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1994, l'Ifremer cartographie la pollution des mers

1994, l'Ifremer cartographie la pollution des mers

Marseille accueille du 3 au 11 septembre le Congrès mondial de la nature. Ce dimanche, il sera beaucoup question de la protection de la mer et des océans. L'occasion de revenir sur le travail de vigie de l'Ifremer en matière de pollution des océans. Retour en 1994 lorsque l'Institut dressait déjà un constat inquiétant.

 

Par Florence Dartois - Publié le 08.04.2021 - Mis à jour le 03.09.2021
 

Le Congrès mondial de la nature se déroule cette année à Marseille. Du 3 au 11 septembre il accueillera des chefs d’Etat, ONG et simples citoyens pour la mise en œuvre de solutions pour sauver la planète. Annulé en 2020 en raison de la crise sanitaire, cet événement est organisé tous les 4 ans. Ce dimanche, il sera beaucoup question de la protection de la mer et des océans. L'occasion de revenir sur le travail de vigie de l'Ifremer en matière de pollution des océans. Retour en 1994 lorsque l'Institut dressait déjà un constat inquiétant.

En avril 2021, l'Ifremer (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer) lançait l'application "Fish&Click" pour que chacun puisse contribuer au recensement du matériel de pêche perdu en mer et sur le littoral et réduire ainsi l'impact de la pollution plastique. Elle a été développée par ses soins dans le cadre du projet Indigo. Comment y participer ? C’est très simple : lors de vos balades sur le littoral ou sorties en mer en Bretagne et Normandie, gardez l’œil et votre smartphone ouverts : si des filets, casiers, cordages, lignes, ancres, bouées se mettent en travers de votre chemin, connectez-vous sur le site web Fish & Click ou sur l’application mobile Fish & Click.

En août 1994, pour la première fois, l'Ifremer s'intéressait à ce que l'on trouvait au fond des océans. Des objets en verre, en plastique et en métal. Ces déchets qui mettront une centaine d'années à disparaître.

"Je ne m'attendais pas à autant de débris "

Dans un bateau de l'Ifremer, la prise du jour n'est pas comestible : "Un morceau de vareuse tout déchiqueté, mais aussi des bouts de plastique, des bouteilles de verre en pagaille et même un pneu usagé. On retrouve toutes sortes de déchets au fond des océans. Nous l'avons constaté lors de notre sortie en mer avec le Gwendrez, un bateau affrété par l'Ifremer, avec à son bord des chercheurs et techniciens de la station de Lorient". Durant toute la journée, il a sillonné en baie de Concarneau et au large, il a trouvé des traces de notre société de consommation. Des caméras sous-marines permettent ce jour-là d'observer la capture de ces détritus. Pas de quoi étonner les professionnels de la mer. Sur le port, un pêcheur déplore cet état de fait et fait un inventaire à la Prévert des trouvailles qu'ils remontent dans leurs filets : "Tous les jours, on ramasse des sacs poubelles, des bidons d'huile, des gazinières, des congélateurs ! C'est abominable."

C'est dans les années 70 que l'on a commencé à prendre conscience que la mer était devenue une poubelle. On a alors étudié les phénomènes de pollution des plages, on s'est intéressé aux débris flottants et on s'est rendu compte que les tortues de mer et les cétacés mouraient étouffés en avalant des sacs en plastique. Mais jamais jusqu'à présent, on avait tenté de quantifier ce qui reposait dans les fonds sous-marins au large de nos côtes. Un chercheur de la station l'Ifremer à Nantes est venu combler cette lacune. Avec le Gwendrez, un ancien bateau de pêcheurs, adapté aux besoins des scientifiques. Six campagnes océanographiques ont été menées sur tout le littoral atlantique de novembre 92 à septembre 93. Il en ressort que les quantités de détritus retrouvés au fond des océans peuvent s'avérer inquiétant si le phénomène se poursuit. D'après la cartographie établie par le chercheur nantais, c'est le golfe de Gascogne et l'estuaire de la Gironde qui sont les plus pollués. Dans une moindre mesure, la Baie de Seine et Concarneau. Mais surtout, la pollution s'accentue très nettement à la fin de l'été, après le passage des vacanciers.

