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Marcel Marceau : «Le mime est un art poétique qui suscite l'imagination du public»

Marcel Marceau : «Le mime est un art poétique qui suscite l'imagination du public»

À l'occasion du centenaire de la naissance du Marcel Marceau, les éditions Actes Sud sortent une biographie sur le célèbre mime, intitulée « Histoire de ma vie ». En 1964, accueillant la télévision chez lui, ce précurseur du mime racontait l'histoire de la pantomime à l'origine de son amour pour cet art gestuel silencieux.

Par Florence Dartois - Publié le 03.04.2023
Mime Marceau - 1964 - 07:42 - vidéo
 

L'ANNIVERSAIRE.

Marcel Marceau qui est né le 22 mars 1923 à Strasbourg, aurait eu 100 ans. Il a rendu populaire l'art du mime en France, créant même une école internationale. Très attiré par les arts, le jeune Marcel fréquenta d’abord l’École nationale des Arts décoratifs de Limoges par amour du dessin et de la peinture. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, il débuta d'ailleurs comme peintre. Il va ensuite se tourner vers le théâtre en devenant l’élève de Charles Dullin, de Jean-Louis Barrault et d’Étienne Decroux, l’auteur de la grammaire de l’art du mime, la « statuaire mobile ».

C’est à cette époque que Marcel Marceau se prit de passion pour la pantomime et décida, le jour de ses 24 ans, de créer sa propre compagnie de mime pour transmettre cet art consistant à donner forme aux pensées et aux émotions au travers des gestes simples. Il aimait à déclarer que « la parole n'est pas nécessaire pour exprimer ce qu'on a sur le cœur ».

L'ARCHIVE.

L'archive en tête d'article est un entretien assez exceptionnel, car il se déroule chez le mime Marceau, au milieu de son « musée personnel » dédié à la pantomime, mais aussi parce que l'artiste apparaît le visage démaquillé, quittant pour un instant son personnage fétiche de Bip. Dans ce long entretien accordé au « Journal de Paris », le 17 juillet 1967, Marcel Marceau dévoilait son univers baigné par l'influence de la pantomime dont il racontait les origines, de la Grèce antique à la Comedia Del' carte, en passant par Molière. L'occasion pour lui de décrire les gravures du Matamore, du Capitan et tous ces personnages, tels Scaramouche, Pantalone « qui représentait le bourgeois vénitien », ou encore Puchinella qui donna naissance à Polichinelle ou Petrolino qui deviendrait plus tard Pierrot. « Ils sont les ancêtres du théâtre », précisait-il, ajoutant que même si les costumes avaient changé, ces personnages intemporels, eux, existaient toujours.

Marcel Marceau évoquait ensuite les acrobates, qu'il considérait comme les frères des mimes. « Comme le théâtre. C'est un art du silence en arts plastiques, en arts visuels », expliquait-il. Il abordait ensuite la grande époque, la plus importante à ses yeux, celle de la pantomime française du XVIIᵉ, partant de Gilles Watteau jusqu'au XIXe siècle des Romantiques, issue de la Révolution de 1789.

Le mime évoquait ensuite la figure emblématique du XIXe siècle, Pierrot, qui n'était plus un simple « laquais, une espèce de niais, mais un personnage qui est l'élu du peuple, un personnage qui représente des métiers et qui, par le silence, nous venge des coups de pied qu'on reçoit et qu'on ne peut pas donner parfois. Et puis il est devenu un personnage très populaire, l'ancêtre de Charlot ».

L'artiste abordait ses propres maîtres contemporains, Étienne Decroux, « le rénovateur de la peinture moderne qui crée une grammaire moderne », ou Jean-Louis Barrault, « qui a été un mime remarquable et qui a créé le Pierrot dans le film Les Enfants du paradis. » Lui, avait entrepris de refaire un théâtre de mime en France. En 1969, Marcel Marceau fonda à Paris la première école internationale de mime à Paris. On y dispensera des cours de mime, de danse classique, d'acrobatie et d'art dramatique à des élèves de 18 à 25 ans venus de tous les pays.

Un art poétique

Dans la suite de l'entretien, il racontait l'origine de sa carrière, avec la naissance de son personnage emblématique Bip, un personnage « influencé par Pierrot », reconnaissable à son visage peint en blanc à travers lequel il avait développé toute une série de personnages.

L'entretien se concluait sur sa propre « grammaire de gestes », sur sa manière d'envisager le mime comme « un art poétique qui suscite l'imagination du public, qui crée le mythe, Le mythe, c'est cette recherche constante que nous avons d'agrandir le fait réel et d'en faire une espèce de légende », tout un monde qui rejoignait selon lui le théâtre, qui lui-même sortait de la vie.

« Le vrai visage, c'est le masque »

Dans l'archive ci-dessous, au cours d'une séance de maquillage, Marcel Marceau se transforme en Bip, son personnage fétiche.

Retour du mime Marceau
1978 - 02:55 - vidéo

« Le vrai visage, c'est le masque et le masque, c'est ce qu'il y a dessous. On ne peut pas tricher, au fond tout est vrai. Même si c'est transposé, même si c'est de l'illusion »

Bip, son double silencieux

Marcel Marceau a créé Bip en 1947, et c’est lui qui va le rendre célèbre dans le monde entier. Bip est une sorte de Pierrot lunaire du XXe siècle, à la fois gracile et grave, avec la souplesse d'un chat. Son visage blanc surmonté d’un chapeau haute forme, orné d’une fleur rouge, devient le symbole d’un langage universel et muet : le mime.

L’artiste utilise son corps pour exprimer toutes sortes d’émotions et les partager avec son public. Ses mains se transforment en ailes de papillons, le battement suggérant celui du cœur. Sans un mot, il parvient à montrer que sa fragilité symbolise celle de la vie. L’assistance est généralement subjuguée par tant de délicatesse.

Avec Bip, l’artiste porte l’art du mime au plus haut niveau, son personnage romantique parcourt les cinq continents et séduit tous les publics. Idole au Japon, il devient un dieu vivant aux États-Unis. Il décrit ici ses personnages principaux, les rires des différents publics du monde entier qu'il parvient à faire « entrer dans le monde du silence ».

Pour satisfaire sa large audience, il crée constamment de nouveaux tableaux mimés, notamment le célèbre pas « la marche contre le vent ». Michael Jackson s’en inspirera pour son « Moonwalk ».

En 2000, le mime Marceau annonçait qu’il quittait définitivement la scène, mais il continua à enseigner jusqu’à son décès. Tel le papillon qu'il aimait tant incarner, l'artiste s'est définitivement envolé, sans bruit, le 23 septembre 2007.

MARCEL MARCEAU, MIME FRANCAIS
1953 - 00:53 - vidéo

En 1953, le mime Marceau, alias Bip, interprète deux tableaux classiques de son répertoire : l'escalier et le tireur de cordes

Influencé par les films de Chaplin, Marcel Marceau a choisi de devenir mime. Un temps plus connu à l’étranger, il remplit désormais les salles françaises. Entre deux performances de jeunes artistes dont il est le mentor, le clown muet se transforme en mime après un rapide maquillage sous l’œil de la caméra…

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