Aller au contenu principal
Le bifteck-frites, un «symbole patriotique de la France»

Le bifteck-frites, un «symbole patriotique de la France»

Dans ses «Mythologies», Roland Barthes avait analysé l'importance du bifteck-frites. Ce dernier avait été supplanté à la fin des années 50 par le steak haché, dont les prix actuellement s'envolent.

Par la rédaction de l'INA - Publié le 29.08.2022
Roland Barthes à propos de "Mythologies" - 1957 - 09:32 - vidéo
 

La viande hachée connait depuis quelques semaines une hausse importante de son prix, de l'ordre de + 20% selon les relevés des cabinets spécialisés. En cause, notamment, l'inflation.

Nous l'avons vu, le steak haché a été démocratisé en France à la fin de années 50 à la suite de plusieurs facteurs, dont une forte demande de viande et une pénurie de boeufs. Pour pallier à la cherté du produit, la fédération des bouchers va parvenir à inciter les Français à consommer les « bas morceaux » à la place du bifteck. La viande sera alors proposée sous la forme hachée. L'opération commerciale sera ensuite grandement appuyée à la télévision avec des messages vantant les mérites de la viande hachée.

Le bifteck laissait donc la place au steak haché. Dans «Mythologies», Roland Barthes explique que le «bifteck-pommes frites [est] un grand mythe national français». Dans l'extrait en tête de cet article, le sémiologue s'explique en 1957 au micro de Pierre Desgraupes dans l’émission «Lectures». Pour lui, le bifteck fonctionne «comme le symbole patriotique de la France». Il appuie son propos en racontant que dans un film d'espionnage qu'il avait vu, une servante d'un curé, qui était patriote, avait reçu «un espion allemand déguisé en clandestin français». On imagine que la scène se déroule en temps de guerre. Elle lui servira de son bifteck. Puis quand elle s'apercevra qu'il s'agissait d'un espion, elle s'exclamera : «Et moi qui lui ai donné de mon bifteck». Comme un symbole de la France donné à l'ennemi.

Dans son livre, Roland Barthes écrivait : «Comme le vin, le bifteck est, en France, élément de base, nationalisé plus encore que socialisé ; il figure dans tous les décors de la vie alimentaire : plat, bordé de jaune, semelloïde, dans les restaurants bon marché ; épais, juteux, dans les bistrots spécialisés ; cubique, le cœur tout humecté sous une légère croûte carbonisée, dans la haute cuisine : il participe à tous les rythmes, au confortable repas bourgeois et au casse-croûte bohème du célibataire ; c'est la nou rriture à la fois expéditive et dense, il accomplit le meilleur rapport possible entre l'économie et l'efficacité, la mythologie et la plasticité de sa consommation.»

S'orienter dans la galaxie INA

Vous êtes particulier, professionnel des médias, enseignant, journaliste... ? Découvrez les sites de l'INA conçus pour vous, suivez-nous sur les réseaux sociaux, inscrivez-vous à nos newsletters.

Suivre l'INA éclaire actu

Chaque jour, la rédaction vous propose une sélection de vidéos et des articles éditorialisés en résonance avec l'actualité sous toutes ses formes.