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Avec ses coûts écologiques et humains, la Coupe du monde de foot au Qatar fait polémique

Avec ses coûts écologiques et humains, la Coupe du monde de foot au Qatar fait polémique

De plus en plus de voix dénoncent l'attribution de la Coupe du monde de football au Qatar, pointant une « aberration écologique » et un « non-respect des droits de l’homme ». Des questions évoquées dans un sujet de France 2 réalisé au Qatar en 2019.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 02.09.2022 - Mis à jour le 13.10.2022
Qatar, coup de frais sur les stades - 2019 - 05:27 - vidéo
 

Invité de « C à vous » lundi 29 août, l’acteur Vincent Lindon, connu pour ses positions engagées sur les questions sociales, a appelé au boycott de la Coupe du monde au Qatar, pointant une « aberration écologique » et un « non-respect des droits de l’homme ». Il n'est pas le seul à dénoncer l'évènement.

Par aberration écologique, les voix critiques pointent notamment la climatisation des stades construits spécialement dans ce petit mais riche émirat de la péninsule arabique, peuplé de plus de 2 millions d’habitants, et qui a hérité de l’organisation de la coupe du monde de football 2022 en 2010. Un pays désertique aux températures qui varient le plus souvent l’été entre 40 et 50°. Pour ne pas trop souffrir de ces conditions climatiques extrêmes, les organisateurs ont donc décidé pour la première fois dans l’histoire d’une coupe du monde de football d’organiser cette compétition en hiver (du 20 novembre au 12 décembre). Quant au non-respect des droits de l’homme, il est question des conditions déplorables qu’ont rencontré les ouvriers, le plus souvent d’origine africaine et asiatique, sur les chantiers qataris, avec de nombreux salaires non réglés. Et surtout, le nombre de décès très importants, quoique non quantifiés précisément, de ces ouvriers sur les divers chantiers du pays.

Ces questions sont justement abordées dans un reportage de France 2 placé en tête d’article, réalisé par le journaliste Franck Genauzeau et diffusé le 21 septembre 2019. Le sujet commence par la question de la climatisation des stades, avec la présentation faite par Saud Aboul Ghani, concepteur de la climatisation du stade Al Wakrah, du fonctionnement de cette technologie censée rendre la vie supportable aux footballeurs ainsi qu’aux spectateurs présents dans les gradins. Montrant, le long de la pelouse, des dizaines de canons soufflant de l’air frais vers la pelouse, l’ingénieur explique : « L’air chaud est plus léger, il ne pénètre donc pas dans le stade où l’air plus frais et donc plus dense reste en dessous. » Résultat, avec ces dizaines de petits orifices climatisant envoyant de l’air frais dans les jambes des footballeurs, le stade peut rester ouvert, sans risque de surchauffe. « Avec ces ventilateurs géants, explique Franck Genauzeau, la température devrait être environ de 20° sur la pelouse, elle sera de quelques degrés plus élevés dans les tribunes pour les spectateurs qui bénéficieront néanmoins de ces petits diffuseurs d’air conditionné situés sous les sièges qui leur permettront de voir le match dans les meilleures conditions, même si cela consomme évidemment davantage d’énergie. »

Zones d'ombre

Autre question abordée par le reportage, et qui fait déjà polémique depuis des années, celle de la condition de vie des travailleurs étrangers sur place. Des « milliers de travailleurs qui travaillent dans des températures avoisinant parfois les 50° », explique le reportage, qui rend visite à un contremaître ghanéen. « Les travailleurs travaillent 11 heures par jour, 6 jours sur 7, et rentrent chez eux une fois par an. Nourri sur place et logé, notre guide gagne 315 euros par mois, et réside dans ce dortoir ou l’intimité reste sommaire » précise le journaliste de France 2. Mais Gariba Mohammed, l’ouvrier ghanéen, se déclare satisfait de son sort : « Dans mon pays, je n’étais pas nourri, logé et blanchi, alors qu’ici je n’ai rien à payer. Ça fait vraiment une différence. »

De nombreux experts estiment que les conditions de vie ont été améliorées ces dernières années, informe Franck Genauzeau. Mais son équipe entend « parler d’un autre logement, moins reluisant, à quelques kilomètres de là. A [son] arrivée, les environs ressemblent à une décharge à ciel ouvert d’où semblent émerger plusieurs individus. Ces hommes travaillent-ils sur les chantiers ? » Le reporter, arrêté par la police puis relâché au bout de 4 heures contre la promesse de ne pas venir filmer ici, n’en saura pas plus.

Le reportage se poursuit par l’interview d’un spécialiste des questions du travail au Qatar bien plus pessimiste que les allégations officielles. Selon le chercheur Nicholas Mcgeehan, le flou le plus total demeure sur le chiffre de la mortalité sur les chantiers au Qatar : « On sait que beaucoup d’ouvriers meurent mais on ne sait pas combien. On ne sait pas de quoi. Car les autorités qatariennes refusent de publier des chiffres et elles ne font pas d’autopsie. Les corps sont mis dans des cercueils et renvoyés dans leurs pays. Les familles ne reçoivent ni explication ni compensations, sauf si la mort résulte d’un accident. »

En conclusion de son reportage, Franck Genauzeau rappelle que selon « le Comité d’organisation […], onze personnes travaillant sur les chantiers des stades sont mortes l’an dernier [en 2018, NDLR]. Mais, précise le journaliste, ces ouvriers ne représentent que 2% de la main d’œuvre actuellement employée au Qatar dans la modernisation du pays. Pour les 98% restants, poursuit le journaliste, il n’existe aucune statistique. Selon plusieurs ONG, le bilan s’élève vraisemblablement à plusieurs milliers de morts depuis l’attribution de la coupe du monde au Qatar, il y a 9 ans [en 2010, NDLR]. »

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