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La relation très «je t'aime, moi non plus» de Donald Trump et Emmanuel Macron

La relation très «je t'aime, moi non plus» de Donald Trump et Emmanuel Macron

Donald Trump est attendu samedi 7 décembre 2024 pour la réouverture de Notre-Dame de Paris. Entre 2017 et 2020, les rapports entre le président américain et le président français n'ont pas été de tout repos. Retour en archives sur les temps forts d'une relation mouvementée.

 

Par Florence Dartois - Publié le 02.11.2020 - Mis à jour le 05.12.2024
OTAN : rencontre Macron-Trump - 2017 - 01:55 - vidéo
 

Emmanuel Macron est le premier dirigeant d'un grand pays occidental à féliciter Donald Trump pour son élection le 5 novembre 2024.

Leur précédente collaboration, entre 2017 et 2020, ne fut pas un long fleuve tranquille. Entre poignée de main virile, tweets rageurs et réconciliation de façade, les rapports entre le président des États-Unis et le président français n'ont pas été de tout repos. Retour en images sur la relation complexe des deux leaders.

Le duo de leaders se rencontre pour la première fois à l'occasion du sommet de l'OTAN, le 25 mai 2017, quelques jours seulement après l'élection du tout nouveau président français. Une rencontre très attendue au niveau international comme le montre l'archive disponible en tête d'article. « Le jeune président allait-il tenir tête au milliardaire américain ? Oui, si l'on en juge la poignée de main virile entre les deux hommes » !

Une première rencontre sous le signe de l'admiration

Leur poignée de main virile restera sans doute le point d'orgue de cette première rencontre plutôt amicale. « Mâchoire serrée, les mains blanches » pour Emmanuel Macron, comme le décrivent les commentateurs américains. Quelques minutes plus tôt, Donald Trump s'était montré très élogieux, voire admiratif envers « son cadet de 30 ans ». Il déclare : « C'est un grand honneur pour moi d'être avec le nouveau président de la France qui a mené une campagne incroyable, remporté une victoire formidable ! On en a parlé dans le monde entier. Bravo. Bien joué ! ». L'ancien homme d'affaires lui-même prêt à tous les défis aurait-il trouvé un partenaire à sa dimension ?

Le climat apparemment cordial ne fait pas oublier au leader français certains sujets très épineux qu'il espère bien traiter avec son homologue américain. « Je suis très heureux pour ma part aussi d'être avec le président Trump, on a un agenda extrêmement large à discuter : la lutte contre le terrorisme, l'économie, les sujets climatiques et énergétiques ».

Quelques heures plus tard, Emmanuel Macron dresse un portrait courtois et bien moins caricatural que celui généralement fait du président américain : « Pour monsieur Trump, il ne m'appartient pas de faire de commentaires psychologiques. J'ai eu face à moi un interlocuteur efficace et pragmatique que j'ai trouvé très ouvert et avec lequel nous avons eu une discussion de travail franche et amicale ».

« Make our planet great again »

Cette première rencontre chaleureuse est rapidement remplacée par un climat plus frais. Quelques jours plus tard, le 2 juin 2017, le président américain annonce que les États-Unis s'apprêtent à sortir de l'Accord de Paris conclu un an et demi plus tôt pour freiner le réchauffement climatique. C'est la douche froide.

Accord de Paris : la sortie des Etats-Unis
2017 - 02:42 - vidéo

Donald Trump défend cette décision pour protéger les emplois américains, explique-t-il. Cette décision unilatérale suscite l'indignation de nombreux chefs d'État dont celle d'Emmanuel Macron, mais Trump réaffirme ce choix : « les États-Unis vont quitter l'Accord de Paris sur le changement climatique (…) Alors que nous sommes les meilleurs dans la protection environnementale, on ne va pas se laisser imposer des obligations par les plus grands pollueurs. »

La réponse française ne se fait pas attendre. Depuis l’Élysée, Emmanuel Macron fustige cette décision et dénonce « une faute ». Fait exceptionnel, le chef de l’État s'adresse directement aux Américains... en langue anglaise ! « Je considère qu'il commet là une erreur pour les intérêts de son pays et de son peuple et une faute pour l'avenir de notre planète »". À l'intention des scientifiques américains, il ajoute : « Je veux dire ceci, vous trouverez dans la France une seconde patrie ». Avant de conclure, « Make our planet great gain », en référence au slogan de campagne de Trump, « Make America great gain ». Le ton est donné.

Une concorde affichée au défilé du 14 juillet à Paris

Le dirigeant français n'est pas rancunier et convie le couple présidentiel américain à assister au défilé du 14 juillet à Paris. C'est la première visite officielle en France de Trump. La veille du défilé, le couple présidentiel est accueilli en grande pompe aux Invalides.

Le 14 juillet, jour du grand défilé annuel, le président américain assiste à la parade pour célébrer le centenaire de l'entrée en guerre des États-Unis dans la Première Guerre mondiale.

