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1977 : rencontre avec Alice et Juliette, les jumelles de Dourdan

1977 : rencontre avec Alice et Juliette, les jumelles de Dourdan

Une hausse des naissances de jumeaux dans le monde s'observe depuis plusieurs années. La gémellité, une relation souvent fusionnelle, à l'image de ce duo de sœurs inséparables, rencontré à Dourdan en 1977.

 

Par Florence Dartois - Publié le 12.03.2021 - Mis à jour le 04.08.2023
Les jumelles - 1977 - 06:27 - vidéo
 

L'augmentation du recours à la PMA et le nombre des grossesses tardives, serait deux des explications possibles de cet envol des naissances de jumeaux. Une hypothèse avancée par les chercheurs dans la revue spécialisée Human Reproduction. « Plus de 1,6 million de paires de jumeaux naissent chaque année dans le monde », soit « près d’un bébé sur 40 », selon cette étude publiée le 11 mars 2021. Depuis trente ans, le taux des naissances de jumeaux est passé de 9,1 à 12 pour 1000 accouchements.

Le 30 octobre 1977, pour sa rubrique « La Lorgnette », diffusée dans « Dimanche Martin », Pierre Bonte se rendait à Dourdan, une petite ville située à quarante-quatre kilomètres au sud-ouest de Paris, dans le département de l’Essonne. Il vait rendez-vous avec deux demoiselles, de charmantes et inséparables jumelles de 88 ans.

Alice et Juliette Baubion vivaient dans un appartement cosy où tout se déclinait par deux : les manteaux, les chapeaux et même les figurines de chat en porcelaine… Alice et Juliette étaient de vraies jumelles nées en 1889,« l'année de l'inauguration de la tour Eiffel » précisait fièrement Juliette avant d'ajouter, « ma mère est passée dessous et deux jours après, nous naissions ! »

Le duo partageait les mêmes pensées, les mêmes goûts. Elles racontaient une anecdote concernant un procès dans lequel elles devaient témoigner… au grand dam du juge qui n'arrivait pas à les différencier : « Alors, je me suis représentée confie Alice, il en était stupéfait. » Juliette ajoutait, « c'était l'hilarité, le président et puis les avocats, oh oh, oh ! » Une belle pagaille dont l'évocation amusait toujours les sœurs.

« Nous avons trouvé même un bigame ! »

Inséparables, elles ne s'étaient jamais mariées, « et nous avons eu beaucoup de demandes » avouait malicieusement Alice, « des dentistes à Paris et même un avocat, voyez-vous. Mais nous ne pouvions pas nous séparer… » Juliette ajoutait sérieusement, « nous avons trouvé même un bigame ! Un monsieur qui était tailleur de diamants. Alors, il voulait, mais, Ah non, non !! »

Le 15 juin 1977, les jumelles avaient été invitées à l’Élysée par Valéry Giscard d'Estaing. Un événement relaté par le journal Le Monde. Alice visiblement très fière relate la rencontre d'une vie : « Nous avions la place d'honneur. Moi, j'étais à gauche du Président de la République à table. » Juliette déclare, « et moi, la présidente de la République à ma droite ».

Alice se souvenait de sa conversation avec le président à propos de son récent voyage en Égypte : « Mon président, est-ce que la présidente a bien supporté le climat ? Alors, il m'a dit : "Oui, oui." Elle lui demande ensuite s'il a été bien accueilli ? Il lui répond : « très bien accueilli, avec enthousiasme et l'on m'a bien écouté… »

« C'est la mort qui nous séparera »

Dans la rue, Pierre Bonte rejoignait les deux dames devant l'église où elles avaient été baptisées. Elles lui précisaient qu'elles étaient nées « le 12 mai et nous avons été baptisées le 14 mai ».

Alice et Juliette étaient aussi des pianistes émérites dans leur jeunesse, « nous jouions du piano, toujours à quatre mains… », leur piano avait dû être vendu et elles repensaient à cette époque avec nostalgie : « Quand nous sommes revenues de la guerre de 18, nous n'avions pas d'argent… oh nous avons pleuré ! C'était notre passion ! C'était la musique. Oh le piano ! Et la danse… Et la danse… Et la danse… Oh, ce que nous avons pu danser ! »

De retour à leur domicile Pierre Bonte remarquait que tout était en double chez elle : les chaises, les lits, les bijoux… « et nous couchons ensemble… ». « Dans le même lit ? » interrogeait le journaliste. En chœur, elles acquiesçaient, « Ah toujours, toujours. Mais nous ne nous sommes jamais quittées monsieur, précisait Alice, nous couchons ensemble, pourtant nous avons des lits individuels ». Elle réaffirmait avec force : « Nous ne nous sommes jamais quittées ! Jamais ! Nous nous quitterons à la mort, évidemment. C'est la mort qui nous séparera. Nous ne demandons qu'une chose monsieur, c'est de mourir ensemble. » Juliette abondait dans son sens, « ça serait bien ! Disparaître le même jour, ce serait parfait… la main dans la main. Parce que celle qui resterait monsieur, elle serait malheureuse, elle mourrait d'ennui ».

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