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1994, un vidéaste amateur dévoile le mensonge de CRS à Amiens

1994, un vidéaste amateur dévoile le mensonge de CRS à Amiens

Une affaire de violences policières filmées par une caméra de sécurité relance l'intérêt des images amateur dans le cadre d'enquêtes impliquant la police. En 1994 déjà, une vidéo avait permis de donner raison à des habitants d'Amiens contre des CRS.


Par la rédaction de l'INA - Publié le 24.11.2020 - Mis à jour le 27.11.2020
 

Le texte de loi controversé sur la "sécurité globale" a été adopté ce mardi à l’Assemblée nationale. Cette proposition de loi ne fait pas l'unanimité pourtant, les images amateur peuvent être utiles dans les enquêtes impliquant la police.La proposition de loi doit permettre de sanctionner la diffusion malveillante d’images de policiers, notamment lors de manifestations. Elle ne fait pas l'unanimité dans l'hémicycle, certains opposants dénonçant même un texte "liberticide". En effet, certaines images captées par des particuliers ont parfois permis de rétablir la vérité sur certaines affaires impliquant des forces de l'ordre. A l'exemple de cette affaire amiénoise.

Le 16 novembre 1994, dans le journal de 13h00, Daniel Bilalian diffusait un sujet dans lequel un vidéaste amateur avait dévoilé les mensonges d'une compagnie de CRS concernant une intervention qui avait tourné à l'affrontement. L'affaire s'était déroulée à Amiens, dans la cité de la Briquetterie, située dans le quartier Nord de la ville.

Daniel Bilalian lance ainsi son sujet : "le préfet de la Somme avouait hier soir avoir été trompé par un rapport des CRS sur l'origine des incidents de ce weekend entre jeunes d'une cité harki et la police… Sur la foi d'un rapport des policiers, le préfet avait d'abord assuré qu'il n'y avait eu aucune action des CRS, samedi soir, dans un local où avait lieu un anniversaire. Hier, une bande vidéo amateur est venue lui prouver exactement le contraire."

Le reportage réalisé sur place décrit les protagonistes de ce fait divers. Les habitants s'avouent soulagés "car depuis le début de l'affaire, ils étaient nombreux dans la cité à protester contre l'intervention d'une demie brigade de CRS, samedi soir, lors d'une fête organisée par les plus jeunes du quartier. Et lorsqu'ils sont allés se plaindre à la préfecture, on ne les a pas crus", précise le journaliste.

Avant la sortie de la vidéo, Michel Desmet, le préfet de la Somme, affirmait devant les caméras, "j'ai entendu dire, je dois dire, sur la présence, et soi-disant, les actions des CRS, beaucoup d'accusations qui me paraissent relever du roman pur et simple".

Mais le film amateur d'un habitant du quartier change la donne. De sa fenêtre, il filme l'intervention musclée des CRS. "Un document qui permet d'entendre l'explosion des gaz lacrymogènes et de voir les jeunes évacuer le local devant les forces de l'ordre".

C'est avec ce film que dès le lundi, les mères du quartier se rendent à la préfecture pour se faire entendre du préfet. "Difficile alors de ne pas reconnaître l'intervention des CRS", souligne le commentaire.

Face aux médias, le préfet fait volte-face et confirme l'intervention de la compagnie, "apparemment sans raison et dans des conditions qui sont parfaitement contraire aux instructions qu'ils avaient". Il poursuit, "j'ai été extrêmement choqué, extrêmement choqué".

Nouredine Gaham, un habitant de la cité déclare alors qu'il est satisfait que "pour une fois au moins on reconnaisse la vérité. A croire qu'il vit dans un autre monde [le préfet] et qu'il ne se rend pas compte de la réalité. Moi, à plusieurs reprises, j'avais déjà dit à la préfecture et aux autorités ce qui se passait avec les CRS, et ce qui se passe avec les autorités policières sur le quartier, au niveau de la justice. Et on croyait qu'on parlait à un mur".

Ce matin-là, le quartier avait retrouvé le calme et les trois personnes gardées à vue avaient été relâchées. L'auteur de la vidéo, lui, faisait figure de héros local et s'exhibait avec fierté devant les objectifs des journalistes, sa caméra amateur au point.

Bien que le texte présenté par La République en marche (LRM) et son allié Agir ait été adopté, et notamment son article 24, sujet à contestation, il devra encore repasser au Sénat en janvier, avant d'être voté à l'Assemblée nationale définitivement. L'article 24 prévoit de pénaliser d'un an de prison et de 45.000 euros d'amende la diffusion de "l'image du visage ou tout autre élément d'identification" d'un policier ou d'un gendarme en intervention - hors numéro de matricule - lorsque celle-ci a pour but de porter "atteinte à son intégrité physique ou psychique".


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