Ce 14 juillet va marquer le leader américain. C'est médusé et admiratif qu'il assiste, selon ses termes, à « l'un des plus beaux défilés » qu'il lui ait été donné de voir. Ce matin-là, sur les Champs-Élysées, 150 soldats américains défilent. Ce sont les troupes américaines qui ouvrent le cortège. Elles sont dirigées par le Major Nichols, dont le grand-père participa à la Grande Guerre. Les troupes passent devant le regard approbateur de Donald Trump. En tête des hommes, les étendards : d'abord, le drapeau américain. La cérémonie s'achève avec la présentation des drapeaux, américain et français, devant la tribune officielle. Puis l'hymne américain résonne sur les Champs-Élysées. Le défilé s'achève par un discours du président Macron volontairement fraternel : « Nous avons trouvé aussi des alliés sûrs, des amis qui sont venus à notre secours… et les États-Unis sont de ceux-là ». Les caméras se braquent alors sur le visage de Donald Trump toujours impassible. Le président conclut par ces mots forts : « Rien ne nous séparera jamais des États-Unis ».

Donald Trump, très impressionné confie à son retour à la Maison Blanche qu'il veut faire la même chose lors de la fête nationale du 4 juillet. Dans un tweet, il annonce : "NOTEZ LA DATE ! Nous allons organiser l'un des plus grands rassemblements de l'histoire de Washington le 4 juillet. Ça s'appellera 'Un salut à l'Amérique'. D'immenses feux d'artifice, du spectacle et une allocution par votre Président préféré, moi !" Il réalisera son rêve le 4 juillet 2019.

Discorde sur le nucléaire iranien

Emmanuel Macron retourne aux USA à la fin du mois avril 2018. De nombreuses images symboliques affichent leur complicité face aux journalistes : visite du bureau ovale à la Maison-Blanche, plantation d'un chêne français dans les jardins de la résidence [qui depuis est mort]. « L'arbre de la communication cache pour le moment la forêt des dossiers sensibles... » précise le commentaire de la vidéo ci-dessous. Emmanuel Macron, lui, souligne les combats démocratiques et la quête de liberté commune aux deux pays : « On doit collectivement se montrer à la hauteur de notre histoire », insiste-t-il.

MACRON / WASHINGTON
2018 - 01:50 - vidéo

Derrière les sourires polis se trame en réalité une crise diplomatique. Le président américain reçoit Emmanuel Macron dans le Bureau ovale et lui confirme que les États-Unis comptent se retirer de l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien. Un coup dur pour le Français, qui a placé l’Iran en tête de ses priorités diplomatiques. Emmanuel Macron ne parvient pas à convaincre Donald Trump que Washington doit rester dans l’accord. Au troisième jour de sa visite d’État, devant le Sénat américain, il s'adresse aux Américains et dénonce cette décision et la volonté de Trump de se lancer dans une guerre économique entre alliés. Bien que Trump soit absent de l'hémicycle, il s'adresse implicitement à lui, « vous pouvez jouer avec la peur et la colère pour un temps, mais cela ne mène à rien. La colère paralyse et affaiblit ». Le président français dénonce ensuite l'isolationnisme américain illustré par le slogan préféré de Trump « America first » : « On peut choisir l'isolationnisme, le repli et le nationalisme, mais fermer la porte au monde n'arrêtera pas la marche du monde. La guerre commerciale entre alliés n'est pas cohérente. Avec notre mission. Avec notre histoire. » Il conclut en prédisant que les États-Unis reviendront un jour dans les Accords de Paris.

Guerre commerciale et guerre des tweets

Les deux présidents se recroisent brièvement au G7, qui se déroule en juin 2018 à Charlevoix, au Canada. Sur fond de guerre commerciale, l'ambiance est délétère. Le président américain arrive en retard sur place, reporte sa rencontre avec le président français qui mène le front de coordination européenne formé à son initiative, et va provoquer le départ précipité du président américain pour une rencontre à Singapour avec le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un.

En novembre 2018, Donald Trump est convié aux commémorations du centenaire de l’Armistice de 11 novembre, à Paris. La veille de son arrivée, dans l'avion Air Force One, via un tweet, il fustige la volonté affichée du Français d'organiser une armée européenne. Emmanuel Macron explique ainsi cette volonté : « On ne protégera pas les Européens si on ne décide pas d'avoir une vraie armée européenne », plaide-t-il. Il faut « nous protéger à l'égard de la Chine, de la Russie et même des États-Unis ».

La tension déjà palpable va monter d'un cran le 11 novembre. Au cours de son allocution à l'Arc de Triomphe, Emmanuel Macron tient un discours critique sur la politique de l'« America first » : « Le patriotisme est l'exact contraire du nationalisme. Le nationalisme en est la trahison. En disant "nos intérêts d'abord et qu'importent les autres !", on gomme ce qu'une Nation a de plus précieux, ce qui la fait vivre : ses valeurs morales. » Donald Trump, vexé, le reçoit comme une insulte.