François Galgani, chercheur chargé des campagnes est encore tout étonné des conclusions : "Je ne m'attendais pas à autant de débris et c'est un petit peu par hasard qu'on a trouvé ces zones. Le problème, si vous voulez, c'est que certains débris peuvent persister dans le milieu plusieurs centaines d'années et donc, avec les quantités qui arrivent chaque année la mer, on peut imaginer que dans l'avenir ce soit particulièrement grave."

Le commentaire souligne que les ports aussi sont des endroits sensibles et les plaisanciers en sont conscients. Ils ne sont pas les seuls responsables de cette situation, loin s'en faut. Un navigateur à l'accent anglais explique qu'il vit constamment en mer et la respecte "parce que c'est notre maison, c'est chez nous".

"Ce n'est pas nécessairement les choses visibles qui sont les plus polluantes"

Ce que ne quantifiait pas l'étude d'Ifremer alors, c'était les pollutions moins palpables et pourtant plus nuisibles, à l'image des dégazages de pétrolier comme le précisait le journaliste : "Saviez-vous qu'une loi du 5 juillet 1983 autorise les navires citernes à rejeter un 30 millième de leur cargaison lorsqu'ils sont éloignés à plus de 50 milles des côtes? De même, pour le transport des substances liquides en vrac, les rejets sont autorisés à plus de 12 milles des côtes et à condition que la profondeur des eaux atteigne au moins 25 mètres".

Didier Chiquet, un autre pêcheur interrogé sur le port, ajoute que malheureusement, "ce n'est pas nécessairement les choses visibles qui sont les plus polluantes. Je pense qu'il y a toutes les eaux usées qui sont rejetées dans la mer. Ce n'est pas toujours visible. Le mal que ça peut faire quoi ! Un sac poubelle ou une bouteille en verre, ça, c'est visible. Mais est-ce que c'est ce qui fait vraiment le plus de mal ? Ça je ne le pense pas".

Et le journaliste de conclure son reportage par ce constat peu encourageant : "Ajoutez à cette pollution, la surpêche. Et vous comprendrez pourquoi, en dix ans, les ressources provenant de la mer ont été divisées par dix".

Pour aller plus loin :

Le journal Provence Alpes : Toulon : opération Ifremer d'analyse de l'eau pour étudier les effets polluants des rejets urbains et la fiabilité des usines de retraitement des eaux usées. Un hélicoptère transporte un filin et une rosette chargée de bouteilles pour le prélèvement. L'eau a été analysée au laboratoire de La Garde.(16 octobre 1986)

Rennes soir : mise en service d'une péniche pour surveiller les pollutions marines. L'antenne Ifremer de Damgan vient d'être dotée d'une embarcation qui permet d'aller sur le terrain faire des prélèvements, surveiller les zones à risques pour la pollution marine. (31 août 1988)

Rennes soir : portes ouvertes à Ifremer de Brest. Découverte du Nautile qui plonge a de grandes profondeurs. (16 octobre 1992)

JT Rennes soir : Réseau de surveillance pour vérifier la qualité des eaux. Depuis 1984, l'Ifremer a mis en place un réseau de surveillance des eaux de baignade. Des prélèvements d'eau et de coquillages sont effectués toute l'année pour déceler la présence d'une algue toxique : le Dinophysis. (9 juin 1998)

20 heures le journal : Fête de la science, Ifremer. Visite des laboratoires. (16 octobre 2004)

19/20 Edition Iroise : jeunes reporters des arts, des sciences et de l'environnement. Des jeunes des écoles d'Anita Conti et de Coat Edern, participent à l'opération Jeunes reporters des arts, des sciences et de l'environnement. Ils ont pu travailler en amont avec un scientifique de l'Ifremer. (7 mai 2019)

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