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1965 : une brigade «anti gel» à la rescousse des vignes du Gard

1965 : une brigade «anti gel» à la rescousse des vignes du Gard

Du 22 au 24 avril, il devrait geler dans l'est de la France. Le réchauffement climatique apportant un printemps précoce, les cultures sont d'autant plus menacées par un épisode de gel tardif comme celui-ci. Parmi les méthodes utilisées pour protéger les cultures, il y a la fumée, adoptée par ces viticulteurs gardois.

Par Florence Dartois - Publié le 07.04.2021 - Mis à jour le 22.04.2024
Syndic anti gel des vignerons - 1965 - 04:24 - vidéo
 

En cette fin avril, la France connait à nouveau un descente d'air froid. Un phénomène qui pourrait dans certaines régions entraîner des températures largement au-dessous de zéro. Cette baisse du thermomètre met en péril les cultures maraîchères, les arbres fruitiers déjà en fleurs et les vignes bourgeonnantes.

Pour les vignerons, le gel est synonyme de catastrophe, mais certaines méthodes ancestrales sont toujours utilisées pour empêcher la température de tomber trop bas, à l'image des bougies allumées toute la nuit dans les cépages. Mais d'autres utilisent la technique de la fumigation. C'était déjà le cas en 1965, à Calvisson, une bourgade du Gard située entre Nîmes et Montpellier, au milieu de la garrigue Gardoise, une technique à découvrir dans l'archive en tête d'article.

Dans la région, les viticulteurs s'étaient organisés en brigade « anti-gel » très réactive comme le montre ce reportage du 13 mai 1965 réalisé par Provence Actualités. Le froid tardif était un phénomène déjà bien connu des exploitants qui mettaient « en branle tout un dispositif anti-gel » , avec le déploiement d'une brigade d'enfumage des parcelles. Sur place, avec une production annuelle de 160 000 hectolitres de vin, l'enjeu était de taille. Chaque nuit à risque, un veilleur surveillait le thermomètre. Ce jour-là, il confirmait les craintes : « Risque de gel - danger ».

Nous retrouvons l'escouade au petit matin. L'état-major du syndicat était venu au complet prendre connaissance des dernières précisions. La tension était grande autour du président du comité au moment du déclenchement de l'alerte générale : « Alors, on est tous d'accord pour faire des émissions de fumée ? Bon ! Alors je vous demander à chacun d'aller à vos postes, et souhaitons qu'il ne gèle pas ! »

Précautionneux, il leur demandait de vérifier qu'ils étaient bien munis de lampes électriques, « parce que quelquefois on ne voit rien ». Déjà la troupe se dispersait sous le cri strident de la sirène. Le président l'affirmait face caméra : « La situation est très, très grave ! »

Dans les parcelles, les vignobles se couvraient « d'une épaisse fumée blanche ». Pour cette fois la catastrophe était évitée.

Un duo meurtrier

Plus tard, dans son vignoble, le président répondait à une interview. Derrière lui, une énorme machine enfumait encore sa parcelle, l'homme était grave : « S'il y a danger, c'est notre ruine générale ! C'est la raison pour laquelle nous faisons de la fumée. »

Le chef de brigade expliquait ensuite que le syndicat intercommunal s'était formé 18 ans plus tôt et en détaillait le fonctionnement, il soulignait son importance : « Auparavant, nous n'avions pas de fumée et nous étions gelés rapidement. Et le matin, nous arrivions devant des vignes anéanties. »

Avec cette méthode préventive, les vignerons locaux parvenaient à sauver les récoltes jusqu'à – 4°c. Dans la suite du reportage, l'exploitant viticole décrivait le rôle joué par la fumée qui permettait « d'atténuer les rayons du Soleil. Parce que ce n'est pas la gelée qui grille les bourgeons », poursuivait-il, « ce sont les rayons de Soleil lorsqu'ils arrivent sur les souches qui grillent ces bourgeons ».

La collectivité possédait alors onze appareils. Huit d'entre eux, provenant de matériel américain, issu des surplus de l'armée américaine en Algérie. Ils avaient été rachetés par les viticulteurs, puis modifiés pour le service agricole. Le président expliquait que l'émission de fumée pouvait durer jusqu'à dix heures d'affilée, en fonction des températures. Seule circonstance aggravante : le vent. « Quand il y a du vent, on arrête car il emporte la fumée, ça ne sert à rien» .

Pour aller plus loin :

Magazine agricole : la machine à lutter contre le gel présentée au salon de l'agriculture. (12 mars 1965)

Le saviez-vous ? On peut aussi lutter contre le gel en aspergeant les vignes d'eau…

A la bonne heure : les retenues d'eau de chablis. Reportage sur un projet de construction de station de pompage pour l'aspersion du vignoble de Chablis. (13 janvier 1978)

JT Reims : craintes pour les vignes en cette période de gels à Avise. Interview de Jean-Claude Coïc, ingénieur viticole. Pourquoi les risques de gel se sont accrus avec l'intensification des exploitations. Les méthodes de luttes sont limitées et coûteuses : les chaufferettes, l'aspersion par l'eau. (21 avril 1981)

Lutte contre le gel dans les cèpes de Chablis : la nuit les vignobles s'illuminent (brûleurs au mazout), d'autres utilisent l'aspersion des vignes. Un travail épuisant pour les hommes. (24 avril 1991)

F2 Le Journal 20H : Sud-Ouest on surveille la température des vignes. Les vignerons s'inquiètent en cas de gelée nocturne. Pour pallier ce risque naturel, ils ont adopté un système de chauffage des vignobles déjà en vigueur en Champagne. (2 avril 1997)

13h00 de F2 : les vignerons brûlent de la paille pour gagner des degrés. Des températures d'hiver au milieu du printemps obligent certains à employer les grands moyens. Dans le Jura, la nuit dernière, des habitants sont venus aider des viticulteurs à brûler de la paille pour réchauffer l'atmosphère et sauver la future récolte. (6 mai 2019)

Pour les créateurs de contenus

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