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1990 : la folle crise de la contamination au benzène du Perrier

1990 : la folle crise de la contamination au benzène du Perrier

Selon une enquête du «Monde» et de la cellule investigation de Radio France, Nestlé et d’autres industriels ont eu recours à des systèmes de purification interdits en France. Une enquête préliminaire pour tromperie a été ouverte par le parquet d’Épinal à l’encontre de Nestlé Waters le 31 janvier 2024.

Par Florence Dartois - Publié le 01.02.2024
Affaire Perrier - 1990 - 00:00 - vidéo
 

L'ACTU.

Une enquête préliminaire pour tromperie a été ouverte le 31 janvier 2024 par le parquet d’Épinal à l’encontre de Nestlé Waters pour soupçon de recours à des traitements illégaux pour purifier ses eaux minérales.

Une enquête du Monde et de la cellule d'investigation de Radio France a en effet révélé que Neslé Waters a utilisé jusqu’à 2021 des méthodes d’assainissement de l’eau contraires aux réglementations en vigueur. Une eau minérale dite naturelle et de haute qualité microbiologique ne nécessite par nature aucun traitement ni désinfection, contrairement à l’eau du robinet qui doit être désinfectée pour devenir potable. Tout traitement d'une eau minérale est donc hors du cadre règlementaire pour des eaux minérales.

Le groupe a confirmé cette information le 29 janvier en précisant avoir eu recours à des traitements aux ultraviolets et à des filtres au charbon actif sur quatre eaux minérales vendues en bouteilles : Perrier, Vittel, Hépar et Contrex. Dans Les Échos, Muriel Lienau, la présidente de Nestlé France, a déclaré : « Il y a eu des erreurs, conduisant à des enjeux de conformité. Tout en garantissant la sécurité alimentaire, nous avons utilisé des mesures de protection qui n’étaient pas en ligne avec le cadre réglementaire ou avec son interprétation ».

Perrier avait déjà connu une grave crise en 1990 avec une contamination au benzène. La direction avait joué la transparence comme le montre les archives à découvrir dans cet article.

LES ARCHIVES.

« Pour quelques traces de benzène dans quelques bouteilles, Perrier décide donc de tout stopper ». En février 1990, l'alerte était venue des États-Unis où un laboratoire avait trouvé des traces de benzène, un gaz cancérigène, dans des bouteilles de Perrier. Sous la pression américaine, le président du groupe, Gustave Leven, n'avait pas eu d'autre choix que de retirer la production des rayons, soit 280 millions de bouteilles dans le monde, dont 160 millions rien qu'aux États-Unis. L'opération avait coûté environ 1 milliard de francs.

Le 14 février, le groupe organisait une conférence de presse pour annoncer la mesure. Conférence où le PDG reconnaissait les faits sur un ton assuré et étrangement détendu faisant (presque de l'humour) : « Comme vous le savez, "Perrier c'est fou", c'est notre publicité en France. Mais si c'est fou, nous avons décidé de retirer l'ensemble des bouteilles, sur l'ensemble des marchés, dans le monde entier ». Il achevait sa déclaration en buvant une bouteille d'eau gazéifiée pour prouver qu'il n'y avait aucun danger à la consommer. Son coup de com' ressemblait à un coup de pub ! Cette archive étonnante est disponible en tête d'article.

Une autre scène abstraite allait se dérouler le même soir dans le 19-20 de FR3. À la fin de son interview, Claude Evin, ministre de la Santé, acceptait de boire un verre de Perrier servi par Paul Amar. Nouveau coup de pub bienvenu pour la marque.

Claude Evin boit un verre de Perrier
1990 - 00:00 - vidéo

À la source du scandale

Entre méfiance et indifférence des consommateurs interrogés dans le micro-trottoir ci-dessous, les bouteilles allaient rapidement être retirées des rayonnages en France. Des examens furent immédiatement menés à la source de Vergèze dans le Gard, à 15 kilomètres de Nîmes, par l'Institut d'hydrologie de Clermont-Ferrand. Dans l'archive suivante, Denise Pépin, sa directrice, donnait les résultats des tests. Et contre toute attente, elle annonçait que le benzène ne se trouvait pas dans la source, mais était vraisemblablement la conséquence d'un problème de filtrage...

Benzène trouvé dans de l'eau Perrier
1990 - 00:00 - vidéo

Une erreur humaine était donc à l'origine de la polémique. En effet, à l'entrée des chaînes d'embouteillages, un filtre était chargé d'arrêter les impuretés contenues dans le dioxyde de carbone de la source. Il devait être remplacé tous les six à huit mois, ce qui n'avait pas été le cas, laissant passer le benzène dans le produit fini.

Cette crise n'a pas été sans conséquence, car les ventes de la marque se sont effondrées. Le chiffre d'affaires de Perrier ne retrouvera son niveau de 1989 qu'en 2013.

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