l’âge a à voir là-dedans ? »

Qu'en pensait-on dans la rue ?

Ces deux témoignages reflètent le regard souvent moralisateur de la société. Dans le micro-trottoir ci-dessous, les femmes interrogées réprouvaient majoritairement ces idylles. Nous sommes en 1973, les hommes et les femmes interrogés avouaient, à de rares exceptions, préférer que l'homme soit le plus âgé. Sécurité, autorité, équilibre… Autant de notions qui revenaient dans les réactions.

« Je préférerais que l’homme que je fréquente soit plus âgé. La jeune fille est beaucoup plus attirée vers un homme plus âgé », « Un homme qui est plus âgé que la femme a déjà une situation en principe », « Quand un couple s’entend, l’âge n’a pas d’importance »

L'avis des experts

Ce micro-trottoir avait été diffusé le 15 septembre 1973 dans « Aujourd'hui Madame ». En plateau, quelques femmes avaient accepté de témoigner. Face à elles, un sexologue plutôt maladroit et obséquieux, que nous vous proposons d'écouter ci-dessous, donnait son opinion sur la question. A ses yeux, une femme plus âgée représentait « un handicap », ajoutant : « Le ciment du couple c’est quand même le désir réciproque, or on ne peut désirer que ce qui est désirable (...) Les liens peuvent devenir des entraves, des chaînes. »

« L’homme reste à peu près le même, il n’a pas à subir les maternités ni la ménopause. L’écart s’accentue autour de la quarantaine. A 50 ans, il y a une altération qui joue en défaveur de la femme et ce n’est pas de sa faute, c’est comme ça… » (Gérard Zwang, sexologue)

Ce jour-là, pour temporiser le débat, l'historienne Jeanne Bourin était venue donner plusieurs exemples de relations amoureuses célèbres à travers l'histoire : Diane de Poitiers et Henri II (20 ans de différence), Julie de Lespinasse et Jacques de Guibert (11 ans de différence), Madame de Staël et John Rocca (22 ans de différence), Colette et Maurice Goudeket (26 ans de différence), et enfin Edith Piaf et Théo Serapo (20 ans de différence).

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