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David Cronenberg : «J’ai besoin d’un public qui me ressemble»

David Cronenberg : «J’ai besoin d’un public qui me ressemble»

Plus de 25 ans après avoir choqué la Croisette avec « Crash », David Cronenberg est revenu à Cannes avec un nouveau film, « Les Crimes du futur ». Sur fond de transhumanisme et d'ablation d'organes, le film devrait une nouvelle fois surprendre le public.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 23.05.2022
Crash de David Cronenberg - 1996 - 02:18 - vidéo
 

En lice pour la Palme d'Or, Les Crimes du futur de David Cronenberg, 79 ans, est un long-métrage où il aborde le transhumanisme et l'ablation d'organes. Ce film pourrait défrayer la chronique, puisque le réalisateur a même prédit le départ de plusieurs spectateurs « après les cinq premières minutes ». « Certaines personnes qui ont vu le film pensent aussi que les vingt dernières minutes seront très difficiles à regarder, et que beaucoup partiront. Un mec a même dit qu'il avait failli avoir une attaque de panique », a-t-il expliqué.

En 1996, le cinéaste canadien avait déjà choqué une partie du public lors de la projection de Crash qui relatait les tribulations érotiques d’un couple, qui après avoir subi un accident de voiture, allait explorer sa fascination ambigüe et morbide de la mort et de la mécanique. Il était déjà alors question de technologie, ici de mécanique, et de modification du corps, voire de destruction des organes indissociables des pulsions sexuelles les plus crues, comme il l'expliquait dans la vidéo en tête d'article.

Sexe et mortalité

Le 17 mai 1995, le réalisateur canadien s'exprimait sur le sens intrinsèque de Crash qu'il considérait comme un reflet de l'évolution de notre société. Il y voyait un film « existentiel ». A ceux qui critiquait le machinisme exacerbé du film, il répondait «humanité». « J’y traite vraiment ce qui concerne l'être humain : la conscience, ce qu'est devenue l'existence à la fin du XXe siècle, et le film aborde très spécifiquement le sexe et la mortalité », disait-il.

Le cinéaste décrivait ensuite sa vision du rôle du 7e art. « Je crois qu’une partie de notre art et notre devoir consiste à regarder au-delà de ce que la plupart des gens voient, à forcer les gens à voir au-delà de la réalité, une hyper réalité en quelque sorte et pas simplement accepter les choses telles qu'elles se présentent ». Avec la sexualité et la technologie abordées dans Crash, David Cronenberg essayait de « voir la réalité derrière la façade ». Pour conclure, il appelait son public à le suivre dans ses extravagances visuelles et scénaristiques. « Je suis un cinéaste aventurier et courageux », déclarait-il, ajoutant provocateur : « J’ai besoin d’un public qui me ressemble. Si les gens veulent voir des films faciles et conformistes ils n'ont que l'embarras du choix, ailleurs. » Des propos qui colleront très certainement avec cette nouvelle oeuvre annoncée comme LE film sulfureux de cette 75e édition.

Fascination morbide

Sexe, vitesse, mort violente, fantasme... Comme prévu, à sa sortie en salles, Crash allait susciter un mélange d'admiration et de dégoût, mais également une certaine fascination qu'un psychiatre tentait d'expliciter dans le journal de 20h00 de France 2, le 16 juillet 1996. Selon ses propos à découvrir ci-dessous, les accidents de voitures provoqueraient chez chacun d'entre nous une sorte de « fascination malsaine ». Rien d'étonnant par conséquent à ce que l’accident de la route soit devenu un spectacle que Cronenberg avait transformé en un film mêlant sexualité et tôle froissée.

Le professeur Maurice Ferreri décrivait la voiture comme « un outil de séduction dangereuse ». Il ajoutait que dans la vie comme dans le film de Cronenberg, « au volant certains peuvent éprouver une ivresse, voire une certaine excitation.» Le psychiatre précisait que chez la plupart des conducteurs, la voiture provoquait « un sentiment d'invulnérabilité » poussant certains à prendre parfois des risques insensés. Et le médecin soulignait que les conducteurs, à l'image des héros du film, frôlaient et taquinaient « un peu la mort » avec délectation.

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