Alors que le Parlement européen a voté la PAC pour 2023-2027, le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie, ainsi que le secrétaire d’État chargé des Retraites et de la Santé au travail, Laurent Pietraszewski ont présenté mardi une feuille de route pour enrayer les suicides chez les agriculteurs.
En effet, selon les données les plus récentes de la sécurité sociale agricole (MSA), les agriculteurs se suicident plus que le reste de la population. A titre d'exemple, chez les assurés de la MSA âgés de 15 à 64 ans, le risque de suicide était alors supérieur de 43,2 % aux assurés de l’ensemble des régimes de sécurité sociale. Le risque de suicide s'accroît encore après 65 ans où il est deux fois plus élevé par rapport à la population de cette tranche d’âge. Dettes, isolement, privation, paupérisation… Autant de facteurs qui poussent un agriculteur à se suicider tous les deux jours.
Accompagnement psychologique et financier
Parmi les mesures annoncées ce mardi : le déploiement de "sentinelles" : "Il s'agit d'identifier les signaux faibles. Un agriculteur qui n'ouvre plus les courriers qu'on lui adresse par exemple, parce qu'il se dit que ça doit être une demande de recouvrement", a précisé le ministre. Ces sentinelles ce seront tous les intervenants travaillant avec, ou côtoyant les agriculteurs au sens large : voisins, les chambres d'agriculture, les associations, les élus locaux, voire le banquier. Ces personnes seront intégrées dans des "comités de pilotage" mis en place dans chaque département courant 2022.
Le plan prévoit aussi de renforcer financièrement des dispositifs existant permettant de soulager les agriculteurs, telle l’"aide au répit" (qui finance le remplacement jusqu’à 10 jours des exploitants en situation d’épuisement professionnel) et le crédit d’impôt remplacement. Au total, l’enveloppe dédiée au mal-être agricole doit passer de 30 à 42 millions d’euros par an.
Une mutation difficile
Mais le malaise des agriculteurs n'est pas récent, c’est le résultat de plusieurs décennies de mutations dans le monde agricole. Les exploitants ont eu bien du mal à faire face à ces bouleversements, surtout les plus petits. Le montage en tête d'article décrit cette pression subie par les paysans, depuis la mécanisation qui les a forcés à s'endetter, jusqu'à l'augmentation de la productivité impliquée par l'entrée dans l'Union européenne. A ces pressions, s'est ajoutée celle de la grande distribution en quête de prix toujours plus bas. Au fil des décennies, il a fallu composer avec l'essor du marché mondialisé et la concurrence renforçant la paupérisation de cette profession. La précarité s'est encore accrue avec l'augmentation des intempéries.
En un peu plus d’un demi-siècle, la France paysanne a changé de visage. Plus compétitive, plus mécanisée, moins prégnante dans l’économie du pays. En 1955, la France comptait plus de 2 millions d’exploitations agricoles… en 60 ans, leur nombre a été divisé par cinq.