L'ACTU.
Selon une étude sur le déclin de la biodiversité française dans les cours d'eau, publiée le 22 mai 2024, par le Fonds mondial pour la nature WWF, la population de truites françaises a baissé de près de moitié en vingt ans : 44 % depuis 1995. Le mauvais état des cours d'eau et la surmortalité sont dues à plusieurs facteurs : l'activité humaine, l'agriculture intensive, mais aussi, dans les années 60-70, la modification ou le recalibrage des rivières, ou encore la disparition des zones humides à cause du drainage des terres. « Or, les politiques de restauration des rivières mises en place depuis plusieurs années et les dépenses importantes accompagnant cette réorientation n’ont malheureusement pas suffit à ce jour à contrebalancer l’ensemble des atteintes à l’environnement », précise le rapport.
Ajoutés à cela, le réchauffement des cours d'eau et la pollution, qui entraînent des difficultés de reproduction et la baisse de la population des poissons d'eau douce et plus spécifiquement des salmonidés, dont fait partie la truite. Et même les politiques de ré-empoissonnement ou de fécondation artificielle ou alevinage, effectués par les sociétés de pêche, ne parviennent plus à endiguer le déclin.
Détournement de l'Ill pour éviter les inondations
1971 - 00:00 - vidéo
Exemple du détournement de la rivière Ill en Alsace en 1971.
Plusieurs espèces de truites fréquentent les rivières et cours d'eau : la truite fario, la truite l’Iton ou encore, la truite arc-en-ciel, une variété qui a été importée des États-Unis pour repeupler les cours d'eau. Si cette dernière supporte les températures allant jusqu'à 22 °C, les autres truites ne peuvent tolérer plus de 18 °C.
Description de la truite arc-en-ciel
1973 - 00:00 - vidéo
Description de la truite arc-en-ciel, poisson importé des USA pour repeupler les cours d'eau.
L'ARCHIVE.
La truite fait partie du patrimoine culturel de l'Hexagone depuis des siècles. Elle est indissociable de la pêche qui resta longtemps un loisir très prisé des Français. La pêche à la truite ouvre traditionnellement la campagne de pêche qui débute généralement à la mi-mars. Nos archives regorgent de reportages aussi truculents que pittoresques sur ces ouvertures de pêche.
Nous vous proposons un détour en Provence, plus spécifiquement à Trans-en-Provence, où chaque année, la rivière Nartuby devient le lieu de rassemblement de tous les aficionados de la canne à pêche, et ce, encore aujourd'hui. Armés de leurs plus beaux appâts et hameçons, des pêcheurs du Var, mais pas seulement, puisque ce sont des milliers d'amoureux de la truite qui font le déplacement, se lèvent à l'aube pour taquiner le précieux poisson. C'est ce que précisait déjà un reportage de 1962, à découvrir ci-dessous.
Pêche à la truite
1962 - 00:00 - vidéo
« C'est la veillée d'armes des plus fines gaules, certaines sont venues de Suisse, de Belgique et même d'Angleterre... »
L'archive en tête d'article illustre à merveille ce moment très attendu des passionnés. Il s'agit d'un reportage de 1964, de « Provence Actualités », qui débute dans une auberge pittoresque de Trans, le Vieux moulin, où les lève-tôt se retrouvaient à l'aube pour un petit déjeuner roboratif et un café serré, avant d'attaquer la journée de pêche. Le commentaire du journaliste, un poil désuet et pittoresque, lui aussi, nous plonge dans l'ambiance surannée de ce rendez-vous traditionnel : « La température en baisse n'avait point rebuté les "chevaliers de la gaule" (canne à lâche rudimentaire en noisetier) qui viennent, chaque mars, demander à la fougueuse Nartuby (la rivière locale), de leur livrer la reine des eaux vives. »
Cette reine, c'est bien-sûr la truite, que chacun allait taquiner, après avoir vérifié son matériel : canes, lignes supplémentaires, moulinets... Puis, c'était le départ en formation serrée, clope au bec et bien emmitouflé, vers les « les postes secrets ». Pas si secrets que cela, puisque le journaliste précisait que cette année-là, 2 000 pêcheurs avaient campé sur les rives, réchauffés par des feux de camps improvisés où l'on jouait aux cartes en attendant « l'heure H ». Un secret de Polichinelle, aurait-il pu ajouter.
Après avoir rejoint les bords de la rivière, alors que le matin pointait à peine son nez, « des centaines de nylons fouettèrent l'air vif du matin encore nocturne », ajoutait le journaliste. S'il y avait autant de monde sur les bords de la Nartuby, c'était parce que, nourris par des fonds riches en nutriments, les prises avaient la réputation d'être miraculeuses. Les truites dépassaient parfois les cinq kilos !
Au fur et à mesure de la journée, les images du reportage dévoilaient la beauté du cours agité de la Nartuby, un affluent du fleuve l'Argens, d'une longueur de 32 km, perché à environ 1 000 mètres d'altitude : « Son parcours enchante la campagne varoise d'une mélodie tour à tour blanche et verte », argumentait le commentaire. Les plans du reportage montraient également l'escarpement abrupt des rives, sur lesquelles les pêcheurs, aux talents d'alpinistes, tentaient de conserver l'équilibre, car il n'aurait pas fallu rejoindre la belle tout en écailles, dans les flots glacés de la rivière tourmentée.
Quel serait le bilan de cette pêche sportive ? Nous vous laissons découvrir si « dame truite » avait ignoré - ou non - les vers gesticulants et autres mouches traîtresses.
