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Une famille d'heureux « Robinsons » dans les Vosges : « Ce qui nous guide, c'est qu'on se sent bien ici »

Une famille d'heureux « Robinsons » dans les Vosges : « Ce qui nous guide, c'est qu'on se sent bien ici »

S'installer à la campagne, cultiver son potager, produire son électricité, recycler ses déchets, bref, vivre en autonomie. Ce concept bien actuel est en réalité une aspiration ancienne de nombreux citadins. En 1976, une famille des Vosges l'avait déjà adopté avec succès. Un reportage tendre et optimiste qui propose une jolie manière d'envisager la vie. Et si le bonheur était vraiment dans le pré ?

Par Florence Dartois - Publié le 02.03.2023
Les Robinsons de Thuillières - 1976 - 12:59 - vidéo
 

LE CONTEXTE.

Quitter la ville pour la campagne, mener une vie simple au contact de la nature, sans transports en commun, sans horaires, sans consommation excessive ou loyer à payer. Un rêve que beaucoup de Français aimeraient réaliser en ces temps de récession, de pénurie et de fins de mois difficiles. Ce rêve peut devenir réalité, certains l'avaient déjà réalisé, il y a bien des décennies, dans les années 1970, à une époque où la société de consommation imposait déjà ses diktats.

L'ARCHIVE.

L'archive en tête d'article est un joli reportage de Jean-Loup Coinus, diffusé sur FR3 Nancy en décembre 1976. Il présentait, dans la longueur, la vie d'une famille de « Robinsons », installée dans les Vosges, en lisière de forêt, dans les environs de Thuillières.

Claude, Dominique et leurs trois enfants vivaient très simplement, depuis trois ans, dans une jolie maison en bois construite par leurs soins dans une forme atypique, comme une toupie. La construction de leur maison, le mode de vie qu'ils avaient choisi, leur situation économique posaient la question du « sens de la vraie vie ».

Une maison en bois

La maison était en bois, un choix évident pour le père de famille. « Pour nous, il fallait surtout faire une maison rapidement. (...) Alors on a cherché un terrain nu et on a fait les plans d'une maison qui pouvait être construite en un mois (...). On a essayé de mettre en œuvre des techniques douces pour le chauffage, mais c'était surtout une mise en œuvre rapide. Alors, on a retenu le bois, parce que le bois, ça nous paraissait assez facile à travailler », expliquait-il.

Si les murs étaient obliques, c'était pour éviter les soucis d'infiltration, ajoutait-il. Ses fenêtres, « placées à 45° » leur permettaient d'avoir « une surface d'ensoleillement maximale », les dispensant de panneaux solaires. Claude faisait le tour de sa maison divisée en deux parties équivalentes, un coin « vie commune » et un coin pour les chambres.

Une quête de liberté

La maison était entièrement chauffée par une grande cheminée. Un comble pour cet ancien poseur de chauffage central qui avait remis en question tout son mode de vie pour concilier son quotidien à son désir de liberté. Un concept essentiel qui avait motivé sa transformation : « Je trouvais tout à fait absurde de participer à la construction, par exemple, de HLM. Nous, on habitait en HLM, on savait ce que c'était. Je me rendais compte qu'on ne pouvait pas innover, faire autre chose au point de vue habitat. Et ça m'embêterait de construire quelque chose, des logements qui, en fait, n'étaient pas adaptés aux hommes, ne permettait pas de les libérer. Et pour pouvoir innover, essayer de construire autre chose, eh bien, les structures économiques ne nous le permettaient pas. »

Dans son potager, Dominique ne regrettait pas sa précédente vie de femme au foyer destinée à élever ses enfants seule pendant que son mari travaillait à l’extérieur. Dans leur nouvelle maison, le couple partageait les tâches quotidiennes, « à deux, c'est quand même plus facile », reconnaissait-elle. Entourée de leurs chat et chien, de poules, de chèvres et d'un âne, la famille vivait en quasi-autonomie tout en gardant du temps pour rester disponible. « Il n'y a rien de programmé, on n'est pas à la minute ! », ajoutait Claude.

Dans la suite du reportage, Claude expliquait comment il se procurait de l'eau. Grâce à des baguettes de sourcier, il avait pu trouver puis se connecter à une source et creuser des puits qui alimentaient la maison, mais fournissaient également de l'eau aux animaux et au potager. Son immense jardin ne lui permettait pas de vivre complètement en autonomie, il pratiquait des échanges, offrant ses services de relieur. Mais ses maigres ressources le privaient du statut d'artisan, de Sécurité sociale et d'allocations familiales.

Des enfants heureux

La question de l'éducation était aussi essentielle pour ces parents attentifs. « Il faut leur donner une voie. Il ne faut pas les guider. Si tu arrives à les éveiller sur ce qui les entoure, le chemin se fera tout seul. Le gosse, il n'a pas besoin d'une éducation sévère. Si tu arrives à l'éveiller suffisamment, ben après, c'est lui qui se fait son chemin tout seul. Mais, c'est à toi de lui donner quand même la voie principale », précisait Dominique. Elle racontait ensuite la naissance du petit dernier, Frédéric, né à la maison. « On voulait qu'il ait une naissance sans violence, c'est-à-dire naître dans le calme (...) c'est ce qui s'est passé et on est très heureux », concluait-elle en berçant son bébé.

Leur mode de vie original n'était pas sujet au débat. Pour Claude, la question ne se posait pas, chacun devait, selon lui, « sentir ce qui lui convient et faire tout pour tendre vers son propre bonheur. Ce qu'on a fait là ce n'est pas LA solution. Pour nous, c'est notre mode de vie en ce moment. On ne sait pas comment ça peut évoluer. »

Se sentir bien dans l'instant

Le reportage donnait la parole aux voisins, considérant leur manière de vivre comme « bizarre » ou l'admirant, comme cet électro-mécanicien épaté par l'éolienne impeccablement installée, qui alimentait la maison en électricité.

La conclusion, Claude la livrait avec sa simplicité habituelle, reconnaissant qu'il n'y avait pas de solution miracle : « ce qui nous guide dans notre ligne de conduite pour le moment, c'est qu'on se sent bien ici, le jour où on ne se sentira plus bien, on n'est pas masos, on essaiera d'autres choses. »

La vie des enfants de néo-ruraux dans les années 1970

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