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Des boulons et de la rouille : l'histoire de la première restauration du Grand Palais

Des boulons et de la rouille : l'histoire de la première restauration du Grand Palais

Emmanuel Macron a visité le 15 avril le chantier du Grand Palais à Paris. L'édifice, en travaux de réhabilitation depuis 2021, va accueillir les épreuves olympiques et paralympiques d'escrime et de taekwondo. Le bâtiment, construit pour l'Exposition universelle de Paris de 1900, a bien failli disparaitre. En 1993, affichant d'inquiétants signes de vétusté, il avait déjà dû subir une longue restauration.

Par Florence Dartois - Publié le 15.04.2024
La réouverture du Grand Palais - 2005 - 00:00 - vidéo
 

L'ACTU.

Le 15 avril 2024, à J-102 du début des Jeux olympiques qui se tiendront à Paris du 26 juillet au 11 août, Emmanuel Macron a visité le chantier de réhabilitation du Grand Palais. Le site qui est en travaux depuis 2021 va accueillir les épreuves olympiques et paralympiques d'escrime et de taekwondo. La livraison du chantier au comité d'organisation des JO est prévue pour le 19 avril. Le budget des travaux avoisine les 500 millions d'euros. Il porte sur 77 000 m² du bâtiment : les galeries, les extérieurs, la grande nef ainsi que le Palais de la découverte. Mais l'ensemble de la restauration mené par l'architecte en chef des monuments historiques François Chatillon est prévue pour le printemps 2025, avec une réouverture au grand public.

Ce n'est pas la première fois que le Grand Palais se refait une beauté. En effet, entre 1993 et 2006, il avait déjà subi une longue restauration de 13 ans, rythmée d'imbroglios entre la mairie de Paris et le ministère de la Culture. Un « lifting » onéreux qui couta 101,36 millions d'euros et qui fut financé grâce à l'État par l'intermédiaire du ministère de la Culture. Les archives reviennent sur cette rénovation hors norme.

UN PEU D'HISTOIRE.

Le « Grand Palais des Beaux-Arts » a été construit au cœur de la capitale Paris à partir de 1897 en vue de l'Exposition universelle de Paris de 1900. On le doit à plusieurs architectes qu'il avait été impossible de départager et qui se chargèrent chacun d'une partie de l'édifice situé en bordure de Seine, à proximité des Champs-Élysées, face au Petit Palais, dans le 8e arrondissement. Henri Deglane fut notamment chargé des nefs nord et sud de la grande nef (façades et décors) et de sa partie transversale (paddock) et des péristyles situés de part et d'autre, sur la nouvelle « avenue Alexandre-III », actuelle avenue Winston-Churchill). Albert Louvet qui était l'auteur du plan édifia la partie centrale dont le Salon d'honneur et, en coordination avec Deglane, le grand escalier d'honneur et le décor peint et sculpté du mur de fond de la nef transversale. Albert Thomas fut chargé de la construction de l'aile ouest, dite palais d'Antin. Et enfin, Charles Girault fut chargé de la coordination générale des travaux.

La prouesse architecturale saute aux yeux dès l'entrée dans le « vaisseau principal », un vaste espace d'une longueur de 240 mètres, surmonté d'une large verrière. La voûte en berceau, les nefs nord et sud, la nef transversale (paddock), la coupole sur pendentifs et le dôme, le tout composé d'acier, de fer et de verre pèsent environ 8500 tonnes. Le sommet de cet ensemble culmine à une altitude de 45 mètres.

« Monument consacré par la République à la gloire de l’art français », comme l'indique l'inscription gravée sur le fronton de l’aile ouest, la vocation originelle des 77 000 m² du Grand Palais était d'accueillir les grandes manifestations culturelles et artistiques officielles de la capitale. Mais il connut un destin un peu différent.

Histoire du Grand Palais
1966 - 07:25 - vidéo

Reynold Arnould, conservateur des Galeries nationales du Grand Palais et des musées de France évoque les transformations et des travaux menés pour permettre au site de retrouver sa mission première de palais des expositions avant l'organisation d'une grande rétrospective Picasso. 

Durant des décennies, le Grand Palais a donc accueilli une multitude d'événements très éclectiques : des courses hippiques (1927), la reconstitution d'une ferme grandeur nature (1941), sans oublier de multiples salons, comme celui de l'automobile, ou des Arts ménagers, des expositions, jusqu'en novembre 1993, date à laquelle un incident a entraîné sa fermeture puis une rénovation d'envergure. L'archive disponible en tête d'article revient sur l'histoire de l'édifice jusqu'à cette première restauration.

LES ARCHIVES.

