Le 31 décembre 1958, l'Etat français se dotait d'un nouvel outil économique : l'assurance chômage. Une réforme innovante.
C'est sous le général De Gaulle que l'on commence à évoquer la notion de chômage. La France est encore en plein essor économique porté par la reconstruction de l'Après-Guerre. On parlera plus tard de cette période qui s'achèvera en 1974, avec le premier choc pétrolier notamment, des "trente glorieuses". Pourtant dès la fin des années 50, le gouvernement crée les Assedic et l'Unedic. Le premier cadre des allocutions chômage.
Dans son discours du 29 décembre 1958, le général de Gaulle explique aux Français en quoi va consister cette nouvelle allocation : "Il va être fondé, institué par coopération entre le patronat et les syndicats un fonds national destiné au maintien de l'emploi et assurant aux travailleurs qui tomberaient en chômage un supplément portant l'allocation aux environs du salaire minimum."
A l'époque, le pays ne compte que 25 000 chômeurs et cette allocation est plutôt généreuse.
En huit ans, la situation va se dégrader...
Discours de Jacques Chirac, Secrétaire d'Etat à l'emploi. En 1967, il y a 174 000 demandeurs d'emploi : "il y avait urgence dans la mesure où l'évolution économique, démographique, technologique et notamment l'ouverture des frontières ont conduit le gouvernement à penser que le nombre de demandeurs d'emploi était susceptible de s'accroître…"
Les dates-clé de l'assurance chômage.
La première Agence Nationale Pour l'Emploi (ANPE) ouvre le 13 juillet 1967. D'autres bureaux vont se développer partout en France dans les années suivantes.
A Bordeaux, une agence de l'ANPE ouvre en grande pompe en 1969. Petite visite des locaux.
Avec les années 70 et l'accroîssement du nombre de chômeurs, la question de l'emploi va dominer l'ensemble du débat politique
En 1974, le président Georges Pompidou déclare : "C'est ma principale préoccupation pour l'avenir."
Le cap fatidique du million de chômeurs est franchi en 1976. Deux ans plus tôt était instituée l'allocation spéciale d'attente. Elle garantissait 100% du salaire net du dernier emploi pendant un an.
Toujours en 1974, Valéry Giscard d'Estaing promet de faire de l'emploi sa priorité : "le gouvernement fera le nécessaire à temps pour vous protéger du chômage. Il en a la volonté et les moyens."
En 1979, l'allocation spéciale d'attente est supprimée car elle coûte trop cher à l'Etat.
A son arrivée au pouvoir en 1981, la gauche va tenter de contenir le chômage.
En 1982, le Premier ministre Pierre Mauroy doit faire face à la crête des deux millions de chômeurs.
Fin 1982, l'Etat impose une baisse des prestations et une hausse des cotisations, sous menace de faillite du système.
En 1984, l'Etat instaure l'allocation spécifique de solidarité pour les chômeurs qui arrivent en fin de droits. Alors que la modernisation de l'industrie provoque des licenciements massifs et la colère des salariés des mines, de la sidérurgie et des constructions navales.
En 1986, nouvelle alternance, nouvelles promesses, nouvelles déconvenues. Philippe Seguin, ministre du travail déclare : "selon toute vraisemblance les créations nettes d'emplois ne suffiront pas à combler la demande d'emplois."
Sans surprise, les chômeurs et les exclus sont au cœur de la campagne des présidentielles de 1988.
Dans un discours de campagne en avril 1988, François Mitterrand s'insurge : "200 ans après la Révolution française. Après un siècle et demi de luttes sociales, va-t-on laisser ces nouveaux pauvres comme une honte sous nos yeux et notre incapacité à sauver des vies, des consciences ?"
La même année est créé le RMI , une allocation d'Etat pour les plus pauvres. Mais rien n'y fait, le cap des trois millions de chômeurs est franchi.
Plus le temps passe et moins on est indemnisé.
Juin 93, l'Unedic impose l'allocation unique dégressive. Plus le temps passe et moins on est indemnisé.
