Benyamin Nétanyahou, Premier ministre sortant, 71 ans, était à la tête du gouvernement israélien depuis 2009. Cela faisait deux ans que le pays traversait une grave crise politique, avec l'échec de quatre élections législatives et l'impossibilité pour lui de former un gouvernement. Afin mettre un terme à cette situation, le 2 juin au soir, le chef de l'opposition, Yaïr Lapid, est parvenu à réunir une coalition de forces allant de la gauche à l’extrême droite pour évincer le Premier ministre de plus en plus décrié. Son successeur est millionnaire après avoir fait fortune dans les nouvelles technologies, Naftali Bennett, 49 ans aujourd'hui, met donc fin au règne de Benjamin Netanyahou dont il a été l'un des proches collaborateurs. L'ex leader du Lokoud était critiqué pour la récente "guerre de 11 jours" entre l’armée israélienne et le Hamas palestinien. Benyamin Nétanyahou était aussi le seul chef de gouvernement israélien en fonction à faire face à des poursuites pénales dans trois affaires pour corruption, fraude et abus de confiance. Et pourtant, tout avait bien commencé pour lui. En 1996, à la veille des élections législatives, l'homme politique inspirait confiance. A deux jours du scrutin, deux candidats se retrouvaient presque à égalité dans les sondages : Shimon Peres et Benyamin Nétanyahou. Ce dernier, leader de la droite à la tête du Likoud depuis trois ans, menait une campagne "à l'américaine" pour défier le leader travailliste.
"Bibi, le peuple est avec toi !"
Le 29 mai 1996, le 19/20 de France 3 dressait le portrait de cet homme politique pratiquement inconnu en France. Le reportage commençait par présenter "Bibi" - son surnom - au milieu des jeunes de son parti dont le cri de ralliement était : "Bibi, le peuple est avec toi !". Un ton qui changeait des campagnes précédentes. Benyamin Nétanyahou, 47 ans, s'affichait tout "en décontraction et sourire à l'américaine". Et pour cause, l'homme avait fait ses études supérieures aux Etats-Unis et possédait la double nationalité. Interviewé par les journalistes français, il se déclarait confiant : "Parce que le peuple israélien veut la paix et la sécurité". La paix dans la sécurité, c'était selon ses adversaires d'alors, son seul message politique. Un message entendu par son électorat, comme ici "devant les religieux à l'intérieur de la grande synagogue de Jérusalem, ou chez les colons ou les Séfarades". Son programme était qualifié de flou par ses opposants mais il garantissait le respect des accords signés avec Yasser Arafat. Seul bémol, le statut de Jérusalem non négociable pour lui. Derrière ses airs affables, on pouvait déjà discerner une certaine autorité, un charisme que ce militant de Likoud expliquait ainsi : "Il a été officier dans une unité d'élite, ambassadeur d'Israël à l'ONU (entre 1984 et 1988), conseiller du ministre des Affaires étrangères. Il a l'expérience et l'étoffe d'un Premier ministre". Quelques jours plus tard, le leader du Likoud remportait les élections. L'occasion pour le Soir 3 du 31 mai 1996 de revenir un peu plus en détail sur son parcours en images d'archives.
Un candidat à la Clinton
Le commentaire décrit son ascension politique : "Il a été élu député en 1988, puis connaîtra une ascension fulgurante au sein de son parti, jusqu'à succéder à Yitzhak Shamir au sein du Likoud". Dépeint comme "toujours le sourire en coin, au bras de madame", il donne l'image d'un homme dynamique que certains comparaient alors à Bill Clinton. Le journaliste termine en relayant les interrogations du moment le concernant : "Benyamin Nétanyahou demeure une énigme. Sa carrière est-elle fondée sur son look télévisé comme l'affirmaient ses adversaires. Désormais, il doit prouver qu'il possède l'étoffe d'un véritable chef de gouvernement."
Chef du gouvernement, il le restera jusqu'en 1999, puis à nouveau à partir de 2009. Mais après 12 ans de règne, son avenir politique semble à présent s'obscurcir. Pour préserver son autorité, le Premier ministre israélien avait convoqué, le 3 juin, une réunion d'urgence des chefs du bloc de droite, avec notamment les dirigeants des partis ultra-orthodoxes, ainsi que le président de la Knesset pour contrer le nouveau gouvernement d’union nationale de ses opposants. Une manœuvre qui n'aura pas empêché son éviction. Quant à Naftali Bennett, ancien membre de son cabinet, il est issu d'un parti d'extrême-droite, juif sioniste-religieux, il a apporté les voix nécessaires pour rallier des forces du centre, de gauche et des partis arabes israéliens. Le nouveau Premier ministre israélien a servi au sein d'une prestigieuse unité d'élite israélienne pendant la guerre du Liban en 1996, l'année où Nétanyahou accédait au pouvoir...
Florence Dartois