Figure de la scène littéraire française et du Tout-Paris depuis plus de 50 ans, l'écrivain Philippe Sollers est mort vendredi 5 mai 2023 à l'âge de 86 ans.
Auteur de plus de 80 romans, essais et monographies, directeur de revues et habitué des plateaux de télé, Philippe Sollers avait atteint la notoriété avec son roman Femmes en 1983.
On le retrouve en 2009 dans l'archive en tête de cet article dans l'émission Thé ou café répondant à une interview dos-à-dos avec Catherine Ceylac. Il confessait penser être «un imbécile heureux».
Prix Médicis en 1961
Né le 28 novembre 1936 à Talence (Gironde) dans une famille d'industriels, gaullistes de gauche et catholiques, Philippe Sollers avait abandonné ses études pour se consacrer à la littérature, troquant son patronyme de Joyaux pour celui de Sollers, du latin «sollus» et «ars» («tout entier art») et publiant son premier roman, Une curieuse solitude, à 22 ans, salué par Aragon. «Le destin d'écrire est devant lui, comme une admirable prairie», écrit le poète dans les Lettres françaises. Trois ans plus tard, en 1961, son deuxième roman, Le Parc reçoit le prix Médicis.
Au printemps 1960, il fonde, avec notamment Jean-Edern Hallier, la revue littéraire Tel Quel. En épigraphe, celle-ci reprend une formule de Nietzsche : «Je veux le monde et le veux tel quel, et le veux encore, le veux éternellement». La revue entend mettre en avant toutes les formes d'avant-garde, dont littéraires. Elle prête ses colonnes à des écrivains comme Michel Butor, Nathalie Sarraute ou encore Alain Robbe-Grillet, avant de s'ouvrir à la sémiologie et défendre Roland Barthes. Tel Quel publiera également Michel Foucault, Jacques Derrida. Au début des années 1970, la revue prend fait et cause pour le maoïsme chinois. En 1974, une délégation composée notamment de Philippe Sollers et Roland Barthes se rend en Chine à l'invitation du pouvoir. Cet aveuglement vis-à-vis du régime autoritaire chinois vaudra à l'écrivain les sarcasmes du sinologue Simon Leys.
Signe de sa fascination pour la Chine, tous ses livres contiennent des références à ce pays.
Double vie
En 1982, il fonde une nouvelle revue, L'Infini. Il quitte également les éditions du Seuil pour Gallimard, où il devient membre du comité de lecture et directeur de collection. À ce titre, il refusa le roman d'Amélie Nothomb Hygiène de l'assassin, finalement publié chez Albin Michel.
Marié depuis 1967 à la psychanalyste Julia Kristeva, avec qui il a eu un fils David, il voua un «amour fou» à l'écrivaine belge Dominique Rolin, de 23 ans son aînée. Leur correspondance sur un demi-siècle a été publiée en 2017 et 2018. Lui avait dévoilé sa double vie amoureuse en 2013.
Eloge de Philippe Sollers par Dominique Rolin
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Pour ses détracteurs, Sollers était «futile», «mondain», et «ennuyeux». À la question, si vous deviez mourir demain, que resterait-il de vous ?, il répliquait : «Une caisse de livres.»