En 1998, des manifestations rejettent ce système encore en vigueur alors.
Les emplois aidés une panacée ?
Après la crise de 2008, l'Etat lance les emplois aidés. Reportage consacré aux emplois aidés, subventionnés par l'état. Le point sur ce que les économistes appellent le traitement social du chômage à travers les déclarations de politiciens.
Extrait du discours Nicolas Sarkozy : "Qu'on ne vienne pas me dire que je change de stratégie économique. J'essaie d'être pragmatique."
Une vieille recette déjà utilisée dès 1977...
Interviews de Raymond Barre, premier ministre: "Le gouvernement autorisera le recrutement à titre temporaire de 20.000 personnes, pour les affecter à des tâches à temps complet ou à temps partiel, dans des secteurs prioritaires."
Et en 1984 lorsque Laurent Fabius, alors Premier ministre lance les TUC, plutôt orientés vers les jeunes : "Ce n'est pas une solution miracle les TUC, mais ça permet aux jeunes de cesser l'inactivité qui est plus dure que tout."
En 1997, Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité adopte les emplois jeunes : "Nous allons inventer des réponses aux besoins des gens, accompagner les enfants après l'école, accroître la sécurité dans les quartiers, faire en sorte que l'environnement soit plus favorable, donner des moyens de s'insérer vraiment aux personnes âgées ou handicapées. Et en faisant cela, nous allons créer 350.000 emplois pour les jeunes de la métropole."
En 2008, situation budgétaire difficile après la crise économique, la droite est divisée quant au recours à ces emplois aidés. C'est ce que signale le Premier ministre François Fillon, en déplacement à la Martinique, où il réfute l'utilité de ces contrats aidés ici ou en métropole : "Sur le long terme, c'est un modèle économique qui n'a aucune chance de réussir. Ce n'est pas en multipliant les emplois aidés et en multipliant la dépense publique que nous pourrons donner à la Martinique une économie adulte, autonome. Ce qui est vrai pour la Martinique, est vrai naturellement pour l'ensemble de la métropole."
El les syndicats sont pour une fois d'accord avec cette position : Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT, constate concernant les contrats aidés: "Nous savons par expérience que ce ne sont pas des emplois durables. Ça ne peut pas être la réponse adaptée à la situation."
Les chiffres du chômage pour 2018
Selon les chiffres de l'Insee
En moyenne sur le deuxième trimestre 2018, le taux de chômage était de 9,1 % de la population active en France (hors Mayotte), après 9,2 % au premier trimestre 2018. En France métropolitaine, le nombre de chômeurs était de 2,5 millions de personnes.
La crise de la Covid-19 a fait bondir le nombre de demandeurs d'emploi à 22,6% en avril 2020. Le nombre de personnes concernées en catégorie A en France (hors Mayotte) atteint 4,6 millions. Du jamais vu. Cette hausse s’explique aux trois-quarts par un transfert de demandeurs d’emploi en activité professionnelle réduite vers la catégorie de ceux n’ayant exercé aucune activité.
Pour aller plus loin
Le chômage des jeunes
Jacques Chirac à propos du chômage des jeunes en 1967.
Focus sur le chômage des jeunes et les mesures prises en leur faveur de 1977 à 1997. Retour en images sur l'histoire des mesures en faveur de l'emploi des jeunes depuis la politique de Raymond Barre en 1977 jusqu'au CPE, en passant par les emplois jeunes mis en place en 1997 par Martine Aubry.
André Bergeron extension des allocations des Assedic. pense qu'il faut s'efforcer de prendre des dispositions pour replacer les chômeurs, il se réserve quant à la création de "l'Agence Nationale Pour l'Emploi" et revient sur la nécessité de faire des efforts considérables en termes de formation professionnelle.
Géopolis : naissance du chômeur indemnisé. Rétrospective à l'aide d'un montage d'archives, de la situation économique en France, dans les années 1960 caractérisée par le plus faible taux de chômage en Europe, la création de l'UNEDIC et de l'ANPE puis l'arrivée de main-d'œuvre immigrée.