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En 1970, les routiers bloquaient Paris pour défendre leur liberté de travailler

En 1970, les routiers bloquaient Paris pour défendre leur liberté de travailler

En signe de protestation au pass vaccinal, des convois de milliers de véhicules devaient converger vers la capitale samedi 12 février. En 1970, une situation similaire s'était produite, mais à l'époque, les routiers défendaient la liberté de travailler plus.

Par Florence Dartois - Publié le 09.02.2022 - Mis à jour le 11.02.2022
Autoroutes bloquées par les routiers - 1970 - 05:05 - vidéo
 

En signe de protestation contre le pass vaccinal, de nombreux convois de milliers de véhicules devaient rejoindre la capitale samedi 12 février, avant de poursuivre vers Bruxelles. Ce mouvement de protestation est né sur les réseaux sociaux en référence au « convoi de la liberté » initié au Canada à Ottawa pour protester contre les restrictions liées au Covid-19.

Des routiers, mais aussi des voitures, campings-car et motos devaient former les cortèges. Plusieurs « convois de la liberté » (appellation que les membres revendiquent) sont partis mercredi 9 février au départ de Bayonne, Nice, Strasbourg ou Cherbourg. Les manifestants demandent notamment la suppression du pass vaccinal. Invité sur BFMTV le 8 février, Gérald Darmanin, a annoncé que la réponse de l'Etat serait ferme : « Les gendarmes sont très mobilisés, nous prendrons nos responsabilités pour ne jamais laisser entraver la liberté de circulation » a précisé le ministre de l'Intérieur. Le préfet de police de Paris a lui interdit tout rassemblement. «Un dispositif spécifique sera mis en place (...) pour empêcher les blocages d'axes routiers, verbaliser et interpeller les contrevenants à cette interdiction», a indiqué la préfecture de police. Dans Ouest-France, Emmanuel Macron a appelé au calme.

Ce n’est pas la première fois qu’un mouvement contestataire tente de bloquer les accès de la capitale. Il s’agit généralement de routiers défendant des intérêts relatifs à leur profession. L’archive présentée en tête d’article concerne un blocage routier en 1970. A l’époque, les conducteurs de poids lourds revendiquaient leur volonté de travailler plus, alors que le gouvernement venait d’annoncer l’interdiction pour eux de circuler les samedis et dimanches, à l’occasion du week-end pascal. Une décision jugée irrecevable pour les routiers.

En quelques heures, les camions avaient donc convergé vers Paris et avaient bloqué la plupart des autoroutes menant à la capitale. Dans le 13h00 du 20 mars 1970, le journaliste Jean-Pierre Lannes faisait le point sur la situation. Avec un ton particulièrement agacé et anxiogène, il dressait un état des lieux : « En fait de primevères, ce sont de drôles de petites fleurs qui ont poussées cette nuit, et ce matin encore, au bord des autoroutes et même, ce qui est beaucoup plus grave, sur les autoroutes autour de Paris. Des poids lourds, des centaines de poids lourds, des 10 tonnes, des 15 tonnes ont bloqué la circulation de la capitale provoquant des embouteillages. »

Liberté de circuler

Sur une musique volontairement angoissante, les images du reportage montraient la paralysie à la porte de Chapelle : « Tout le périphérique est bloqué ! Des automobilistes coincés sont obligés de passer la nuit sur place tandis qu’on voit les routiers jouer au football parfois sur les bas-côtés... », précisait Jean-Pierre Lannes dans son commentaire. Les routiers avaient aussi bouclé les accès stratégiques de Rungis et une partie de l’autoroute du Sud et de l’Ouest prenant les conducteurs en tenaille et provoquant une pagaille supplémentaire : « Les automobilistes essayaient de s’échapper par de petites routes. ».

Après cette description de la situation en plateau, un reportage donnait la parole aux contestataires. Les raisons principales du mouvement, « c’est qu’on nous interdit de rouler le samedi et le dimanche ». Ils craignaient avec cette mesure de ne plus pouvoir rentrer chez eux en fin de semaine : « On ne demande pas l’impossible, on demande à nous laisser en paix et de faire notre boulot. ».

A Garonor, au bureau de fret transformé en PC, d'autres routiers affichaient leur détermination. Leur intention, déclaraient-ils, c’était de « ne pas se laisser faire (…) sinon, on ne pourra plus rouler, on ne pourra plus travailler. » Ils affirmaient vouloir continuer le mouvement jusqu’à obtenir satisfaction concernant les jours fériés notamment, et être prêts à bloquer « Paris et toute la France ». Cette décision était ressentie comme une injustice : « C’est pas possible d’empêcher les gens de travailler au profit des gens qui se promènent. ». Se plaignant qu’il y ait trop de contrôles de police sur la route, un autre déplorait qu'il n'y ait « plus de République. Il n’y a plus de liberté du travail, il n’y a plus rien ! ».

« Il faut aimer la route. C’est ça notre vie »

Pour terminer cette incursion dans l’univers des routiers au début des années 1970, nous vous proposons une archive consacrée à la vie quotidienne de deux routiers bretons en 1969. Le poids lourd chargé à midi, à Paimpol, ils devaient rallier Rungis dans la soirée pour livrer leur marchandise.

Les routiers
1969 - 07:41 - vidéo

« C’est intéressant. On n’est pas toujours à la même place. On vit, on a des contacts humains sans arrêt, et tous les jours, on en apprend sur la route. Nous, on se passionne pour ce métier-là ! »

Bretagne-Paris, Paris-Bretagne, le binôme parcourait environ 3000 km par semaine. Aimant leur métier, ils appréciaient les progrès faits sur les routes et la bonne ambiance entre routiers. A 200 km de Paris, ils retrouvaient des confrères pour dîner dans un relais routier. Seule ombre au tableau peut-être, la vie familiale largement altérée par les longues absences, ou la santé, avec le manque de sommeil. Il était déjà temps de décharger le poisson frais aux Halle de Rungis. A 1 heure du matin, la journée n’était pas terminée. Ils devaient charger une nouvelle cargaison et repartir pour la Bretagne. Pour eux, le repos, ce serait « ce soir à la maison. Il est 1 heure, ce soir à 8 heures, c’est terminé. On est tranquille pour la nuit jusqu’au lendemain matin ». Malgré ces contraintes, aucun des deux ne souhaitait quitter ce métier : « C’est pour toute la vie (…) ».

Pour les créateurs de contenus

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