À la Libération, de nombreuses femmes accusées d’avoir collaboré pendant l’Occupation furent tondues en place publique. Ces accusations portaient notamment sur leurs relations sexuelles, réelles ou supposées, avec l'occupant. Dans le montage d'archives en tête d'article, l'historien Fabrice Virgili, auteur de La France virile, explique pourquoi c’est par leur corps qu’elles sont punies. Il était considéré, détaille-t-il, « que leur engagement [avec l'occupant] est corporel, physique, amoureux, sexuel et que c'est aux armes de la séduction qu'il faut s'en prendre, d'où la tonte ».
L’historien estime à 20 000 le nombre de femmes tondues partout en France à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Mais, très rares sont celles qui témoignent. Un de ces rares témoignages date 2004, lorsque l’une de ces femmes s’exprime à la télévision : à la Libération, elle avait 23 ans et était amoureuse d’un officier allemand, qu’elle finira par épouser.
En plus d’être tondues, les femmes sont parfois violentées, exhibées nues ou marquées de croix gammées. Fabrice Virgili analyse ce châtiment sexué infligé après quatre années d’Occupation : « Face à cette défaite profonde des hommes français, la Libération aussi un moyen de réaffirmer finalement une virilité. Les hommes ainsi réaffirment leur pouvoir sur les femmes ».
Des actes longtemps restés sans condamnation
Ces tontes sont documentées en images, comme par le Comité de Libération du Cinéma Français. Pourtant, elles ne sont pas montrées dans le film La Libération de Paris. L’historienne des images Sylvie Lindeperg explique : « Il y a finalement un consensus au sein du CLCF sur le fait qu'il faut montrer une image radieuse et héroïque de la libération de Paris, qui mettent en valeur la Résistance, mais également la population parisienne. »
À l’époque, peu de voix condamnent ces actes et certains titres de presse les cautionnent même. Le journal La France nouvelle écrit le 6 octobre 1944 : « Tant que des ambassadeurs pétainistes représenteront la France à l’étranger, tant que de notoires partisans de Pétain et de la collaboration avec l’ennemi seront reçus et tolérés dans des milieux dits "gaullistes", nous nous permettrons de considérer comme une distraction bien frivole le châtiment de la "tonte" infligée à quelques femmes qui, sous toutes les occupations, ne demandent qu’à être occupées. »
Ce n'est que quelques décennies plus tard que de premières personnalités prennent position, comme Marguerite Duras, Lucie Aubrac ou Georges Brassens.