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Déclaration de Michel Debré sur l'Algérie à l'Assemblée nationale

Déclaration de Michel Debré sur l'Algérie à l'Assemblée nationale

JT nuit - 13.10.1959 - 15:46 - vidéo

Michel DEBRE, Premier Ministre, faisant une déclaration sur l'Algérie au micro de l'Assemblée Nationale. [le discours intervient après le discours du général de GAULLE sur l'autodétermination des Algériens du 16.9.1959] : "j'en arrive, Mesdames et Messieurs à l'Algérie, le 16 septembre dernier le président de la République a fait une déclaration décisive, le sens profond de cette déclaration est clair, le général de GAULLE a proclamé la volonté de la France de sortir du cycle de la violence où l'Algérie est enfermée pour entrer dans le règne du droit, depuis 1954 en effet, l'Algérie est enfermée dans le cycle de la violence, au début de 1956 pour endiguer le flot de la subversion un effort militaire exceptionnel a été décidé, l'histoire dira que cet effort a, pour notre patrie et pour la liberté, sauvegardé l'essentiel, depuis le retour du général de GAULLE la pacification a pris un tour nouveau, en même temps que jour après jour, une armée composée de jeunes du contingent et de soldats musulmans en nombre grandissant reprenait, continuait, poursuivait la pacification en portant l'action dans les terrains les plus difficiles et jusqu'alors abandonnés le pouvoir politique prenait les mesures indispensables, il avait désormais la force suffisante pour les transposer immédiatement dans les faits, accession des musulmans à la totalité des droits politiques fondamentaux, réorganisation administrative, élections de parlementaires et de municipalités, investissements sans précédent, effort continu de progrès social allant jusqu'à la transformation de la condition juridique de la femme musulmane, la France en bonne voie de redressement, la France en bonne voie de reprendre sa force dans un monde difficile se doit de faire en sorte que cesse le cycle infernal de la violence, elle doit créer le changement, changement nécessaire pour l'Algérie, changement nécessaire pour la France toute entière et disons le aussi, pour la liberté cette ouverture hors de la tragédie comment peut elle se faire ? il n'est qu'un chemin et c'est la valeur éminente du président de la République que d'avoir ouvert ce chemin, le retour au droit, comment peut se faire ce retour au droit et qu'est ce que le droit, le retour au droit ce n'est pas et ce ne peut pas être la reconnaissance d'une prétendue souveraineté algérienne, il n'y a pas de souveraineté algérienne, il n'y en n'a jamais eu, le retour au droit ce n'est pas davantage, ce ne peut pas être davantage une négociation politique avec les dirigeants de la rébellion, les hommes qui se sont placé à la tête des éléments rebelles n'ont reçu aucun mandat et le terrorisme n'a jamais donné de titre juridique, pas plus que n'en donne l'appel à l'étranger ou l'obéissance à des gouvernements étrangers ne donne de véritable mandat que l'élection, seuls ceux qui détiennent leur titre d'un vote libre peuvent prétendre parler politique au nom de leurs commettants, si le droit n'est pas, si le droit ne peut pas être la reconnaissance d'une souveraineté qui n'existe pas, s'il n'est pas, s'il ne peut pas être la négociation politique, où est il ? le droit est dans ce qui fait la légitimité de toute politique fondée sur le respect de la liberté humaine, il est dans le choix des individus, c'est ce qu'on nomme l'autodétermination, l'idée que recouvre ce mot, la France l'a accepté du jour où il a été entendu que les principes démocratiques seraient appliqués sans condition en Algérie par la régularité d'élections libres, législatives, municipales, le principe du choix était édicté et sans que cela fût dit expressément l'instrument était donné aux Algériens pour statuer sur leur avenir selon les lois éminentes de la liberté, nul en France ni dans le monde entier ne s'y est trompé, la déclaration du 16 septembre donne à l'Algérie la seule chance de quitter le cycle de la violence pour entrer dans le domaine du droit, le vrai droit, le seul droit, celui de la liberté, à ces droits fondamentaux de la Nation s'ajoutent les droits fondamentaux des citoyens français, aucune règle politique contraire à leur intérêt, aucune règle politique contraire à leur honneur ne peut être imposée aux hommes et aux territoires qui se veulent français ou qui se veulent avec la France des hommes et des territoires libres, aussi important que le respect des limites légitimes apparaît l'indication des obligations auxquelles la France doit satisfaire pour assurer le succès du droit où est le succès du droit ? il est dans le refus de la sécession car la sécession en entraînant les Algériens vers la dictature, l'arbitraire et le racisme serait la négation du droit, s'il appartient aux Algériens de faire eux mêmes ce choix la France et le gouvernement ont le devoir de prouver à tous, je veux dire aux Algériens des diverses communautés, pourquoi le maintien de leur union avec la métropole est la condition première d'un libre et grand avenir pour tous...vous m'avez souvent entendu parler de légitimité, si la souveraineté française en Algérie est la règle juridique la loi politique dont le respect est tout aussi nécessaire car elle est la clef de tout, la loi politique dis je est la légitimité, une autorité n'est vraiment une autorité légale que pour autant qu'elle est acceptée et même désirée, la légitimité française en Algérie plonge ses racines dans un passé où le travail des soldats, des administrateurs, des colons, des instituteurs, des médecins a