L'ACTU.
François Hadji-Lazaro, décédé le 25 février, était un artiste complet, engagé et épris de liberté. Il n'avait pas la langue dans sa poche et entendait s'exprimer sans aucune censure. Fondateur du groupe Pigalle au début des années 1980, puis des Garçons bouchers en 1986, il était aussi le créateur du label indépendant Boucherie Productions, qui défendait un rock différent, dit alternatif entre 1985 et 2001.
Grâce à ce label, les Garçons bouchers sortiraient six albums entre 1986 et 1995. Leurs fans n'ont pas oublié des titres comme Carnivore, La lambada on n'aime pas ça ! Ou encore Du Beaujolais ou La bière, deux titres à découvrir dans l'archive en tête d'article.
L'ARCHIVE.
Nous avons retrouvé dans nos archives, une interview particulièrement révélatrice de l'état d'esprit de François Hadji-Lazaro et de son groupe. Le 21 octobre 1989, le magazine « Les Doigts dans la prise » leur consacrait un long reportage. Installé avec ses complices dans un bar cosy, François, leur porte-parole, évoquait leur manière de pratiquer la musique. Il ne se privait pas de critiquer « les Majors » qui vendaient de la musique comme de la charcuterie. « Vendre de la musique comme un produit, c’est grave ! », s'exclamait-il. Pour cette raison, il avait créé un label autonome, pour s'exprimer sans contrainte et aider d'autres groupes à publier.
Pas de diktat et beaucoup d'humour, tel était leur credo. Leur sujet fétiche : la France, « on aime manier le premier et second degré », une manière bien à eux de rendre hommage à sa culture, à sa gastronomie et à « son bon vin », plaisantait le chanteur multi-instrumentiste.
Les rockeurs chantaient le titre Du Beaujolais, avant d'expliquer sa genèse. Il s'agissait d'une reprise de No milk today : « on est à la limite du mauvais goût avec cette chanson à boire, qui est en fait une chanson désespérée d’amour », déclarait un membre du groupe.
Des Français engagés
Derrière leurs chansons déjantées se cachait en réalité un engagement et un rejet de « tous les fascismes, de l’intolérance et du racisme », ajoutait plus sérieusement François. « Ça devrait être une évidence ! Ce n’est pas une question d’intelligence, c’est une question de logique. » Leur répertoire dénonçait aussi bien l'intolérance qu'un certain égoïsme éhonté caractéristique des années 1980, les années « fric ».
L'artiste expliquait que cet engagement était « social et militant », ancré dans le quotidien : « on n’est pas des musiciens, des artistes hors du système, on est en plein dedans. Tous les jours on vit la réalité de la vie quotidienne. La France, c'est un pays qui est quand même gouverné par l’argent d’abord », concluait-il avec un demi-sourire à peine désabusé. Quant à leurs influences, à l'image de leurs textes, elles étaient multiples : « On se sent proche des racines françaises, autant que des racines anglo-saxonnes du rock. C’est extrêmement important », assurait-il.
Le reportage se concluait en musique et en alcool, avec une boisson emblématique de la jeunesse fréquentant les bars : La bière.