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L'histoire du ghetto de Varsovie, un lieu de persécution et de résistance des Juifs polonais

L'histoire du ghetto de Varsovie, un lieu de persécution et de résistance des Juifs polonais

Le 19 avril 1943, les Juifs polonais enfermés dans le ghetto de Varsovie depuis 1940 se révoltaient dans un ultime élan d'espoir d'échapper à ce lieu de persécution. 

 

Par Florence Dartois - Publié le 15.04.2013 - Mis à jour le 18.04.2023
Ce jour-là : le ghetto de Varsovie - 1969 - 02:57 - vidéo
 

LA DATE ANNIVERSAIRE.

Le 19 avril 1943, les Juifs survivants du ghetto de Varsovie se soulevaient dans un ultime geste de révolte contre la barbarie nazie. Après trois ans de captivité, 40 jours de combats plus tard, le ghetto serait entièrement détruit, mais la dignité humaine aurait vaincu.

Le calvaire des Juifs polonais avait débuté en septembre 1939, avec l'invasion de la Pologne par l’Allemagne nazie. À peine installés, les occupants commençaient à persécuter les Juifs : port obligatoire d’un brassard, identification des magasins juifs, confiscation des radios, interdiction de voyager. Dès le mois d'octobre suivant apparaissaient les premiers ghettos : à Lublin, et un autre à Łódź. D’autres suivraient. Celui de Varsovie allait voir le jour en octobre 1940. Les nazis avaient ainsi délimité une zone dans Varsovie pour entasser sur trois kilomètres carrés près d'un demi-million de Juifs, afin de les exterminer par la faim et les maladies, et en déporter plus de 300.000 vers des chambres à gaz du camp de la mort de Treblinka, à 80 kilomètres à l'est de la capitale.

L'ARCHIVE.

L'archive en tête d'article a été diffusée dans le JT de 20 heures le 19 avril 1969. À l'aide de films et de photos d'époque, issus des archives des services cinématographiques de l'armée allemande, elle relate l'histoire du ghetto où allait s'entasser 400 000 personnes sur 300 hectares.

Le ghetto de Varsovie se situait en plein cœur de la ville. Les rafles des environs apportaient chaque jour un flot de nouveaux arrivants. En juin 1941, il y avait 431 000 Juifs enfermés et coupés du reste de Varsovie. Surpeuplé, l’endroit devint rapidement invivable, pourtant les reclus s'organisèrent, certains publiant même des journaux pour préserver un semblant de vie culturelle.

Dès le premier hiver, la nourriture et le combustible de chauffage manquèrent. L’hygiène se dégradait. La famine était le lot quotidien des familles enfermées derrière 16 kilomètres de murs et de fils barbelés.

La mort était présente partout, les corps décharnés s’accumulaient dans les rues pour être jetés dans la fosse commune. Le processus d’élimination, jugé trop lent par les Allemands, se doublerait bientôt de l’envoi de convois de Juifs vers l’est. Les nazis transformèrent peu à peu le ghetto en « gare de triage » d'où les Juifs étaient envoyés vers les camps d'extermination de Treblinka, Auschwitz et les chambres à gaz.

Dès le printemps 1943, les nazis intensifièrent les rafles et décidèrent de détruire le ghetto. Le 19 avril 1943, le général SS en charge de la zone ordonnait à ses troupes d’attaquer. Il ne restait déjà plus que 50 000 juifs coincés dans ce piège.

Le soulèvement des survivants

Dans un dernier sursaut de dignité, les survivants s’organisèrent, s’armèrent comme ils le pouvaient pour se battre. Leur seul objectif étant de mourir debout. Une organisation de combat se constitua et commença à attaquer les SS qui entraient dans le ghetto. Ses leaders étaient très jeunes : Mordechaj Anielewicz, 23 ans, Marek Edelman, 24 ans, et d'autre part l'Union militaire juive (Żydowski Związek Wojskowy, ŻZW), organisation sioniste révisionniste du Betar dirigée par Pawel Frenkel et Dawid Moryc Apfelbaum.