À cause d'boulon tombé du haut de la verrière, le Grand Palais avait dû fermer au public pour être rénové. Dans ce sujet de septembre 2005 dans le 20h de France 2, le commentaire expliquait pourquoi cet incident avait été à l'origine de travaux « pharaoniques, mais républicains » qui avaient duré presque 13 ans. Après un résumé de l'histoire du Grand Palais, la parole était donnée à un témoin de ce chantier d'exception : Claude Méton. Ce compagnon-couvreur témoignait avec fierté de l'ouvrage accompli. Il était interrogé sur le toit du Grand Palais dont il connaissait par cœur les 6 000 m² de zinc, ses armatures. À l'époque, 15 000 m² de verrière avaient été changés.

Corrosion et affaissement

Au fil des années, les JT ont largement relayé les différentes phases de la restauration. Le boulon évoqué dans l'archive principale n'était pas le premier à tomber. Le ministre de la Culture, Jacques Toubon, avait été averti dès juin 1993 de la chute d'autres boulons et avait lancé une expertise. Elle concluait à la présence de corrosion dans la superstructure et à des affaissements des fondations côté Seine. Dans l'archive ci-dessous, en date du 22 novembre 1993, le ministre confirmait ces informations et annonçait la fermeture pour des raisons de sécurité.

Le Grand Palais
1993 - 00:00 - vidéo

Le Grand Palais fermait donc ses portes au public (très déçu) pour une période de 18 mois avertissait Jacques Toubon. Les piliers supportant la voute étaient rongés par la rouille qui attaquait aussi la charpente, d'où l'installation temporaire de filets de protection. Certains pointaient le mauvais entretien du bâtiment depuis sa création « contrairement à la tour Eiffel » régulièrement repeinte. Le lieu de construction, trop près du lit de la Seine, était, lui aussi, remis en cause. Le niveau de l'eau avait baissé depuis la construction et provoqué la putréfaction des fondations.

Problèmes de sécurité du Grand Palais
1993 - 00:00 - vidéo

Imbroglio dangereux

Faute de coordination, le site a été fermé plusieurs années. Six années d'abord, pendant lesquelles le ministère de la Culture et la mairie de Paris, en désaccord sur la répartition des responsabilités des travaux, mais aussi sur les montants de la restauration, ont laissé le Grand Palais se dégrader. Des tergiversations évoquées dans l'archive de France 2 à regarder ci-dessous, de mars 1999, avec cette question : « Le Grand Palais a-t-il encore un avenir ? ».

Jamais entretenues et désormais laissées à l'abandon, certaines structures de l'édifice étaient ravagées par l'érosion. On apprend dans le sujet suivant que les milliers de pilotis qui soutenaient la structure et qui se trouvaient immergés dans la Seine étaient « desséchés et donc inefficaces ». Après un nouveau rapport alarmant, la ministre de la Culture, Catherine Trautmann, décidait de réhabiliter le bâtiment sur quatre ans, estimant l'enveloppe nécessaire à un milliard de francs (224 millions d'euros environ). Elle déclarait alors : « Début des travaux le 2e semestre 1999. Il faudra quatre ans pour accomplir l'ensemble des chantiers. Après, on pourra inaugurer le nouveau Grand Palais. »

Polémique Grand Palais
1999 - 02:29 - vidéo

L'année suivante, en 2000, à l'occasion du centenaire de l'Exposition universelle de 1900 et pour mettre un terme à la pression d'investisseurs privés, le bâtiment devenait monument historique. Désormais protégé, il était plus facile de trouver des financements. Les travaux de restauration pouvaient enfin débuter.

Restauration en deux phases

La première phase des travaux débuta par une grande manœuvre : la dépose d'un des quadriges ornant les rotondes de la façade principale du Grand Palais du sculpteur Georges Récipon et très justement nommé « L'harmonie triomphant de la discorde ».

Travaux au Grand Palais
2001 - 01:40 - vidéo

En 2003, les Parisiens pouvaient observer le « squelette d'acier de la structure mis à nu ». Une centaine d'ouvriers s'attelaient désormais à la restauration de la structure d'acier de la verrière. L'archive ci-dessous propose une visite du chantier et des vues incroyables de ces funambules s'activant à 35 mètres au-dessus du sol, en équilibre sur un gigantesque tabouret métallique destiné à surélever la verrière de quelques millimètres pour la soulager des contraintes.

Rénovation Grand Palais
2003 - 00:00 - vidéo

La première tranche des travaux s'achevait avec le retour du quadrige sud-est, lui-même entièrement restauré. Sa structure métallique et sa « peau de cuivre, altérées pendant la Seconde Guerre mondiale par des balles, avaient été rénovées. Les traces de projectiles rebouchées, mais gardées visibles comme témoignage de cette époque. Le moment délicat de la remise en place était filmé par les caméras du 13h de France 2.

En août 2005, alors que l'essentiel de la restauration était achevé, le Grand Palais était prêt à rouvrir. La réouverture était prévue pour les Journées du Patrimoine, et le 20h de France 2 pénétrait en avant-première dans « l'énigmatique enchevêtrement de poutres » fermé depuis près de 13 ans. La charpente de fer allait enfin retrouver sa place avant la dernière tranche de la restauration qui devait concerner la façade extérieure de l'édifice.

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