renouvelé cette terre, en s'associant au labeur de ces habitants et en le multipliant, en ajoutant aux moeurs traditionnelles la création d'une société nouvelle unique au monde par sa diversité mais une légitimité ne peut se contenter des titres passés, elle ne peut se contenter même des titres présents, elle doit sans cesse se justifier par la valeur de ce qu'elle représente, la France ne s'impose pas à l'Algérie, elle se fait aimer en Algérie par la qualité irremplaçable de l'effort économique, administratif, social, culturel, politique qu'avec votre accord, le gouvernement ne cessera de développer, si nous savons faire face de mieux en mieux à ces obligations impérieuses il n'y a pas de doute quant au choix final, le retour de la France à l'affirmation du droit, le fait par la France de satisfaire aux obligations que ce retour lui impose c'est en vérité l'assurance qu'il n'y aura pas de scission car les hommes et les terres des deux rives de la Méditerranée ont une vocation fondamentale à l'union et leur séparation serait contraire aussi bien à la nature des choses qu'aux exigences humaines mais la consultation des Algériens suppose que la paix ait succédé au combat, c'est pourquoi l'effort de pacification ne se ralentira pas, le plan établi à la fin de l'année 1958 et qui se poursuit avec succès sera mené jusqu'à son terme, comme le j'ai dit au début de cette déclaration le budget pour l'année 1960 comporte pour toute l'année le maintien des effectifs à leur chiffre le plus élevé et nous avons fait volontairement, réserve faite de la modernisation de notre puissance militaire, un choix en ce qui concerne les dépenses militaires en faveur d'une priorité absolue et sans condition pour la pacification, c'est pourquoi nous ne pouvons pas prendre d'autre position que celle que j'ai également précisé tout à l'heure en évoquant les conversations avec nos alliés, il n'est pas possible que les gouvernements des Etats avec lesquels nous sommes associés ne comprennent pas que notre amitié est liée au soutien donné sans arrière pensées à une politique qui n'est pas seulement une politique nationale mais qui est la seule politique de la paix et du droit mais faut il attendre la fin des combats pour la pacification ? notre force est suffisante, notre volonté assez claire pour que nous puissions proclamer l'inanité des combats, dès le mois d'octobre 1958 le général de GAULLE alors chef du gouvernement avait précisé les conditions d'un cessez le feu, cette offre est permanente, elle a été renouvelée dans des termes qui ne peuvent prêter à confusion, conformément à cet engagement les instructions nécessaires ont été données par le gouvernement de la République pour que puisse être discuté à tout moment et selon ce qui a été dit, des modalités d'un cessez le feu avec tout ce qu'il doit comporter pour un abandon réel de la violence, la garantie qui serait donnée à cette occasion aux représentants des combattants rebelles leur assurerait en cas d'insuccès l'entière possibilité du retour, à ce moment d'ailleurs le gouvernement précisera les garanties que chacun obtiendra pour l'exercice futur de la liberté mais il n'est pas d'autre domaine à la discussion, sortir de ce cadre indispensable mais étroit serait préjuger de l'essentiel, c'est à dire de la décision des citoyens, la récente déclaration du président de la République n'est pas une base de discussion, elle n'est pas un thème de négociation, elle est l'affirmation d'une politique, elle est la détermination d'un plan, la politique et le plan de la France, nous savons quel drame ce serait si jamais l'Algérie se séparait de la France, nous savons que le maintien de la plus étroite union est une nécessité pour les citoyens de la métropole comme elle est une nécessité pour les citoyens européens, musulmans ou juifs de l'Algérie, nous le savons, nous le voulons et nous ne cesserons pas de le vouloir et de le marquer, pour atteindre ce but tout en pacifiant sur place et en ne cessant pas de le faire, nous nous devons à nous mêmes de nous donner la seule chance qui puisse en fin de compte nous assurer de la vraie victoire, il nous faut pour cela, une fois de plus, prendre l'offensive sur le terrain où les démocraties gagnent les batailles, le terrain de la liberté, la liberté n'est pas le laissez faire, elle n'est pas l'abandon des esprits ni des âmes à tous les courants de pensée, à tous les courants de masse, à tous les flux et reflux économiques, la liberté doit être, pour le gouvernement, pour le parlement, pour l'administration, pour l'armée une préoccupation constante et un effort de tous les instants même, comme c'est le cas, quand il est difficile ou coûteux, c'est la mission de la France de demeurer en Algérie avec tous les habitants de l'Algérie mais y demeurer suppose qu'après avoir montré que nous étions en mesure de répliquer à la violence et de la vaincre nous apparaissions en outre et très clairement comme les serviteurs de la paix par la liberté, alors pour maintenir l'union la campagne à laquelle s'attacheront tous ceux qui croient en la mission et dans les droits de la France et qui lui feront confiance prendra son véritable sens et sera quasi unanimement accepté, depuis la déclaration du 16 septembre nul ne peut avoir de doute, ni chez nous, ni dans les rangs de la rébellion, ni même à l'étranger la France est la force mais elle est la justice, c'est une double raison qu'elle a de ne pas craindre la liberté"

Producteur / co-producteur Radiodiffusion Télévision Française
Générique Participant : Michel Debré
Histoire et conflits
Politique

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