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1993, une brèche dans le droit du sol

1993, une brèche dans le droit du sol

En 1993, la loi Pasqua-Debré, inspirée des idées du Front national, mettait fin à l’automaticité de l’obtention de la nationalité française d’enfants nés en France de parents étrangers. Elle sera abrogée cinq ans plus tard par le gouvernement de Lionel Jospin.

Par Hugo Domenach - Publié le 21.12.2023 - Mis à jour le 12.02.2024
LOI PASQUA - 1993 - 01:25 - vidéo
 

L'ACTU.

Dimanche 11 février, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a annoncé une révision constitutionnelle pour supprimer le droit du sol à Mayotte, confrontée à une grave crise migratoire.

Déjà, la loi immigration votée en décembre 2023 par le Parlement devait imposer à un enfant né en France de parents étranger de faire une demande à sa majorité pour devenir français. Une disposition censurée en janvier par le Conseil constitutionnel.

L'ARCHIVE.

Trente ans auparavant, la vieille tradition française du droit du sol avait déjà connu une brèche. En 1993, la loi Pasqua-Debré mettait fin au caractère automatique de l’obtention de la nationalité française pour un enfant né en France de parents étrangers. À partir de son application, il devenait obligatoire d’en faire la demande explicite entre 16 et ses 21 ans.

Cette mesure intervient, à l’époque, sous l’influence croissante du Front national, avec l’idée de plus en plus partagée à droite qu’il faudra l’appui de ses électeurs pour enfin renverser la gauche. Car en 1988, l’élection emportée par François Mitterrand pour la deuxième fois consécutive confirme la première véritable percée du parti de Jean-Marie Le Pen qui obtient 14,39 % des voix au premier tour. Un réservoir sur lequel lorgne les gouvernements de cohabitation Chirac et Balladur qui font alors de l'immigration un de leurs principaux chevaux de bataille. Le ministre de l’Intérieur est tout trouvé pour mener une politique plus répressive : Charles Pasqua.

Objectif « immigration zéro »

Déjà en 1988, la première loi Pasqua rétablit les reconduites administratives à la frontière et limite l'accès à la carte de résident. En prévision d’une future réforme du code de la nationalité, Jacques Chirac convoque en 1987 une « commission de sages » présidée par Marceau Long. Elle prévoyait une close selon laquelle les enfants nés en France de parents étrangers devaient faire une demande de naturalisation entre 16 et 21 ans auprès d’un juge. Le Conseil constitutionnel refuse alors cette dernière mesure.

Ce n’est qu’en 1993, lors de la deuxième cohabitation du second mandat de Mitterrand, que les travaux de la commission aboutissent à la réforme du code de la nationalité française ainsi qu’à une loi sur le durcissement des conditions d’acquisition de la carte de séjour. La loi rend plus difficile les démarches de régularisation et ressuscite la close supprimée de la loi de 1986 sur le droit du sol. Objectif affiché : « immigration zéro ».

Lorsque la gauche remporte les législatives de 1997 suite à la dissolution de l’Assemblée nationale par Jacques Chirac, Lionel Jospin devient premier ministre de cohabitation. Dans son discours de politique générale, il annonce son intention de rétablir le droit du sol dans son entièreté : « La France vieux pays d’intégration républicaine s’est construite par sédimentation, creuset donnant naissance à un alliage d’autant plus fort que ses composantes étaient diverses. C’est pourquoi le droit du sol est consubstantiel à la nation française. Nous le rétablirons », promet-il à l’Assemblée nationale.

Jospin demande alors à Patrick Weil, chercheur au CNRS, de prendre la tête d’un groupe de travail pour étudier les pistes de réforme du droit de l’immigration. Rendu le 31 juillet 1997 le rapport Weil propose une centaine de mesures qui formeront la base du projet de loi Chevènement. Il n'abroge pas les lois Debré et Pasqua, promesse pourtant contenue dans le programme électoral socialiste en 1997, mais se contente de les assouplir. Une approche qui n’est pas sans rappeler le « en même temps » d'Emmanuel Macron. « Nous remplacerons les lois Pasqua par une législation nouvelle tout à la fois rigoureuse dans la maîtrise de l’accueil des étrangers et respectueuse des droits fondamentaux », expliquait Jospin pour défendre sa loi face aux attaques de la droite mais également d’une partie de sa majorité.

Réactions au projet de loi immigration
1997 - 02:06 - vidéo

C’est la loi réformant le code de la nationalité, proposée par la garde des Sceaux Élisabeth Guigou, votée le 4 mars 1998, qui supprimera l'obligation pour les enfants d'étrangers nés en France de manifester leur volonté de devenir français : ils le deviennent de nouveau automatiquement à l'âge de 18 ans, à 16 ans s'ils en font la demande, voire à 13 ans à la demande de leurs parents.

Vote projet de loi nationalité
1997 - 02:07 - vidéo

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