Aller au contenu principal
1965, Niki de Saint Phalle remet en place un journaliste "macho"

1965, Niki de Saint Phalle remet en place un journaliste "macho"

Niki de Saint Phalle est née le 29 octobre 1930, d'abord mannequin, l'artiste va se lancer dans les arts en autodidacte et devenir l'une des plus célèbre plasticienne du 20e siècle. c'était aussi une femme engagée dan le féminisme et lorsqu'elle rencontrait un journaliste "macho", elle ne mâchait pas ses mots...


Par la rédaction de l'INA - Publié le 28.10.2020 - Mis à jour le 28.10.2020
Niki de Saint Phalle - 1965 - 06:59 - vidéo
 

D'abord chanteuse et mannequin, la jeune femme commence à peindre en 1952, elle a 22 ans. 

"Vous avez des gants de plongeur, vous mettez des chiffons dans un seau, vous les étendez. C'est un peu un travail de bonne ménagère non ", lui demande le journaliste un brin ironique. 

Dans l'émission Tilt, le 3 février 1965, la jeune artiste déjà célébrée reçoit un journaliste plutôt perplexe dans son atelier et essaye de lui expliquer en quoi consiste son art mais l'artiste déjà très engagée dans le combat féministe va le remettre à sa place.

"Oui, vous avez raison, ça c'est une partie de mon travail mais le résultat n'est pas une cuisine, je ne vais pas vous présenter avec un pot au feu mais j'essaye de vous présenter avec un espèce de délire spirituel, de moi-même".

Le journaliste insiste, "Et pourtant, c'est curieux, je vous ai posé la question un peu au hasard mais enfin vous me répondez que ce n'est pas en rapport avec un travail de femme et pourtant le résultat n'a rien de féminin" !

"Eh bien, je ne suis absolument pas d'accord avec vous ! Tout le résultat est féminin. Puisque moi je suis une femme, ce qui m'intéresse c'est exprimer une certaine poésie que je sens en moi. Eh bien, je ne peux que exprimer une poésie féminine". Assez énervée, l'artiste monte le ton, "Ça n'a rien à voir ! Un mec ne pourrait jamais faire ça ! Il n'aurait jamais pu tirer sur des tableaux comme je l'ai fait à une certaine époque. Parce que de se servir de ces engins destructifs que l'homme a imaginé. Seule une femme pourrait s'en servir dans un but constructif et beau. Et c'est la même chose avec mon travail. J'exprime exactement les problèmes de la femme aujourd'hui".

Malgré son visage où se marque un certain agacement, le journaliste poursuit son interview sur un ton provoquant, "oui, mais je voulais dire qu'aujourd'hui il y a une certaine puissance qui apparemment…" excédée Nikki de Saint Phalle l'interrompt sans lui laisser terminer sa question, "Ah, je vois que j'ai à faire avec un antiféministe ! Elle lui demande, "alors vous considérez que les femmes devraient peindre des bouquets de fleurs ? Sans lui laisser le temps de répondre, elle ajoute, "moi je préfère faire des accouchements ! Parce que c'est mon problème ! Les bouquets de fleurs ça ne l'est pas" !

"J'ai presque senti que c'était mon destin de montrer cette force-là"

Niki de Saint Phalle est aussi une militante engagée, utilisant son art pour transmettre un message politique. Quelques années plus tard, le 2 mai 1989, dans l'émission Du côté de chez Fred, l'artiste revenait sur son engagement féministe, sur son féminisme et la "force féminine véritable"..

"Eh bien, je crois que j'aurais répondu très différemment à différents moments de ma vie. Alors, parce que d'abord, j'étais une militante féministe qui voulait prouver qu'une femme, je pense qu'une partie de mes folies des grandeurs, c'est pour prouver qu'une femme avait la possibilité aussi, de rêver et de réaliser en grand. C'était très important pour montrer que c'était possible et j'ai presque senti que c'était mon destin de montrer cette force-là. Je sens en quelque sorte que le fait que je l'ai fait, ça ouvre le chemin à beaucoup d'autres femmes qui sentaient que, peut-être, elles ne pourraient pas imaginer en grand. Mais en même temps, chose curieuse, je travaille en grand, mais je travaille aussi, un peu comme les anciennes brodeuses. Très lentement, parce que pour le travail […], ça prend des années pour se réaliser parfois. Avec la céramique, avec les petits bouts de mosaïques, avec le travail d'équipe. Il faut beaucoup de patience. Tandis que le travail de Jean [Tingely], par exemple, je suis épatée. Il peut faire trois chefs-d'œuvre dans une journée, mais c'est là-dedans, alors dans un certain sens, il y a une force féminine aussi que j'aie cette possibilité de la lenteur et de prendre mon temps et d'être extrêmement têtue et d'avoir ça. Et je vois la force masculine et je suis épatée par ça aussi. Quand tu travailles avec une fureur" !

Pour aller plus loin

Voir l'interview en intégralité

Niki de Saint Phalle, autodidacte engagée. (Article) 


S'orienter dans la galaxie INA

Vous êtes particulier, professionnel des médias, enseignant, journaliste... ? Découvrez les sites de l'INA conçus pour vous, suivez-nous sur les réseaux sociaux, inscrivez-vous à nos newsletters.

Suivre l'INA éclaire actu

Chaque jour, la rédaction vous propose une sélection de vidéos et des articles éditorialisés en résonance avec l'actualité sous toutes ses formes.