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1982 : la «finlandisation», la neutralité très particulière de la Finlande

1982 : la «finlandisation», la neutralité très particulière de la Finlande

Après des décennies à l’écart des alliances militaires, la Finlande a annoncé, dimanche 15 mai, sa candidature à l’OTAN, une candidature qu'à également posée dans la foulée la Suède, pays également neutre. Durant la Guerre Froide, la place de la Finlande, en équilibre entre Occident et URSS, a été si particulière qu'on a parlé pour définir cette politique de «finlandisation». Que recouvre exactement ce terme ? Réponse avec le reportage du journaliste d'Antenne 2 Maurice Werther.

Par Cyrille Beyer - Publié le 16.05.2022 - Mis à jour le 17.05.2022
La finlandisation - 1982 - 04:55 - vidéo
 

La Finlande et la Suède ont ouvert la voie dimanche 15 mai à une candidature à l’OTAN, mettant fin à une longue tradition de neutralité pour ces deux pays nordiques.

Pour la Finlande, l’adhésion à l’OTAN serait un bouleversement de sa politique étrangère encore plus important, rompant définitivement avec le concept de la « finlandisation » qui a caractérisé sa relation avec l’URSS depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Pour mieux comprendre ce terme, et la situation particulière de la Finlande, entre économie et système politique résolument occidentales, et relations diplomatiques conciliantes avec l’URSS, nous avons retrouvé un reportage du journaliste spécialiste des questions internationales Maurice Werther, diffusé le 23 janvier 1982 sur Antenne 2.

Le sujet commence par rappeler la douloureuse histoire de la Finlande, en guerre à deux reprises entre 1939 et 1944 contre son puissant voisin soviétique. Battus contre un ennemi bien plus nombreux et armé qu’eux, les Finlandais « en ont gardé des souvenirs dont ils ont voulu tirer les leçons », explique Maurice Werther, avant de donner la parole au professeur Maarit Miinilhot : « Après la Deuxième Guerre mondiale, on a tous compris [en Finlande, NDLR] qu'il fallait avoir une coexistence pacifique, et qu'il faut être ami avec un grand pays comme l'URSS. »

Un statut à part

C’est une question essentielle dans la compréhension de ce qu’est la finlandisation. Le pays n’a pas eu véritablement le choix. Pour vivre en paix aux côtés d’un si puissant voisin, qui avait en outre asservi tous les autres pays européens avec lesquels il partageait une frontière (démocraties populaires membres du pacte de Varsovie), la Finlande a dû concéder à Moscou de ne pas s’engager dans l’alliance militaire occidentale à laquelle sa situation géographique, son économie et son histoire lui donnaient légitimement droit. « Et ce, explique Maurice Werther, depuis que en 1948 le président finlandais Juho Kusti Paasikivi a signé à Moscou un traité d'amitié et de coopération avec l'URSS de M.Molotov et sous l'oeil bienveillant de Staline. Ce traité reconnaît la souveraineté et l'indépendance de la Finlande, à condition qu'elle se conduise de façon strictement neutre et surtout pas de manière hostile à l'égard de l'URSS. »

Une relation dont la Finlande a su tirer profit, selon le Professeur Klaus Tornuud, de l’université d'Helsinki : « Je crois que la Finlande et l'Union soviétique ont dû travailler ensemble pour établir une bonne relation entre elles après la Deuxième Guerre mondiale, en tout cas du côté finlandais, ceci a été une chose extrêmement importante, et on a réussi à parvenir à un niveau de stabilité et de confiance mutuelle entre [les deux pays]. »

Mais, se demande encore Maurice Werther, « qu’est ce qui assure à la Finlande qui a 1267 km de frontière avec l'URSS son statut privilégié ? » La réponse est géopolitique : « C'est la situation en Europe du Nord, différente de l'Europe centrale, explique le journaliste dans son commentaire. Il y a un équilibre dû à la neutralité de la Suède, et aussi au fait que la Norvège membre de l'OTAN n'a pas de base américaine sur son territoire. Si les choses changeaient pour la Finlande, elles risqueraient de changer aussi pour la Suède et la Norvège. »

En conclusion de son reportage, Maurice Werther rappelle que la finlandisation n’est synonyme aucunement de satellisation, tant les Finlandais ont réussi à tirer parti de la situation : «Les Finlandais ont pris l'habitude de vivre en paix sans inquiétude à côté de l'URSS. Mais ce qui les irrite, c'est le sens qu'à l'Ouest on donne au mot finlandisation, presque synonyme de satellisation. Or la Finlande est une démocratie occidentale, comme la Suède, la France, ou l'Angleterre, et à sa liberté politique correspond une liberté économique, y compris dans les échanges avec l'URSS. »

Rupture avec des décennies de relations avec le puissant voisin russe, l’annonce de la candidature de la Finlande à L’OTAN, conséquence directe de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, doit encore obtenir l’aval de la Turquie, seul pays membre de l’OTAN à s’être montré critique vis-à-vis de cette candidature.

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