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Du virtuel au réel, l'intelligence artificielle s'empare de l'art

Du virtuel au réel, l'intelligence artificielle s'empare de l'art

La capacité du logiciel ChatGPT à écrire une chanson ou un roman peut-elle être comparée à de l'art ? L'intelligence artificielle est-elle dotée d'une âme d'artiste ? Depuis l'avènement de l'informatique, cette question se pose mais il ne faut pas oublier que derrière chaque intelligence artificielle se cache un humain créatif. À quand le robot à l'âme d'artiste ?

 

Par Florence Dartois - Publié le 03.04.2018 - Mis à jour le 18.01.2023
 

L'ACTU.

Depuis l'avènement de l'informatique, des artistes cherchent à associer les machines à leurs créations. L'intelligence artificielle, qui bouleverse le quotidien ou le travail, tend-elle à devenir un artiste à part entière ? Des robots de plus en plus performants et des intelligences artificielles ultra puissantes commencent à générer une nouvelle forme d'art, un univers infini de formes et de nouveaux paradigmes. En octobre 2018, Christie's à New York mettait en vente un tableau créé par un algorithme. Plus récemment, en août 2022, l'artiste Jason M. Allen proposait lors d'un concours d'art trois tableaux réalisés au moyen de l'intelligence artificielle Midjourney, un algorithme qui permet la création de visuels à partir de mots, de requêtes ou de groupes de mots. L'une des trois œuvres, Théâtre d'opéra spatial, a remporté le grand prix.

De simple assistant numérique, l'intelligence artificielle s'est emparée de l'art pour créer ses propres œuvres. À l'avenir, elle devrait devenir de plus en plus autonome et interactive. Les archives présentées dans cet article invitent à revisiter la collaboration homme-machine ou artiste-logiciel et d'assister, en images, à la naissance d'un nouvel art.

LES ARCHIVES.

L'archive en tête d'article relate le travail d'un jeune programmateur hollandais, Lambert Meertens qui, en mai 1971, présentait un morceau qu'il avait composé par ordinateur. Il l'avouait, le résultat obtenu avait dépassé ses espérances au moment de la restitution de la partition par le quatuor à cordes. Il partageait sa réflexion sur la notion d'inspiration artistique et l'apport de l'informatique dans cette création : « Vous savez, je ne sais pas ce que veut dire le mot inspiration. Les musiciens l'emploient, mais j'ignore le sens qu'ils lui attribuent et je pense qu'ils l'ignorent aussi. Ce n'est pas la première fois que je fais de la musique avec un ordinateur (…) mais le résultat n'était pas ce que j'attendais ! » Le jeune informaticien avouait son étonnement : « je pensais même obtenir une musique assez horrible à écouter ».

La peinture numérique

L'archive ci-dessous nous décrit une autre expérience réalisée par l'artiste peintre Vera Molnar en 1981. Elle aussi se lançait déjà dans la création assistée par informatique. Dans cette interview, elle partageait sa vision de la relation idéale entre artiste et ordinateur : « l'attitude romantique de l'artiste, l'intuition, est en contradiction avec l'ordinateur », reconnaissait-elle néanmoins, avouant que l'un de ses rêves serait de « créer un robot qui travaillera toutes les nuits comme un esclave » en exécutant tous les ordres qu'elle lui donnerait. Elle n'imaginait pas encore que cette intelligence artificielle puisse réaliser une œuvre personnelle, mais plutôt qu'elle stockerait dans sa mémoire toutes ses créations passées et ferait « une liste des choses » qu'elle n'aurait pas encore réalisées. Une sorte de pense-bête numérique en somme.

Dans son atelier « High-Tech », où les imprimantes crépitaient sans discontinuer, Vera Molnar expliquait ensuite l'apport de l'ordinateur, permettant notamment d'enrichir la recherche scientifique dans le domaine de l'art pictural.

L'apport de l'ordinateur dans la peinture
1981 - 01:30 - vidéo

« Grâce à cet instrument, on va pouvoir faire de la recherche quasi scientifique dans le domaine de l'art »

Et voilà à quoi ressemblait un tableau conçu par ordinateur dans son atelier :

Tableau composé par ordinateur
1981 - 01:06 - vidéo

Sur scène aussi !

Peintres numériques, mais aussi musiciens et danseurs. Pour se mouvoir, les intelligences artificielles ont besoin d'un corps et les robots savent de mieux en mieux l'utiliser au profit de l'art. Découvrez-ci-dessous l'exemple des robots musicaux de Chico MacMurtie. L'archive date de 2001 et à l'époque, ces danseurs mêlant technologie et sculpture suscitaient à la fois l'amusement et la frayeur. Quant à l'artiste, il devenait aussi un peu ingénieur. En tout cas, entre gestes et mouvements, « le bruit des appareillages » devenait « musique », mais ils ne laissaient pas indifférents !

Il est aussi possible de les voir en concert comme n'importe quel musicien humain ! En 2004, les robots s'emparaient de l'Aéronef à Lille. Ils interprétaient un titre de circonstance, Armageddon, dans une opérette spectaculaire.

Et au théâtre aussi, des humains jouent parfois avec des robots. L'archive ci-dessous nous transporte en 2009, près de Lausanne, lors d'une première mondiale. Jamais encore, on n'avait vu des robots devenir acteurs de théâtre. Et l'expérience allait s'avérer assez coûteuse : 550 000 euros pour monter le spectacle.

Que pensait la comédienne Laurence Iseli de ses partenaires étonnants ? « On est tous en train de retenir notre respiration parce que c'est une machine. Il y a une espèce d'appréhension de la machine. Quelque chose qu'on maîtrise et qu'on ne maîtrise pas non plus. Et on ne sait pas très bien ce qui va se passer. Il y a toujours ce temps suspendu, ce miracle : "Ah c'est bon, il a fait son parcours" ». Quant au public, il était mitigé : « Il se crée quelque chose. Une humanité entre les deux. », déclarait l'un d'eux.

Artiste ou faussaire ?

Un jour, peut-être mettra-t-on sous les verrous un faussaire robotique… En attendant, une copie en 3D de la statue la Vierge à l'enfant de Poligny a été réalisée dans le Maine-et-Loire en 2017. Un projet unique. Faute de financement suffisant pour payer un sculpteur, l'association de sauvegarde du patrimoine polinois avait demandé à l'entreprise Lithias, spécialisée dans la reproduction en 3D, de numériser la statue originale à New York. Piloté par des programmes informatiques, le robot pourrait travailler en continu de plus en plus précisément pour reproduire une copie parfaite avec une précision de 30 microns.

Pour aller plus loin

La recherche musicale à l'IRCAM (1985).

Scopitone : installations robotiques du festival (2003).

Lyon : exposition de robots. Une trentaine de robots ont investi la Sucrière pour illustrer la façon dont la révolution robotique, ou robolution, va non seulement transformer notre quotidien, mais aussi celui des expositions, la lecture des œuvres et la démarche des artistes. (2013).

Gros plan sur le robot sculpteur de pierre de l'atelier Lithias, à Cluny (Saône-et-Loire). Le robot est utilisé pour répliquer ou réparer certaines statues de la célèbre Abbaye de Cluny (2014)

Petite visite des innovations présentées au festival des arts numériques de Nantes "Scopitone". (vidéo, 2014)

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