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1969, sur le tournage du film "Le clan des Siciliens"

1969, sur le tournage du film "Le clan des Siciliens"

France3 diffuse ce lundi un film culte d'Henri Verneuil, "Le clan des Siciliens". Découvrons les coulisses du film et partons à la rencontre du prestigieux casting regroupant Jean Gabin, Lino Ventura et Alain Delon.


Par la rédaction de l'INA - Publié le 27.02.2019 - Mis à jour le 28.02.2019
 
Le clan des Siciliens est un film culte d'Henri Verneuil tourné et sorti en 1969. Découvrons les coulisses du film et partons à la rencontre du prestigieux casting regroupant trois monstres sacrés du cinéma hexagonal, Jean Gabin, Lino Ventura et Alain Delon.

Aux studios de Joinville, en juillet 1969, Jean Verneuil donnait les derniers coups de manivelle de son film Le clan des Siciliens. Un long métrage  tourné en français et en anglais et qui allait sortir en salle le 5 décembre 1969. C'est la seule et unique fois que le trio Jean Gabin, Lino Ventura et Alain Delon serait réuni à l'écran.

Le synopsis

Vittorio Malanese (Jean Gabin), chef du clan des Siciliens, organise l'évasion du truand Roger Sartet (Alain Delon) pour l'aider à réaliser un audacieux hold-up. Lino Ventura interprète le commissaire Le Goff et Irina Demick, Jeanne Manalese.

"Pour faire du cinéma, il faut trois choses : primo, une bonne histoire, secundo une bonne histoire, et tertio une bonne histoire."

Pas facile de réunir trois monstres sacrés du cinéma dans un même film. Interrogé sur cette problématique pendant le tournage, Lino Ventura répond que "ce qui est primordial, c'est l'histoire et pas les comédiens" Il cite une phrase que lui avait dite Jean Gabin, son mentor, à ses débuts : "Rappelle-toi que pour faire du cinéma il faut trois choses : primo, une bonne histoire, secundo une bonne histoire, et tertio une bonne histoire."

Jean Gabin justement. Depuis leur première rencontre, il sont devenus de grands amis. Dans son complet de mafioso sicilien, chapeau sombre sur la tête et lunettes teintées, l'acteur raconte sa découverte de Lino Ventura sur le tournage de Touchez pas au Grisbi de Jean Becker. A ce moment-là, il pensait déjà que le petit nouveau du cinéma français ferait une belle carrière : "J'avais vu l'essai qu'il avait fait. Becker me l'avait montré et j'avais trouvé cet essai extraordinaire. Je trouvais qu'il avait une présence terrible, une personnalité terrible… et je demande : "mais qui c'est ce gars-là ? Où tu as déniché ce gars-là ?" Eh bien, il me dit "c'est un catcheur !" Je lui dis "Il a une sacrée personnalité." C'est comme ça que Lino a commencé à faire du cinéma et depuis nous sommes restés de très grands amis."

"Faut être touché des dieux pour avoir ça..."

Nous assistons ensuite à la répétition d'une scène entre les deux compères. Attentifs aux suggestions d'Henri Verneuil, ils s'adaptent à ses suggestions avec concentration.

Pour expliquer le charisme de l'ancien catcheur à l'écran, Jean Gabin poursuit affirmatif : "Vous savez au cinéma, la présence ça ne s'explique pas. Vous pouvez avoir des gens qui ont énormément de talent mais qui, hélas, n'ont ni la présence, ni la personnalité… comme on dit : faut être touché des dieux pour avoir ça. Mais ça ne s'apprend pas.

Plus tard, Lino Ventura, interrogé sur le métier d'acteur confirme que "c'est un métier très envahissant… oui c'est un métier ! "

inavideo

L'histoire des paluches...

La caméra surprend ensuite une discussion "épineuse" entre Jean Gabin et Henri Verneuil à propos du maquillage. L'acteur plaisante avec la maquilleuse sur ses mains qu'elle s'apprête à maquiller et s'adresse au réalisateur qui se trouve hors champ : "l'histoire des paluches. Tu sais pourquoi j'aime pas ça ? Mais non, ça n'abîme pas du tout la peau, mais avec votre connerie de couleur maintenant, puisque vous voulez faire de la couleur, ben, dis-toi bien que ça marque sur les fringues ! Avant, les gars avaient un peu de maquillage, ça ne se voyait pas. Avec la couleur c'est terrible, les manchettes, le col et tout… Si j'ai les paluches faites, que je les mets dans ma poche, si j'en mets sur le costard, ben ça va se voir ! " Avec son franc-parler habituel, il conclue : "C'est pour ça que ça m'emmerde ! Le reste, je m'en fous tu penses."