De retour chez lui, une pluie de tweets agressifs déferle sur Emmanuel Macron. Trump y critique l'impopularité de son homologue français, le projet d'armée européenne et le taux de chômage en France. La réaction du locataire de l’Élysée ne se fait pas attendre et en anglais dans le texte : « Je préfère toujours avoir une discussion directe ou répondre aux questions plutôt que de faire ma diplomatie par des tweets. »

75e anniversaire du Débarquement : des retrouvailles de façade

Après une période tourmentée, les deux chefs d’État se retrouvent quelques mois plus tard à l'occasion des cérémonies de commémorations du 75e anniversaire du Débarquement, le 6 juin 2019. Ils président ensemble les cérémonies auprès de 160 vétérans puis ils déjeunent à Caen. Dans son discours, le locataire de l’Élysée s'adresse directement à son homologue, se retournant vers lui, il déclare : « L'Amérique, cher président Trump, qui n'est jamais aussi grande que lorsqu'elle se bat pour la liberté des autres… » Message reçu et ponctué par un petit sourire entendu, à défaut d'être complice. Puis, c'est à Trump de déclarer, « "notre alliance a été forgée dans de rudes batailles et éprouvée dans la paix. Nos liens sont indestructibles ».

Guerre des taxes et imbroglio iranien

Le calme avant une nouvelle tempête. Les sujets de discorde entre les deux hommes s'accumulent. Le mois suivant, en juillet 2019, le président américain se lance dans une guerre commerciale contre les vins français après que le parlement français ait fait voter une taxe sur les GAFA. En annonçant une taxation contre les géants américains du numérique, Emmanuel Macron s'attire les foudres du président américain. Trump menace de taxer les vins français. Dans un contexte où les États-Unis sont le pays d'exportation qui rapporte le plus à la France, avec une croissance de 32% les cinq années précédentes. Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, espère encore trouver un accord avec les États-Unis sur les taxes GAFA. Pour Mathieu Plane, économiste à l'OFCE, les menaces de Donald Trump ne sont pas à prendre à la légère.

Août 2019. Les relations entre l’Iran et les États-Unis se tendent, car Washington renforce ses sanctions. Emmanuel Macron endosse le costume de conciliateur et réclame un allègement des sanctions américaines. Il invite le ministre des Affaires étrangères iranien Mohammad Javad Zarif à Biarritz lors du sommet du G7. Emmanuel Macron crée la surprise en invitant le chef de la diplomatie iranienne pour discuter du nucléaire iranien avec son homologue français Jean-Yves Le Drian. Sur cette visite surprise, Trump, fermé reste énigmatique « No comment » ! Le flou persiste.

Emmanuel Macron affirme avait été mandaté pour parler avec les Iraniens au nom du G7, ce que dément Trump, « non, je n'ai pas discuté de ça, pas du tout ». Le président français fait marche arrière, « le G7 est un club informel, il n'y a pas de mandat qui est donné dans le cadre du G7 à l'un ou à l'autre. Et donc il y a des initiatives qui continueront à être prises par les uns et les autres, et nous, on va continuer à agir. Parfois, y compris de manière très discrète pour que ce soit efficace ».

Au sortir du G7, une bonne nouvelle cependant : la menace de représailles sur le vin français s'éloigne. Le sujet semble pacifié et Donald Trump plaisante même à ce sujet : « Je peux vous confirmer que la première dame aime le vin français ».

VIN LA MENACE DE TAXE S'ELOIGNE
2019 - 01:55 - vidéo

Le 24 septembre 2019, en marge de la conférence mondiale pour le climat, Emmanuel Macron reprend ses tentatives de conciliations entre Rohani et Trump. À la tribune de l'ONU à New York, il déclare, « Il faut avoir le courage de faire la paix ». Il en appelle les USA et l'Iran à reprendre les négociations. Mais dans ce dossier, les deux camps restent inflexibles : Donald Trump menace même de durcir encore les sanctions contre Téhéran.

Le retour des représailles économiques

Les deux présidents vont avoir l'occasion de confronter à nouveau leurs egos au sommet des 70 ans de l'OTAN, à Londres, début décembre 2019. Quelques jours après qu'Emmanuel Macron ait déclaré que l'OTAN était « en état de mort cérébrale ».

Le 3 décembre 2019, en marge du sommet, le président américain Donald Trump reparle de sa menace de taxer les produits français en représailles à la taxe GAFA française sur les géants du numérique. On croyait pourtant l'affaire quasiment réglée à la fin de l'été. Les États-Unis acceptaient alors de travailler sur un projet international de taxation des géants du numérique. Mais Donald Trump a changé d'avis. Il menace de nouveau la France de représailles économiques. Cette fois, le roquefort, le champagne, les sacs à main pourraient être pénalisés. À moins que Donald Trump et Emmanuel Macron ne s'entendent à nouveau.

La Covid-19 et la fermeture des frontières

La crise du coronavirus va passer au premier plan, mais Emmanuel Macron va encore s'opposer à l'Américain, au nom de l'Europe cette fois-ci, lorsque le président Donald Trump prend la décision, sans en informer l'Union Européenne au préalable, d'interdire l'entrée de tous les ressortissants européens sur son sol. Très critique envers l'UE, il l'accuse de ne pas avoir su lutter contre le virus et de l'avoir laissé circuler. Le Royaume-Uni et l'Irlande échappent à l'interdiction. Emmanuel Macron rappelle que c'était au niveau européen que devrait se décider le contrôle des frontières.

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