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La maison individuelle, un rêve subventionné par l'Etat dans les années 1970

La maison individuelle, un rêve subventionné par l'Etat dans les années 1970

Dans un discours prononcé le 15 octobre, la ministre déléguée au Logement Emmanuelle Wargon a qualifié les maisons individuelles de "non-sens écologique, économique et social". Ces propos ont  suscité la polémique, alors que les Français ne rêvent que de maison et d'espace. 

Par  Florence Dartois - Publié le 18.10.2021
 

Les propos de la ministre du Logement prononcés le 15 octobre dernier ont fait grand bruit. Dans un discours, Emmanuelle Wargon est revenue sur la nécessité de limiter l'extension de l'urbanisation. Dans son discours, la ministre pointait l'extension des zones pavillonnaires, "ce rêve construit pour les Français dans les années 70", ajoutant que "le modèle du pavillon avec jardin n’est pas soutenable et nous mène à une impasse". Des propos mal perçus, à une époque où les Français, traumatisés par la crise du Covid, ne rêvent que d'une chose : une maison individuelle et un jardin ! D'ailleurs, une étude menée par PAP.fr entre mai et septembre 2021 montrait que 68 % des requêtes sur son site portait sur des maisons individuelles, contre 59% en 2019, soit une progression de 11 points.

Vendredi soir, la ministre a fait son mea culpa, regrettant "la caricature faite de ses propos" sur les maisons individuelles et expliquant qu'il n'était pas question d'interdire aux Français de renoncer à se loger mais "de le faire autrement". En respectant un principe : l’intensité "heureuse", c'est-à-dire une "densité d’habitat qui crée des quartiers dynamiques, vivants et chaleureux", couplée à une sobriété foncière et des logements de qualité.

Pas sûr que les Français, qui rêvent de grands espaces et de campagne, aient envie de s'entasser dans des immeubles urbains au coeur d'une densité "heureuse" appelée des voeux de la ministre.

"Le rêve de tout Français est de posséder sa maison particulière"

Ce discours de la ministre s'inscrit dans l'objectif du "zéro artificialisation nette" que les pouvoirs publics, et de nombreuses collectivités intègrent déjà dans les politiques locales. En effet, tous les 10 ans, l'urbanisation et l'artificialisation des sols consomment l’équivalent d’un département français, représentant près de 10 % de la superficie de la France. Cette progression inquiète l'Etat. Ce qui n'était pas le cas au début des années 1970, lorsqu'il encourageait à construire dans la périphérie des villes . A l'époque, la France manquait de logements et de nombreux Français vivaient entassés dans des immeubles vétustes, souvent insalubres, voire dans des bidonvilles en lisière des cités. En pleine période d'essor économique, la France lançait donc un grand plan de construction et d'accession à la propriété porté notamment par le ministre du Logement Albin Chalandon. A l'aide de prêts aidés, d'encadrement des prix du foncier et des constructions, les Français étaient incités à devenir propriétaires de leurs pavillons.

L'objectif de ce grand plan était de permettre l'accession à la propriété à moindre frais, soit en permettant l'achat de l'appartement HLM par son locataire, lorsque l'immeuble était récent, soit en proposant l'acquisition de maisons individuelles sur des lotissements construits en périphérie des centres urbains. L'archive en tête d'article nous présente l'un de ces projets établis à Cholet. Nous sommes le 5 mai 1970 et c'est le grand lancement de "l'Opération 430" qui doit réaliser "le rêve de tout Français de posséder sa maison particulière." Conformément au plan Chalandon, le prix de revient est abordable, tout en conservant un bon niveau de qualité et de services. Ces maisons individuelles sont destinées aux revenus moyens. Entre la présentation des quatre modèles de maisons disponibles, le directeur général du Crédit immobilier de l'Anjou et de la société coopérative d'HLM "Coin de terre et foyer", trace les grandes lignes de cette opération.

Un prix modique d'abord. Pour "430 francs pour la maison, construction seule", l'acheteur peut bénéficier d'excellentes prestations associant, "la qualité de la construction et la qualité architecturale". L'objectif est clairement affiché : "l'accession au pavillon individuel... avec un coin de terre, un jardin et un patio permettant aux familles de s'épanouir dans le milieu familial…" .

La maison individuelle, "c'est une grande amélioration"

La construction en périphérie des villes était alors perçue comme la réalisation d'un idéal français. C'est ce qu'expliquait Albin Chalandon, le ministre du Logement, lors d'une visite dans un lotissement de la banlieue bordelaise en juin 1972.

Entretien avec Albin Chalandon
1972 - 02:06 - vidéo

"Dans l'ensemble, j'ai le sentiment que ces villages correspondent à une forme de vie, qui correspond exactement à ce que souhaitent beaucoup de Français. C'est une grande amélioration, car ils habitaient jusqu'alors dans des grands ensembles HLM, soit dans des immeubles vétustes très mal équipés. Ils se sentent bien là, et même s'il y a des imperfections, c'est quand même pour eux, un peu plus de bonheur. Et nous savons l'importance qu'est le logement dans la vie de chacun". 

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