Irina Demick, une "popote" devenue "vamp"

La touche féminine, c'est Irina Demick qui l'incarne. A l'occasion de la sortie du film, en décembre 1969, en compagnie d'Henri Verneuil, ils évoquent le film en compagnie de Georges de Caunes qui avoue ne pas avoir vu le long métrage, en reprochant discrètement de ne pas avoir été invité à la projection... Dans le film, Irina joue une femme fatale. Elle confie que ce rôle est loin de sa personnalité plutôt "popote". Georges de Caunes lui demande si le cinéma "c'est une forme de défoulement" pour elle.  Elle lui répond que "c'est une passion."

"Le cinéma doit être le moins bavard possible..."

Georges de Caunes reprend ensuite des critiques faites au film. On accuse Henri Verneuil de faire ses films en pensant au public anglo-saxon.  Il réfute cette accusation et estime être avant tout un conteur. Georges de Caunes lui reproche ensuite d'avoir fait un film violent – alors qu'il avoue ne pas l'avoir vu – le cinéaste lui rétorque que c'est une histoire à suspens.

Il aborde ensuite la question de la violence du film et déclare que ce qui l'a animé, c'est une volonté d'être en réaction à un cinéma trop universitaire, un cinéma parfois trop bavard et donneur de leçon. Son objectif à lui c'est d'offrir un divertissement : "Le cinéma doit être le moins bavard possible et non seulement cela, essayer de ne pas transformer le cinéma et le spectacle, en général, en une vaste université à laquelle on dirait : "venez voir, on va vous montrer un film. Vous allez vous pencher sur le problème des vieux, vous allez vous pencher sur le problème des jeunes, vous allez vous pencher sur le problème de la guerre du Vietnam… ça devient vraiment une université, alors moi, j'ai envie de planter un grand tréteau au milieu de cette université et de dire entrez, entrez et venez voir Jean Gabin, Alain Delon et Lino Ventura. On va vous donner en prime Irina Demick. Vous allez voir l'évasion la plus extraordinaire qui existe et le hold-up… Vous comprenez ? C'est une espèce de réaction. Pendant deux heures, venez vous détendre.

A propos du bavardage dans les films, le réalisateur propose sa propre analyse : "On a envie à un certain public de lui donner l'impression qu'il pense et ce public marche. Ils ont l'impression de comprendre des choses très profondes alors que c'est du niveau du certificat d'études."

Malgré ces critiques, le film a connu un immense succès populaire à sa sortie avec plus de 4 800 000 de spectateurs, le classant juste derrière Il était une fois dans l'Ouest de Sergio Leone et Le Cerveau qui réunissait Jean-Paul Belmondo, David Niven et Bourvil.

Les petits plus du film

Pour la petite histoire, l'une des scènes les plus époustouflantes, c'est le détournement d'un DC-8 chargé d'une très précieuse collection de bijoux, suivi de son atterrissage sur une autoroute. Pour la réaliser, Henri Verneuil a tourné la scène de l'approche à partir d'un avion léger qui s'est véritablement posé sur une portion d'autoroute en construction.

Autre atout de ce film, la bande originale du film, signée par Ennio Morricone

Pour ce film, le compositeur a utilisé les tonalités très dramatiques d'un orchestre à cordes mais les a mêlées à des sonorités décalées, utilisant un sifflet ou une guimbarde, qui accompagnent de manière récurrente le personnage incarné par Jean Gabin.

Pour aller plus loin

Sortie régionale du film "Le clan des Siciliens". Interviews d'Henri Verneuil et Lino Ventura. (16 décembre 1969)

Bouillon de culture : Alain Delon sur le métier d'acteur. Ce qui distingue un comédien d'un acteur comme l'étaient Jean Gabin ou Lino Ventura. "Le comédien interprète, l'acteur vit."  (mars 1996) 

Pour le cinéma : Lino Ventura évoque les choix menant sa carrière (juin 1969) 

Jean Gabin sur le tournage du film de Denys de la Patellière, Le tueur : ses rôles, la liberté du cinéma, la censure à la télé, son mauvais caractère… (reportage de 1971)

Inter actualités de 13H00 : sortie du film. Interview d'Henri Verneuil, sur ses méthodes de travail, le problème des films dits "commerciaux"; interview du commissaire Honoré Gévaudan, sous-directeur des Affaires criminelles, sur les enquêtes policières au cinéma et le décalage avec les activités réelles de la police; interview d'Auguste Le Breton, écrivain, qui donne son avis sur l'adaptation de son roman et interview de Lino Ventura sur ses impressions personnelles après le tournage du film et ses rapports avec les autres comédiens du film (4 décembre 1969, audio)

                                                                                                                                                                                                                       Florence Dartois (INA)


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