A l'automne 1991, à l'appel de leur coordination nationale, les infirmiers et infirmières campent durant cinq nuits avenue de Ségur, devant le ministère de la Santé. Ils espèrent obtenir une réponse favorable à leurs revendications, déjà liées à leurs conditions de travail, leurs salaires et à leurs problèmes d'effectifs.
Le Journal 20H de Antenne 2 du 8 octobre 1991 nous entraîne sur place à la nuit tombée. Une soixantaine d'infirmières et infirmiers se sont installés sur les trottoirs face au ministère de la santé. Sur place, l'ambiance est bon enfant, les riverains apportent des provisions, certains ouvrant même leurs salles de bains aux manifestants. L'association Emmaüs est venue apporter une immense tente et des couvertures. Autre soutien de taille, celui des chefs de service et médecins. Ils soutiennent leurs équipes en signant une pétition.
"... on peut même dire que les malades sont en insécurité dans les hôpitaux français."
Rosie Médina, infirmière souligne que ce n'est pas "du camping ou du folklore" et ajoute : "Ça nous coûte beaucoup. On bosse la journée, on passe la nuit ici, on retourne bosser le lendemain, donc faut quand même qu'on nous prenne au sérieux ! On a été très gentils mais ça suffit maintenant !"
Quant à Eric Rabette, également infirmier, il précise leurs revendications, qui résonnent fortement avec celles réclamées en 2020 : "il faut créer des milliers de postes d'infirmières en France pour alléger la charge de travail et pour améliorer la qualité des soins. Les malades en ont assez de nous voir courir derrière nos chariots de médicaments, d'injections. Nous n'avons plus le temps de discuter avec eux, on peut même dire que les malades sont en insécurité dans les hôpitaux français. Dans l'hôpital où je travaille, la nuit, ma collègue a la responsabilité de 338 malades ! C'est littéralement impossible à surveiller !"
Les personnels médicaux présents prévoyaient alors un sitting illimité. Le conflit des infirmières (grèves, manifestations) allait s'étaler sur près de deux mois d'octobre à novembre 1991.
En première ligne face au coronavirus, les personnels soignants vont avoir le droit à leur grande concertation. Édouard Philippe et Olivier Véran annoncent ce lundi 25 mai aux représentants du secteur, le cadre de ce Ségur dont l’objectif est la refondation du système de santé français.
Pour aller plus loin
L'éclairage Lumni sur ces manifestations de l'automne 1991.