UN LIEU MYSTÉRIEUX.
On se rend sur l’île de Gavrinis en bateau depuis Larmor-Baden. 10 minutes de navigation avant d'apercevoir le monument perché sur une colline. Découvert en 1832, le cairn a été longtemps considéré comme l'œuvre des Celtes, avant de découvrir qu’il datait du néolithique, soit entre 4 500 et 200 avant J.C. À l’époque, l’île de Gavrinis n’était qu’une presqu’île, elle a ensuite était encerclée par l'eau au fil des millénaires avec la montée des océans. Les Celtes ne furent donc pas les bâtisseurs de ces lieux mégalithiques témoignant de l’une des premières architectures d’Occident.
Gavrinis est entouré d'un halo de mystère. Au fil des menhirs, dolmens et tumulus, nombreux dans la région, l’imagination vagabonde et favorise les hypothèses les plus intrigantes. Le cairn de Gavrinis, construit sur un rocher de granit de 14 hectares, s’inscrirait dans un cadran solaire matérialisé par les autres mégalithes de la région. D’autres croient y voir une sorte de caisson magnétique de régénération. Autant d’hypothèses rejetées par les archéologues qui préfèrent parler de site funéraire ou religieux. Il s’agirait de sépultures collectives, ou de lieu ponctuel d’anciens rites funéraires. Aucune des deux hypothèses n’étant véritablement tranchée.
LES ARCHIVES.
En août 1985, le journal télévisé de Rennes Soir de FR3 consacrait un reportage à ce site unique. L’archive en tête d’article permet de découvrir les 14 mètres de couloir menant à une chambre (mortuaire) et ses 23 dalles entièrement gravées (sur 29) représentant, selon les archéologues, des cornes de bovins, serpents ou haches, emblèmes typiques du néolithique. La pièce centrale est enfouie au cœur d’un grand dolmen composé de 50 dalles brutes. L’ensemble est recouvert par un cairn de 50 mètres de diamètre en « maçonnerie sèche » et à « gradins réguliers ». Pour remettre le site à l’honneur, une campagne de réhabilitation avait été entreprise cette année-là. Elle mêlait fouilles et restauration, avec reconstitution d’une partie du monument, comprenant la façade et le dolmen intérieur.
Roger Gicquel fasciné
Quelques années plus tard, en 1993, le journaliste Roger Gicquel conviait les téléspectateurs à une visite de l’île de Gavrinis qu’il qualifiait d’ « exceptionnelle », ses nombreuses dalles gravées de « lignes et de signes extrêmement mystérieux » l'avaient envoûté. Visiblement amoureux du lieu, il commentait de magnifiques images de la galerie et des dalles gravées, sur de la musique bretonne de circonstance.
Les mégalithes gavrinis
1993 - 03:33 - vidéo
Unique au monde
Nous continuons, ci-dessous, notre exploration du cairn, avec une visite très instructive de juillet 1996. Dans le cadre de l'émission « Les estivales », Nathalie Kerrien visitait Gavrinis en compagnie d’une guide qui lui dévoilait la signification du terme « Gavrinis », qui en breton venait de « gavr », (chèvre), et « enez », (île) ou « govero » (un mot celtique signifiant tourbillon ou gouffre, peut-être en référence aux courants marins).
Sur de jolies vues aériennes du site, Anaïk expliquait que l’on ne pouvait plus parler de tumulus, qui était un terme impropre, car utilisé pour évoquer un tombeau fermé, ce qui n’était pas le cas ici. Elle confirmait que Gavrinis était bien un cairn, un dolmen recouvert de pierres et une chambre ouverte sur l’extérieur par un couloir. Elle ajoutait que d’après les archéologues, le cairn représentait une masse de « 10 000 tonnes de pierres » et qu’il avait sans doute fallu « des centaines d’hommes » pour l’ériger sur trois années de labeur.
À l’intérieur de ce que l’on suppose être une chambre funéraire, la guide précisait la particularité de Gavrinis, un site unique en Europe pour ses célèbres gravures connues dans le monde entier. Elle soulignait que l’on n’arrivait toujours pas à comprendre le sens de ces formes, de ces enchevêtrements « de lignes et de cercles concentriques », mais que les archéologues avaient tout de même identifié quelques motifs emblématiques du néolithique, comme les écussons, qui représenteraient « une figure anthropomorphe », une sorte de divinité très stylisée représentant la féminité, ou les crosses associées à l’autorité.
Le site mégalithique de l'Ile de Gavrinis
1996 - 03:14 - vidéo
De mystérieux motifs
En juillet 2007, le magazine « Trésors de l'Ouest » de F3 Nantes offrait une nouvelle visite du site mégalithique, sur une musique envoûtante, comme il se doit. Serge Cassen, du laboratoire de préhistoire et de protohistoire du CNRS, revenait sur ce que l’on connaissait de l’édifice : une « tombe collective » selon lui. Aucun écrit ne racontant l’histoire de ces blocs massifs de granit, les scientifiques cherchaient toujours les réponses dans les dessins gravés à même la pierre. Le chercheur s’arrêtait notamment sur le bas d’une dalle recouverte de motifs « serpentiformes, et de deux haches allongées à talons pointus, emblème typique du néolithique ».
D'après lui, les spirales, les arabesques encore magnifiquement conservées, avaient été très certainement gravées alors que les pierres étaient encore au sol, avant la construction du monument : « il est plus simple de graver à plat, qu'à chocs répétés, debout », précisait-il.
Selon lui, les hommes du Néolithique avaient sans doute voulu traduire des émotions universelles toujours partagées, comme l’amour, le désir sexuel ou la tristesse devant la mort. Un message vieux de 6 000 ans qui avait traversé le temps sans s’altérer.
Trésors de l'ouest : Gavrinis
2007 - 03:21 - vidéo
Un lien avec l'autre monde
Pour terminer notre promenade à Gavrinis, qui est classé au titre des monuments historiques depuis le 19 juillet 1901, rencontre avec un conteur local, Rémy Cochen. En 2017, il racontait des histoires étranges sur ces lieux emblématiques du golfe du Morbihan, comme l'île aux Moines ou Gavrinis. Dans le cairn, il aimait à narrer que c'étaient les korrigans (des créatures légendaires de Bretagne, comparables aux lutins) qui avaient gravé les pierres. Lui imaginait ce lieu comme un lieu initiatique, « un passage entre les mondes, d’un état à l’autre, entre la vie et la mort ».
Rencontre avec Rémy Cochen, conteur du golfe du Morbihan
2017 - 01:57 - vidéo
Pour aller plus loin :
Rennes soir : Les sites mégalithiques bretons (26 juillet 1989)
19-20 Édition nationale : reportage sur l'île de Gavrinis (Morbihan). Elle abrite l'un des plus grands dolmens de Bretagne dont l'ensemble a été numérisé en 3D grâce à un laser numérique (24 mars 2011)
19-20 Édition Bretagne Pays de la Loire : le cairn de Gavrinis. Découvert en 1832, le tumulus a été longtemps considéré comme l’œuvre des Celtes. L'archéologie moderne a prouvé qu'il appartient bien aux temps néolithiques. C'est l'une des toutes premières traces de l'architecture occidentale (31 août 2014)
Le site du cairn de Gavrinis, un joyau de la préhistoire