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L'arrivée tardive et hésitante des médicaments génériques en France

L'arrivée tardive et hésitante des médicaments génériques en France

Biogaran, le leader des médicaments génériques en France, est en vente. L'entreprise avait été créée en 1996, date à laquelle les médicaments génériques obtenaient une définition légale en France.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 18.04.2024
 

1980 : les premiers brevets de médicaments tombaient dans le domaine public en France. Longtemps exclus des systèmes de brevet, les médicaments avaient pu être brevetés à partir d'une ordonnance de 1959. Cela permettait aux laboratoires d'obtenir une protection de 20 ans sur leurs molécules. Les années 1980 sonnaient donc la fin de ces premiers brevets. « Dès lors, tout autre laboratoire est libre de copier ce médicament et d'en assurer la production sous un autre nom. Il s'agira d'un produit générique. »

À cette occasion, le journal télévisé rémois proposait un reportage, disponible en tête de cet article, sur les médicaments génériques. On y apprenait qu'aux États-Unis, ces médicaments sans marque étaient vendus depuis quinze ans déjà.

Pourtant, en France, on s'inquiétait de l'impact de cette nouvelle filière sur la recherche, comme le détallait un directeur de laboratoire pharmaceutique à FR3 Reims. D'une part, certains industriels étaient « tout à fait opposés aux génériques qu'ils considèrent comme nuisibles à l'efficacité de leurs travaux ». Tandis que d'autres considéraient les génériques comme « des stimulants (...) pour faire progresser la science médicale et pharmaceutique. »

Chez les pharmaciens, la frilosité était de mise. « Est-il bon qu'un laboratoire puisse voir son produit copié et vendu moins cher ? », interrogeait l'un d'entre eux. Et d'y voir une opération commerciale du laboratoire français qui produisait des génériques. La baisse des prix pouvait-elle permettre de réduire les coûts de la Sécurité sociale ? Selon notre pharmacien, les prix en France étaient déjà parmi les plus bas d'Europe.

«Ce n'est pas une question de prix, c'est une question de sécurité»

Pouvait-on faire confiance aux médicaments génériques ? Le directeur de laboratoire précisait qu'un bon générique devait être la copie exacte et conforme du produit d'origine. Ce qui n'était pas toujours le cas selon lui.

En 1981, la Commission de la concurrence donnait une première définition du médicament générique : « On entend par médicament générique toute copie d’un médicament original dont la production et la commercialisation sont rendues possibles notamment pas la chute des brevets dans le domaine public, une fois écoulée la période légale de protection. »

La définition ne portait pas encore sur l'aspect technique et qualitatif du générique. Ainsi, en 1982, comme on l'entend ci-dessous, les professionnels de santé se montraient toujours dubitatifs. Depuis 1980 étaient arrivés sur le marché plusieurs génériques : deux antibiotiques, un dilatateur de vaisseau, un médicament contre la douleur et un autre pour le cœur. Selon la molécule, les prix étaient jusqu'à 40 % plus faibles.

Médicaments génériques
1982 - 00:00 - vidéo

Mme Marbot, pharmacienne, s’interrogeait sur la qualité des génériques : « Si une molécule est fabriquée à Taïwan ou ailleurs et que les essais pharmacologiques n'ont pas été faits, on ne sais pas si les molécules auront le même effet. (...) Nous avons fait faire des essais qui abondent dans notre sens, les molécules ne sont pas stables. » Et de conclure : « Ce n'est pas une question de prix, c'est une question de sécurité. Nous sommes responsables des produits que nous vendons. »

Le journaliste précisait néanmoins que les médicaments génériques fabriqués en France étaient « aussi sûrs » que les originaux.

Une définition dans le Code de la Santé

En 1996, les génériques obtenaient finalement une définition dans le Code de la Santé publique, garantissant sa qualité : « Spécialité générique d'une spécialité de référence, celle qui a la même composition qualitative et quantitative en principes actifs, la même forme pharmaceutique et dont la bioéquivalence avec la spécialité de référence est démontrée par des études de biodisponibilité appropriées. »

Ainsi pouvait-on entendre dans l'archive de la même époque ci-dessous, la composition chimique d'un médicament générique « est rigoureusement identique à celle du produit chimique que l'on trouve depuis longtemps en pharmacie, la différence, c'est le prix ».

Au-delà de la qualité des génériques, une analyse du manque d’intérêt pour les génériques en France était donnée : « Ça n'a jamais marché parce que personne n'a joué son rôle dans cette affaire. L'État qui fixe les prix n'a pas incité les gens et les médecins à prescrire des médicaments moins chers, la sécu a laissé filer les prix, les pharmaciens gagnent plus quand les médicaments sont plus chers, le médecin n'a pas d’intérêt à prescrire moins cher. Quant au malade, il est remboursé par sa mutuelle ».

En 1999, les pharmaciens étaient enfin autorisés à substituer des génériques aux médicaments originaux. Auparavant, cela dépendait de l'ordonnance et donc du médecin. Restait à convaincre les patients.

Bilan des médicaments génériques
2002 - 00:00 - vidéo

Sur les médicaments génériques : « Comme c'est moins cher les patients pensent que c'est moins bien »

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