«Atmosphère, atmosphère, est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ? »
Vous raconter l’histoire de ce film de 1938 c’est prendre le risque de gâcher l’atmosphère. Le Paris des années 30, dans la brume, un petit hôtel sur le Canal Saint-Martin qui sent la clope, deux amants qui tentent de se tuer à l’étage, tandis qu’au rez-de-chaussée on déjeune en famille. Pierre tire sur Renée, mais n’a pas le courage de retourner l’arme contre lui. Il se rend à la police. Renée s’en sort et l’aime encore. « Tu seras toujours le témoin de ma lâcheté, nous ne pourrons plus jamais être libres ensemble » lui dit-il, qu’importe. Edmond, un voyou repenti, mène la vie dure à Raymonde incarnée par Arletty à la gouaille lumineuse et l’énergie dévorante. En plus d’offrir la réplique la plus célèbre du cinéma, cette prostituée au coeur tendre se donne comme un miroir inversé de la fragile Renée (Annabella) qui fait rêver tous les hommes. Deux femmes malmenées, par les hommes, donc. Deux femmes qui déjouent tout pronostic en matière de sentiment et qui nous livrent une belle leçon. Vivre avec ses bourreaux et ses fardeaux, cela ne veut pas forcément dire que nous ne sommes pas libres.