Pour le réveillon de fin d'année 1974, les Parisiens allaient au restaurant, au théâtre ou au cinéma. Ou plébiscitaient les petits plats, boudins blancs et autres coquilles Saint-Jacques de la boutique Fauchon de la Madeleine, qui ne désemplissait pas, comme le montre ce reportage diffusé dans le 20h00 du JT de TF1 le 1er janvier 1975.
Inquiets ou pas, les Français avaient bien l'intention de consommer et cette année-là Fauchon sortait gagnant de la crise.
Le journaliste s'étonne : «Pourquoi cette frénésie dans les achats ? Pourquoi cette ruée vers les boutiques ? Alors que partout on parle de crise et même de restriction.» Il décide de poser la question à l'économiste Alfred Sauvy, également sociologue et démographe, il a sans doute les clés de compréhension de cette fièvre acheteuse et de cette frénésie de consommation.
L'économiste alors âgé de 76 ans explique que «plus les hommes ont été malheureux dans l'histoire, plus ils ont eu besoin de périodes comme cela, de changement. Le pauvre paysan d'autrefois avait des périodes de ripailles dont il avait besoin pour changer son train de vie extrêmement dur et il saisissait les occasions, les mariages, etc. Donc, la fin d'année est précisément une occasion et il n'y a pas de raison, parce qu'il y aurait la crise, pour se priver considérablement. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, pendant l'ensemble de la crise de 1929, la consommation des Français n'a pas diminué. Ils ont diminué leurs investissements, la création et la construction de logements, tout cela mais les Français ont continué à consommer, parce qu'ils avaient besoin de consommer, parce que c'était une nécessité. J'ai déjà un triste privilège, celui de me rappeler l'époque 1915-1916, qui date déjà de soixante ans. Eh bien, les Allemands étaient à 100 kilomètres de Paris. Ils pouvaient en une percée du front de tranchées, arriver à Paris en deux jours, en trois jours. Et jamais les théâtres, les music-halls n'ont été plus pleins».
«Est-ce que tout le monde était égal devant ce défoulement, devant ce bonheur» ? lui demande le journaliste. «Non, répond-il, c'est que quand nous voyons les gens réveillonner ou quand nous allons aux sports d'hiver, nous ne voyons tout de même que les favorisés, ceux qui sont vraiment très défavorisés, ceux-là rentrent dans le rang. Chez eux, à manger quelques poireaux, mais là, nous ne les voyons pas» !
L'économiste alors âgé de 76 ans explique que "plus les hommes ont été malheureux dans l'histoire, plus ils ont eu besoin de périodes comme cela, de changement. Le pauvre paysan d'autrefois avait des périodes de ripailles dont il avait besoin pour changer son train de vie extrêmement dur et il saisissait les occasions, les mariages, etc. Donc, la fin d'année est précisément une occasion et il n'y a pas de raison, parce qu'il y aurait la crise, pour se priver considérablement. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, pendant l'ensemble de la crise de 1929, la consommation des Français n'a pas diminué. Ils ont diminué leurs investissements, la création et la construction de logements, tout cela mais les Français ont continué à consommer, parce qu'ils avaient besoin de consommer, parce que c'était une nécessité. J'ai déjà un triste privilège, celui de me rappeler l'époque 1915-1916, qui date déjà de soixante ans. Eh bien, les Allemands étaient à 100 kilomètres de Paris. Ils pouvaient en une percée du front de tranchées, arriver à Paris en deux jours, en trois jours. Et jamais les théâtres, les music-halls n'ont été plus pleins".
"Est-ce que tout le monde était égal devant ce défoulement, devant ce bonheur" ? lui demande le journaliste.
"Non, c'est que quand nous voyons les gens réveillonner ou quand nous allons aux sports d'hiver, nous ne voyons tout de même que les favorisés, ceux qui sont vraiment très défavorisés, ceux-là rentrent dans le rang. Chez eux, à manger quelques poireaux, mais là, nous ne les voyons pas" !
Fauchon avait été placé en redressement judiciaire en juin 2020. La fermeture de deux de ses magasins va entraîner 77 licenciements.