Alain Krivine en 1973 et l'organisation révolutionnaire pour la lutte anti-capitaliste

Alain Krivine, figure de l’extrême gauche française, est mort samedi 12 mars à l’âge de 80 ans. Fondateur en 1966, à l’âge de 25 ans, de la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR), une organisation trotskiste, Alain Krivine va prendre une part active au mouvement de Mai 68, aux côtés de Daniel Cohen-Bendit, Jacques Sauvageot et Alain Geismar. Alors que le pouvoir gaulliste, d’abord ébranlé par la contestation étudiante, reprend la situation dès la fin du mois de mai, la JCR est dissoute le 12 juin et Alain Krivine est incarcéré cinq semaines. Alors qu’il fait son service militaire, il apprend que la nouvelle Ligue communiste (LC), qui deviendra la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) en 1974, l’a désigné candidat à l’élection présidentielle de 1969. Une élection qui lui permet d’afficher son programme, celui de mettre à bas la société capitaliste. Il ne recueille que 1,06 % des suffrages, tandis que le candidat communiste Jacques Duclos arrive en troisième position au premier tour avec 21,27% des voix.

Le 17 janvier 1973, le journal de 13h de l’ORTF consacre un portrait aux débuts politiques d’Alain Krivine. En ce début des années 1970, selon le reportage, « la Ligue se fait entendre dans de grandes manifestations, notamment lors du centenaire de la commune et lors des obsèques d’Overnay », ce militant ouvrier maoïste, tué le 25 février 1972 par un vigile de Renault ; pour Alain Krivine, ces manifestations sont le moyen de réaffirmer la « confiance des travailleurs les plus combatifs » dans le combat révolutionnaire, alors que l’extrême gauche paraît divisée en plusieurs courants et partis – pour l’élection présidentielle de 1974, l’extrême gauche se présente divisée, avec les candidatures d’Alain Krivine pour la LCR et d’Arlette Laguiller pour Lutte ouvrière (LO).

Divisions avec les communistes

Au cours de ce portrait, Alain Krivine règle ses comptes avec le parti communiste, dont il peut partager les objectifs à long terme – l’avènement du véritable socialisme, le pouvoir aux travailleurs – mais dont les moyens pour la conquête du pouvoir diffèrent radicalement. Tandis que l’extrême gauche trotskiste prône la révolution, le parti communiste est installé dans la logique du système parlementaire. Surtout, la situation internationale, avec un parti communiste français qui choisit de suivre la ligne du parti communiste soviétique, renforce encore les divisions entre communistes français et révolutionnaires d’extrême gauche, tentés par les expériences dissidentes, comme celles promues par la Chine maoïste, même si Alain Krivine ne se revendique pas maoïste, mais trotskiste : « Pour nous, n’est pas communiste celui qui a acheté sa carte du parti communiste français […] vu ce qu’il s’est passé, vu l’évolution du parti communiste et de l’ensemble du mouvement communiste international, nous pensons qu’est anti-communiste celui qui s’oppose à la victoire du socialisme dans un pays déterminé et à l’échelle mondiale ».

Candidat à l’élection présidentielle de 1974, ne récoltant que 0,37% des voix, Alain Krivine va occuper son premier mandat électif en 1999 en étant élu député européen sur une liste commune avec Force ouvrière. En 2001, en vue de l’élection présidentielle de 2002, c’est à un nouveau jeune militant, Olivier Besancenot, qu’Alain Krivine confie le soin de représenter le parti, une mission que le jeune postier honore avec un résultat exceptionnel de 4,25% des voix. En 2009, la LCR se dissout pour laisser la place au Nouveau parti capitaliste (NPA).