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Le jazz au cinéma, un mariage d'amour

Le jazz au cinéma, un mariage d'amour

À peu de choses près, jazz et cinéma ont le même âge. Le premier film parlant s'intitulait même « Le Chanteur de jazz ». Découverte en archives d'une liaison aussi passionnelle que fusionnelle.

Par Florence Dartois - Publié le 25.05.2022
 

Le jazz et le cinéma, c'est une histoire d'amour qui ne date pas d'hier. Ces deux arts sont nés quasiment en même temps au début du XXe siècle. En s'épanouissant aux Etats-Unis dans les années 1930, ils ont suscité autant de fascination que de réserves, frôlant parfois le mépris. Les musiciens de jazz noirs accompagnaient les projections des films muets dans les salles réservés au blancs, mais le cinéma parlant a tout changé.

En 1927, dans Le Chanteur de Jazz, un film d’Alan Crosland, les spectateurs découvrent l’acteur Al Jolson qui entonne cinq chansons jazzy. C’est le premier film musical de l’histoire du cinéma. Pourtant, il faut attendre l’après-guerre et l’apparition des documentaires pour que la rencontre se concrétise, notamment en France. La spécificité rythmique du jazz retient l’intérêt des documentaristes car elle se marie parfaitement avec ce type de narration. Le premier exemple marquant est Le Vampire de Jean Painlevé en 1947. Un documentaire sur les chauves-souris accompagné d'une musique de Duke Ellington.

Quelques années plus tard, en 1956, André Hodeir met en musique la bande originale du film de Jacques-Yves Cousteau Autour d’un récif. Nous retrouvons le duo d'artistes dans l'archive en tête d'article. Assis devant un piano, le compositeur de jazz explique comment s'est déroulé leur collaboration. Il évoque quelques grands noms du jazz français et américain déjà sollicités pour jouer de la musique de film.

A la même période, la France connait un engouement pour cette musique Afro-américaine. Les séjours répétés de musiciens noirs en Europe sont sans doute à l’origine de l’imprégnation progressive du cinéma par de grandes figures jazzy. Jean Cocteau fait office de précurseur. Dès 1950, il utilise le jazz dans la bande originale de son film Orphée. En 1956, il évoque son respect pour cette musique intense et pulsionnelle, en phase avec son époque.

Vers la fin des années 50, plusieurs réalisateurs français font à leur tour appel à de grands jazzmen expatriés : Thelonious Monk, Art Blakey & The Jazz Messengers ou encore Miles Davis.

L’apport de la Nouvelle Vague

Avec la Nouvelle Vague, de jeunes cinéastes puisent ouvertement leur inspiration dans le jazz. La musique devient un décor sonore, intensifie la dramaturgie des personnages. En 1957, Louis Malle fait appel à Miles Davis, en tournée à Paris, pour la bande sonore de son film Ascenseur pour l’échafaud. Le musicien visionne les rushs et improvise un thème au fil des images qui défilent sur l’écran. L’enregistrement a lieu en une nuit. L’utilisation du jazz permet d’intensifier le parcours psychologique des personnages.

Le choix du jeune réalisateur laisse la part belle au jeu de l’interprète et à l’ambiance instaurée par Miles Davis. Il se distingue des autres productions de l’époque qui préfèrent un jazz plus classique et moins sombre.

C’est aussi le choix du film de Roger Vadim Sait-on jamais qu’évoque le musicologue et compositeur André Hodeir, ici, en 1957. En choisissant John Lewis, Vadim opte pour un compromis entre jazz et tradition classique. Les morceaux sont interprétés par le Modern Jazz Quartet. Le résultat est beaucoup plus intimiste que les accords sombres de Miles Davis.

Trois ans plus tard, Jean-Luc Godard demande au pianiste Martial Solal de composer la musique du film A bout de souffle. Le jazz joue ici un rôle de ponctuation dans le film.

Un sens du suspens

La musique de jazz se marie avec le suspens distillé par les films policiers qui se multiplient sur les écrans de l’époque. En 1959, Edouard Molinaro l’utilise simultanément dans ses deux films sortis cette année-là : Un témoin dans la ville et Les femmes disparaissent.

A l'image de Louis Malle, le réalisateur fait appel à l’improvisation en cabine de post-synchronisation. Il explique l’avantage de cette technique ci-dessous.

Le jazz «star» de cinéma

Le temps passe et la passion du jazz persiste chez de nombreux cinéastes. Bertrand Tavernier lui dédie un film en 1986 : Autour de minuit. Il est récompensé par le César du meilleur son et l'Oscar de la meilleure musique en 1987. Le long métrage évoque de façon romancée la vie du saxophoniste Dexter Gordon et du pianiste Bud Powell. A l'occasion de la sortie du film, en 1986, le cinéaste racontait l'histoire du musicien de jazz Bud Powell et évoquait la grande période du jazz de l'après-guerre. Il confiait également que le film s'inspirait du livre La danse des infidèles de Francis Paudras.

Plateau invité : Bertrand Tavernier
1986 - 07:33 - vidéo

En 1988, Clint Eastwood réalisait Bird retraçant la vie du jazzman Charlie Parker.

Cinéma et jazz ont presque le même âge et leurs rencontres ininterrompues ne sont pas prêtes de s’éteindre.

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