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4 juin 1908 : l'entrée d'Emile Zola au Panthéon

4 juin 1908 : l'entrée d'Emile Zola au Panthéon

Le 2 avril 1840 naissait Emile Zola. Cet écrivain et journaliste, considéré comme le chef de file du naturalisme, marqua son siècle. Il bénéficia d'une cérémonie officielle au Panthéon le 4 juin 1908, six ans après son décès. Un événement suivi par des milliers de Parisiens. Retour sur cette journée historique.


Par la rédaction de l'INA - Publié le 31.05.2018 - Mis à jour le 01.04.2020
 

Le 4 juin 1908, après plusieurs années de querelles politiques, les cendres d'Emile Zola étaient transférées au Panthéon. La cérémonie officielle fut marquée par la tentative d'assassinat d'Alfred Dreyfus que l'écrivain avait grandement contribué à réhabiliter avec son célèbre texte intitulé J'accuse

L'écrivain, journaliste et pamphlétaire Emile Zola a disparu accidentellement le 9 septembre 1902 à son domicile du 9e arrondissement de Paris. A la suite d'émanations toxiques produites par sa cheminée. 

Une cérémonie solennelle

C’est donc sous un soleil rayonnant que la cérémonie officielle qui doit consacrer la "Panthéonisation" d’Émile Zola se déroule ce 4 juin 1908.

Le cercueil de l’écrivain repose dans la nef centrale du monument, posé sur une immense pyramide. Parmi les personnalités présentes on compte Armand Fallières, le Président de la République, à ses côtés se trouve Georges Clemenceau, le chef du gouvernement. La solennité de l'hommage est accentuée par La Marseillaise puis le prélude du Messidor d’Alfred Bruneau et la Marche funèbre de Beethoven qui résonnent dans la nef. Gaston Doumergue conclue la cérémonie par un discours l’héroïsme de l’auteur de "J’accuse".

Un incident inattendu

Alors que la cérémonie est sur le point de s’achever, l'assistance entend deux coups de feu retentir. Quelqu'un vient de tirer sur Alfred Dreyfus qui, ne sera que légèrement blessé au bras. L’auteur de l’attentat, un certain Grigori, est rapidement arrêté. Il est journaliste au journal Le Gaulois. Il déclare n’avoir pu supporter l’humiliation infligée à l’armée française. Son geste fait écho aux cris des manifestants nationalistes qui encerclaient le Panthéon depuis la veille et tentaient d’empêcher la cérémonie. Rapidement jugé, il sera acquitté.

Retour sur un débat tendu à l'Assemblée nationale

Si la décision de transférer les cendres d’Émile Zola au Panthéon a été prise par la Chambre des députés dès le 13 juillet 1906 (par 316 voix contre 165), au lendemain de l’annulation par la Cour de cassation du jugement condamnant Alfred Dreyfus, la cérémonie n'a été organisée que deux ans plus tard, le 4 juin 1908.

Dans un contexte toujours très passionnel autour de l'affaire Dreyfus, le débat avait rebondi le 19 mars 1908, au moment où l'Assemblée discutait des crédits nécessaires au transfert des cendres. Le débat parlementaire est notamment marqué par une violente charge de Maurice Barrès à laquelle répondit avec brio Jean Jaurès : " Messieurs, on nous demande 35 000 francs pour porter Zola au Panthéon. Je crois que nous n'aurons jamais une meilleure occasion de faire des économies." Après avoir attaqué son œuvre "[…] j'ai le droit de constater, ce qui est de toute évidence, qu'il y avait chez Monsieur Zola une préoccupation basse et pornographique."  Il taxe ensuite l'auteur de "J'accuse" d'opportunisme : "Rassasié de succès de librairie, il rêvait de plus vastes triomphes. Il vit, dans une affaire qui se présentait devant lui et qui satisfaisait évidemment ses convictions, l'occasion d'entrer dans la vie active. Il disait : "Je vois la voiture, j'y monte !", et il engageait ses amis de lettres à y monter avec lui."

Jean Jaurès se lance alors dans une défense lyrique de l'écrivain avant de conclure : "La gloire de Zola, son honneur, de n'avoir pu concevoir l'art à la façon de Monsieur Barrès, comme une sorte d'étang mélancolique et trouble, mais comme un grand fleuve qui emporte avec lui tous les mélanges de la vie, toutes les audaces de la réalité."

Un autre défenseur de Zola va alors prendre la parole, en la personne de Gaston Doumergue, le ministre de l'Instruction Publique et des Beaux-Arts. Il réplique à Barrès sur le prétendu opportunisme de Zola en 1898: "D'après M. Barrès, Émile Zola a vu passer une voiture qui pouvait, croyait-il le conduire à cette popularité et il y est monté. A-t-on oublié – nos souvenirs sont plus précis – qu'à ce moment le nombre de ceux qui avaient pris place dans cette voiture était fort restreint et que celle-ci ne paraissait pas précisément conduire à la popularité ? A-t-il oublié le danger, les périls qu'il y avait à voyager ainsi ? ". Le vote donnera 356 voix pour ce projet de loi contre 164 (chiffre annoncé en séance), le résultat officiel après rectifications étant de 344 contre 144.

Pour aller plus loin

Portrait d'Emile Zola.

Retrouvez en intégralité l'évocation scénarisée radio de l'entrée des cendres d'Emile Zola au Panthéon dont sont issus les deux extraits audio que vous avez pu écouter plus haut. (Audio, 1er juin 1958) 

Les enfants du siècle : André Gillois reçoit Sennep, dessinateur qui assista à la cérémonie en 1908 et se souvient du coup de feu de Grégori contre Dreyfus. (Audio, 1949) 

Emile Zola (article) 

Zola au Panthéon : Discussion d’un projet de loi relatif à la translation des cendres d’Émile Zola au Panthéon (fichier PDF Assemblée nationale)

Florence Dartois


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