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Pap Ndiaye en 2008 : «Il y a une condition noire qui s’impose aux personnes considérées comme noires»

Pap Ndiaye en 2008 : «Il y a une condition noire qui s’impose aux personnes considérées comme noires»

Le ministre de l'Éducation nationale Pap Ndiaye est attaqué par la droite et l'extrême droite pour avoir critiqué CNews. L'historien de 57 ans, ancien directeur général du Musée de l'immigration, avait dénoncé par le passé l’invisibilité de la minorité noire dans la société et en politique.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 20.05.2022 - Mis à jour le 13.07.2023
Pap Ndiaye "La condition noire" - 2008 - 02:15 - vidéo
 

Historien spécialiste d'histoire sociale des États-Unis, Pap Ndiaye s’est particulièrement intéressé aux minorités Outre-Atlantique, mais également aux situations minoritaires en France (histoire et sociologie des populations noires). Notamment à travers un essai historique et sociologique paru en 2008 et intitulé La condition noire. Essai sur une minorité française.

Des émeutes en banlieue, à la discrimination à l’entrée d’une discothèque ou dans l’emploi, la minorité noire payait par les discriminations un impôt social, alors que le modèle républicain s’avérait incapable d’y remédier suffisamment. C’est le constat que dressait l’historien en mai 2008, au moment de la parution de son ouvrage. L’archive en tête d’article nous présente son point de vue à l’époque. Interrogé par RFO à l’École des Hautes Études où il enseignait alors, l’historien déclarait qu’il y avait bien « une condition noire qui s’impose aux personnes considérées comme noires, indépendamment de leur volonté. Parfois même à l’encontre de leur volonté ».

Dans son bureau, il soulignait qu’il existait bien selon lui une identité noire sous-jacente, qu’il qualifiait de « fine », car « prescrite », et « imposée par le regard de l’autre », tandis que les identités « épaisses » renvoyaient aux familles, aux filiations, aux langues, aux cultures, notamment pour les migrants récemment installés en France. Enseignant l’histoire des minorités aux États-Unis, il préférait considérer la « logique minoritaire » plutôt que « communautaire ».

Inaction politique

Également membre du Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN), il critiquait la faiblesse de la politique de lutte menée contre les discriminations. Il affirmait que ce qui le gênait, c'était le « décalage entre la parole publique et puis les résultats ». Ce décalage lui paraissait encore trop criant, en « particulier pour les minorités visibles ».

Quelques mois plus tard, en novembre 2008, après l’élection aux États-Unis de Barack Obama, le 20 heures de France 2 s’interrogeait sur la quasi absence de diversité dans la politique française. À l’époque, la députée George Pau-Langevin faisait figure d’exception, seule femme politique « de couleur noire » élue en métropole à siéger dans l'hémicycle.

En France, l'Assemblée nationale et le Sénat ne reproduisaient pas la diversité du pays. Pourtant, dès les années 1960, les députés des « territoires d’Outre-Mer et des colonies » arpentaient déjà les couloirs du Parlement, à l’instar d’Aimé Césaire (1913-2008), Léopold Sédar Senghor (1906-2001) ou Gaston Monnerville (1897-1991), qui fut même président du Sénat durant 20 ans.

Absence de représentativité

Que s’était-il passé ? Interrogé sur cette question, Pap Ndiaye soulignait qu’aux États-Unis, Obama n’était « pas arrivé de nulle part » et qu’il y avait au moins 10 000 élus noirs, « alors qu’en France déplorait-il, « il manque un vivier d’élus municipaux, de maires, de députés, d’où un jour pourra émerger un Obama français ».

La suite de l’enquête à découvrir ci-dessous.

Les minorités dans la vie politique
2008 - 03:19 - vidéo

14 ans après ses constatations, Pap Ndiaye a rejoint le gouvernement d’Élisabeth Borne à l’Éducation nationale. En mars 2021, la prise de fonction du professeur à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à la tête du Musée de l’immigration et l’aquarium tropical de la Porte Dorée (XIIe) avait été perçue comme un geste d’apaisement d’Emmanuel Macron, sur la question des mémoires de la colonisation et des tensions identitaires.

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