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Monsieur Martinot, un «réparateur de vieilles savates» en 1976

Monsieur Martinot, un «réparateur de vieilles savates» en 1976

À partir du 7 novembre, le «bonus réparation» mis en place par le gouvernement pour l'électroménager s'étend au textile et aux chaussures. De quoi encourager le recours aux couturiers et cordonniers pour réparer ses biens. Un artisanat que nous présentait en 1976 monsieur Martinot, cordonnier. Portrait.

Par Romane Laignel Sauvage - Publié le 07.11.2023
Cordonnier - 1976 - 11:20 - vidéo
 

L'ACTU.

Le gouvernement français souhaite porter à 21,6 millions de pièces de vêtements et chaussures réparées en 2028 grâce à une nouvelle aide financière, contre 16 millions aujourd'hui (chiffres de 2019, Ademe). À partir du 7 novembre, les usagers souhaitant faire réparer leurs biens textiles et leurs chaussures peuvent bénéficier d'un allègement de leur facture, allant jusqu'à 60 % du prix de la réparation via des commerces agréés.

Ce « bonus réparation » existait déjà concernant l'électroménager et a pour objectif d'alléger les factures tout en encourageant la réduction des déchets. L'extension de ce dispositif au textile et chaussures signe peut-être le grand retour des couturiers et cordonniers.

L'ARCHIVE.

« Mon père était savetier, mon grand-père était savetier. J'en ai hérité et j'ai aimé ce métier par-dessus tout. » En avril 1976, la toute nouvelle chaîne de télévision Télévision Française 1 proposait le portrait de monsieur Martinot, cordonnier. Ou plutôt « savetier » comme il le précisait dans cette archive visible en tête d'article. Car, racontait-il, cordonnier était « une fausse appellation » Et d'expliquer : « On s'est toujours appelé cordonniers alors qu'en réalité, nous sommes savetiers, ce qui veut dire réparateur de vieilles savates ».

L'artisan préférait cette appellation. Il l'avait affichée à l'entrée de sa boutique. La distinction n'avait pourtant plus court depuis Louis XV qui avait rapproché les deux métiers dans un même statut, ajoutait une voix de journaliste en commentaire.

Avec 40 ans de métier derrière lui, monsieur Martinot semblait proposer une expertise et un service qui plaisaient à ses clients. Les voilà qui se succédaient dans sa boutique. « Je vous ai refait vos talons en plastique durci, vos semelles intérieures que j'ai changé en basane. Et puis, alors, toutes ces petites coutures fait-main que nous avons refait », décrivait-il à l'un de ses visiteurs, paire de souliers en main.

Des souliers de moins bonne qualité

À une dame en manteau de fourrure qui lui apportait de hautes bottes, il annonçait : « Je ne peux vous faire que les talons. Le reste en-dessous est irréparable, rien ne colle dessus, c'est une matière plastique, vous devez aller jusqu'au bout et les jeter ». Et de déplorer la baisse de qualité : « C'est la mode actuelle, on paye très cher maintenant, mais ce n'est pas une référence ! » Les « mauvaises chaussures » avaient ainsi selon lui des talons creux au lieu d'être en bois, des semelles dont le remplissage comportait carton, plastique, ou gomme. À la réparation, ces nouvelles matières posaient un problème. On ne savait « pas quoi mettre pour remplacer ce rempli ! »

Des semelles, défaites puis refaites, aux incisions et gravures, monsieur Martinot présentait les étapes de son travail avec un vocabulaire précis. Et de savants calculs. Ainsi, expliquait-il, avant les machines à coller, « il fallait donner 80 coups de marteau par semelle, ce qui fait que pour une paire ça en faisait 160 coups. Et si l'on avait 10 ou 15 paires à coller à la queueleuleu, cela représentait 1 600 ou 1 700 coups de marteau à donner dans un minimum de temps, avec un marteau qui est très lourd ! »

Un métier où il fallait « produire au maximum », du fait d'une grande quantité de travail manuel, expliquait l'artisan. Heureusement, madame Martinot travaillait en compagnie de son mari. Ses activités consistaient à « recevoir la clientèle, à la conseiller d'une part, d'autre part la femme doit faire le classement des chaussures et faire des travaux manuels tel que les piqures ».

Le couple ne trouvait plus d'apprenti pour les seconder, tandis que les écoles fermaient par manque d'élèves disaient-ils, et que les anciens partaient à la retraite. Cordonnier, un métier d'avenir ? « Peut-être, mais il faudra que les jeunes qui se dirigent dans ce métier soient aidés au départ s'ils veulent arriver à percer, qu'ils soient patients, on ne se fait pas une clientèle en six mois de temps ».

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