Les Juifs n'étaient armés que de pistolets de fortune et de quelques grenades artisanales, les nazis feraient intervenir leur aviation. Munis d'armes et de mitrailleuses, ils pensaient en terminer en quelques heures, « le combat inégal durera 27 jours », précisait le commentaire. Les SS finiraient par brûler les bâtiments, ne laissant d'autres choix aux résistants que de brûler vifs ou de se jeter dans le vide.

Le ghetto sera finalement dynamité. Le 16 mai 1943, toute vie était définitivement anéantie. Seule une poignée de combattants parvinrent à s'échapper par les égouts.

Un témoin raconte

Quarante ans après, Sam Hoffenberg, un des derniers survivants, témoignait au micro de Serge Misraï. Il avait 20 ans au moment de l'insurrection du ghetto : « Personne n'a cru à ça, on a pensé qu'on nous obligerait à travailler, mais on ne pensait pas à un massacre techniquement, scientifiquement organisé. La vie dans le ghetto était de plus en plus difficile. Les enfants mouraient. Les enfants n'avaient plus la force de marcher. Je ne peux me débarrasser de l'odeur des enfants vivants mourants (...) Quelle est l'idée qui a présidé à l'insurrection ? Mieux vaut mourir les armes à la main ? C'était insupportable. Je me suis entretenu avec le commandant en second de l'organisation juive des combats qui m'a dit que le pessimisme avait presque mené les jeunes au suicide. Zuckermann s'est opposé à cette idée de suicide et a commencé à organiser une résistance. De mon bunker, le 19 avril, j'ai vu des officiers SS reculer avec des mains tremblantes. C'est la plus grande joie que nous avons pu avoir. Le hasard a fait que j'ai été envoyé en dehors du camp, en garde avec un SS et j'ai été séparé de tout ce qui m'était le plus cher, mes amis, sans avoir dit au revoir... »

Autre survivante de cette insurrection, Anna Langfus. En 1965, elle racontait ce soulèvement mené par une poignée d’hommes, de femmes et d’enfants à peine armés.

100 000 personnes périrent d’épidémie et de famine. En 1983, Léon Abramovitch décrivait ce qu'avaient vu ses yeux d’enfant de 12 ans, « la faim, le froid et la terreur » qui régnaient dans le ghetto.

En 2005, l’écrivain Marek Halter, rescapé du ghetto, assistait à une commémoration à Auschwitz. Très ému, il insistait sur le devoir de mémoire essentiel pour que l’on n’oublie jamais le courage des disparus.

La mémoire des images

En 1961, Frédéric Rossif réalisait un documentaire sur le soulèvement de 1943, dont un extrait est à découvrir ci-dessous

Le documentaire est constitué d’images d’archives, de photos et de témoignages de rescapés. Le réalisateur décrit ci-dessous son travail de reconstitution.

Pour aller plus loin

Les dossiers de l'écran : le ghetto se suicide (24 avril 1973, Premium)

Chroniques sauvages : Les chroniques du ghetto de Varsovie. (Emission audio, 1988)

Wladyslaw Szpilman. Vous ne connaissez peut-être pas son nom, mais vous connaissez son histoire. Wladyslaw Szpilman est un pianiste polonais, né en 1911, dont la survie dans le ghetto de Varsovie pendant la Seconde guerre mondiale a été portée à l'écran (Le pianiste) par Roman Polanski.

Seuls les plus résistants et les plus chanceux survivent. En 2002, Roman Polanski, lui-même rescapé du ghetto, raconte l’histoire vraie d’un pianiste qui survécut dans le ghetto grâce à des circonstances extraordinaires. Le film intitulé Le pianiste remporte la Palme d’or à Cannes.

Présentation du film Korzak d'Andrzej Wajda à Cannes en 1990.

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