Selon une étude de l'INA et de l'association "Pour les femmes dans les médias" publiée dans La revue des médias, les femmes occupent en moyenne 38 % des postes-clés des séries et téléfilms français diffusés en prime time. La proportion tend à s’équilibrer chez les producteurs dont 41 % sont des femmes. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
Enora Contant. - À l’INA nous sommes à égalité sur le métier de producteur puisque nous sommes deux femmes et deux hommes. Généralement, la production est un métier où il existe plus de femmes dans les postes administratifs et d’assistant.e mais ce n’est pas le cas pour les postes de management et de direction.
Selon vous, la mise en place de quotas est-elle nécessaire ?
À mon sens il est nécessaire de mettre en place des quotas pour détruire l’effet de plafond de verre s’il existe. Mais, en tant que productrice, c’est naturel de choisir un.e chef op en fonction de ses qualités et non de son sexe ; je ne fais pas cela dans un objectif féministe. J’ai avec moi une équipe de camera women qui font leur métier aussi bien que les hommes : elles courent aussi bien, elles portent le matériel aussi bien et sont aussi compétentes. Cependant, imposer des quotas dans le cadre de certains métiers peut poser des problèmes parce qu’il existe aussi des contraintes physiologiques.
En tant que productrice, votre capacité de décision est-elle contrainte par un environnement masculin ?
À l’INA et même avant d’y travailler, lorsque j’ai créé ma société, je n’ai heureusement jamais eu le sentiment d’avoir été bridée par des hommes. C’est plutôt ma jeunesse qui a parfois été une obstacle. Mais aujourd’hui, je me sens réellement l’égale des hommes dans mes prises de décision et la manière dont je suis considérée. S’il y’a eu des débordements dans la fiction, je n’ai personnellement jamais assisté à cela dans le documentaire.
Éliane Vigneron, scénariste pour des séries télévisées, constate dans l'article de la revue des médias que les femmes de pouvoir, notamment les productrices, sont parfois décrites comme des « monstres » autoritaires. Est-ce juste ?
Depuis que j’ai commencé, j’ai cette volonté de me battre et je crois qu’aujourd’hui c’est ancré en moi. Je n’ai pas eu l’impression d’avoir dû en faire « plus » pour réussir car c’est dans ma nature d’être offensive. En revanche, en tant que femme, il faut sans doute - plus que les hommes - apprendre à s’entourer. J’ai personnellement eu la chance de rencontrer des hommes qui ont été bienveillants et qui m’ont accompagné dans ma carrière, mais il faut - en tant que femme - être prudente sur les personnes qui vous entourent.